Ce sont une fois encore les surfaces d’intérêt écologique qui posent le plus de problèmes dans le cadre de la préparation des actes délégués de la réforme de la Pac.
Les dernières négociations sur la réforme de la Pac se cristallisent une fois encore sur les surfaces d’intérêt écologique (SIE) dans le cadre du verdissement des aides du premier pilier. Les experts des États membres réunis au sein du Comité spécial agricole (CSA) le 13 janvier ont salué les efforts de la Commission européenne qui a tenu compte de leurs remarques dans la transposition légale de la réforme de la Pac, mais ils restent critiques sur un certain nombre de points, notamment liés au verdissement. La Commission a préparé dix propositions d’actes délégués dont deux ont déjà été adoptées. Les huit autres sont actuellement en phase de consultation dans les différents services de la Commission.
Sanctions sévères
Beaucoup d’États membres (France, Royaume-Uni, Espagne, Italie, Pologne, Danemark…) estiment que les sanctions concernant le verdissement ne sont pas proportionnelles et risquent d’aboutir à des diminutions d’aide énormes pour de petites infractions. La prise en compte de certaines cultures et pratiques agricoles dans les surfaces d’intérêt écologique fait aussi l’objet de débats : par exemple, certains pays comme la France, la Hongrie ou l’Autriche demandent que le coefficient attribué aux légumineuses soit supérieur à ce que propose Bruxelles, tandis que pour d’autres (Finlande, Grèce) c’est le coefficient dont bénéficie les pâturages ou les forêts qui devrait être revu à la hausse. Toujours sur le verdissement, les activités minimales prévues sur les zones à la marge des cultures et des forêts sont trop limitées (interdiction de toute culture, propose Bruxelles) et les critères les définissant ne sont pas assez précis, estiment l’Irlande, le Royaume- Uni et L’Italie.
Agriculteur actif et jeunes
Dans un autre domaine, les critères pour la définition d’agriculteur actif sont trop restrictifs dénoncent l’Italie, l’Allemagne et la République tchèque notamment. Les propositions actuelles pourraient pénaliser les agriculteurs ayant une autre activité en parallèle de la production agricole (gites, restauration, équitation, etc.). Enfin, pour la France, l’Allemagne, l’Irlande et la Belgique, les conditions d’éligibilité pour l’installation des jeunes agriculteurs continuent de poser problème. Le dispositif imaginé par Bruxelles empêche la reprise d’exploitations sous une forme sociétaire, en particulier si le jeune s’associe à quelqu’un de plus âgé (pour une transmission par exemple).
Députés démontés
Pour les députés européens, non plus, le compte n’y est pas dans la transposition légale de la réforme de la Pac. Suite à une réunion à Strasbourg avec la Commission européenne le 13 janvier, le président de la commission de l’Agriculture du Parlement, Paolo De Castro, a prévenu : « Il y a un écart entre ce que la Commission propose et ce que le Parlement est en mesure d’accepter ». Ce sont là encore les surfaces d’intérêt écologique et ce qui peut-être « cultivé » sur ces surfaces qui fait débat.
« Pertes injustifiées de revenu »
Dans un courrier adressé au commissaire européen à l’agriculture, Dacian Ciolos, le Copa-Cogeca (organisations et coopératives agricoles de l’UE) fait également part de ses inquiétudes concernant la mise en œuvre des mesures de verdissement. « Nous avons besoin d’un verdissement qui maintienne le potentiel de production de l’UE et qui évite les pertes injustifiées de revenu pour les agriculteurs », écrit Pekka Pesonen, le secrétaire général de l’organisation. Il s’inquiète notamment de l’interdiction de cultiver quoi que ce soit sur les bordures de forêt, des limitations de surface imposées aux cultures dérobées, et de l’absence des cultures fixatrices d’azote dans les surfaces d’intérêt écologique.