Les abolitionnistes de l’élevage ne représentent que 2 % de la population. Ils ont pourtant un fort pouvoir de persuasion, grâce à leur communication sur les réseaux sociaux.
D’après un sondage Ifop réalisé en juin 2016 sur un panel représentatif de la population française, 2 % des personnes sont pour l’arrêt de l’élevage et de la consommation de viande. 24 % souhaitent la fin du système intensif et le développement de l’agriculture biologique. Ce sont majoritairement des femmes. 51 % sont progressistes dans le sens où ils demandent l’amélioration de la production standard. 10 % sont satisfaits de l’élevage actuel et encouragent les systèmes intensifs, les progrès de compétitivité et les exportations. Le reste de la population (13 %) n’a pas de vision de l’élevage où est difficile à classer dans l’une ou l’autre des catégories précédentes.
La part de la population qui veut l’arrêt de l’élevage ou la sortie du modèle intensif a un fort pouvoir de persuasion sur les réseaux sociaux. Sa communication accentue la tendance des Français à consommer moins de viandes. Comment réagir face aux controverses ? C’est la question à laquelle ont tenté de répondre des opérateurs des filières viandes, la semaine dernière au lycée La Touche à Ploërmel (56), lors d’une table ronde animée par des étudiants.
[caption id= »attachment_26399″ align= »alignright » width= »150″] Marc Henninger, vétérinaire Elanco[/caption]
Quel est le plus durable ? Le bio à 4,5 d’IC ou le mâle à 1,5 ?
Nous devons être en veille sur les réseaux sociaux pour connaître les tendances. Ensuite, il faut répondre en étant courtois et factuel, avec un message commun à la profession, en mettant en avant notre légitimité. Éleveurs, vétérinaires, techniciens sont légitimes quand ils parlent d’élevage. Nous devons expliquer.
Quel est le modèle le plus durable ? Le bio à 4,5 d’indice de consommation (en porc) ou l’élevage de mâles entiers à 1,5 ? Nous devons insister sur le fait que la production standard est bonne. Sinon, nous vendrons plus de labels mais beaucoup moins de volume global. Travaillons ensemble entre différents maillons de la filière en consacrant un peu d’argent à cette communication.Marc Henninger, vétérinaire Elanco
[caption id= »attachment_26395″ align= »alignright » width= »150″] Olivier Cormier, directeur Prestor[/caption]
De moins en moins de candidats pour les portes ouvertes
La segmentation est déjà faite. 30 % des porcs répondent à un cahier des charges. Nous pourrions faire plus mais il faut une valorisation pour les éleveurs. Notre communication doit être positive mais nous ne savons pas le faire, notamment sur les réseaux sociaux. Les portes ouvertes d’élevage, c’est bien, mais nous avons de plus en plus de mal à trouver des volontaires car dès le lendemain, l’opération est visible sur Internet, avec une vision déformée de la réalité en caméra cachée.Olivier Cormier, directeur Prestor
[caption id= »attachment_26397″ align= »alignright » width= »150″] Christine Roguet, Ingénieur Ifip[/caption]
Un espace entre le bio et le conventionnel
Entre le bio et le conventionnel, il y a un espace à mieux valoriser. Les Danois exportent 90 % de leur production porcine, dont une partie de porc « bien-être » au Royaume Uni. Sur les 10 % écoulés sur le marché intérieur, la différenciation augmente avec la création en 2016 du label bien-être officiel. Plus de bien-être générant plus de coûts, la question est « qui paie ? ».
Deux stratégies sont suivies : faire payer tous les consommateurs en prélevant une cotisation sur chaque kilo de viande vendu (cas de l’Initiative Tierwohl en Allemagne) ou segmenter le marché avec des labels (bio ou « bien-être » comme Beter Leven aux Pays-Bas). Nous devons saisir la possibilité laissée par les gouvernements de répondre aux demandes de société par des normes professionnelles, au risque de nous voir imposer de nouvelles normes réglementaires.Christine Roguet, Ingénieur Ifip
[caption id= »attachment_26398″ align= »alignright » width= »150″] Jacques Mainguy, éleveur de porcs Aveltis[/caption]
Travailler avec les distributeurs
Nous nous préoccupons de répondre à la demande des consommateurs, même si nous avons un peu de retard en Bretagne sur les normes bien-être par rapport à d’autres pays du nord de l’Europe. Ces normes induisent un surcoût à la production. Nous devons donc travailler avec les distributeurs pour avoir un retour financier. Nous devons répondre aux attaques, mais seuls, c’est difficile. Les membres des associations ont le droit de contester l’élevage mais leurs méthodes sont irrespectueuses des éleveurs.Jacques Mainguy, éleveur de porcs Aveltis