La grippe du porc classique apparaît de manière épisodique et touche rapidement une partie du cheptel. La forme récurrente se traduit par une persistance à l’échelle de l’élevage, se répétant sur chaque bande, à un âge déterminé.
Le virus influenza de sous-type H1N1, responsable des deux tiers des cas de grippe en France, circule partout dans le pays. Son cousin H1N2 affecte plutôt les élevages de l’Ouest. Le réseau de surveillance révèle l’introduction du H3N2 dans le Nord du territoire. Le H1N1 pdm (pandémique), transmis au porc par l’homme, circule de manière quasi-asymptomatique (sans symptômes) dans le Centre de la France. Les caractéristiques de réplication du virus, (possibilité d’échanges de segments de génome entre différentes souches), expliquent la grande diversité des virus influenza porcins dans le monde et la possible émergence de nouveaux sous-types. Le risque pour la santé humaine est donc à considérer comme l’ont montré les infections humaines aux Etats-Unis par des virus réassortants H1N1 pdm et des sous-types H1N2 ET H3H2.
Un tiers des infections sont désormais qualifiées de récurrentes. Par rapport aux grippes « classiques », la grippe dite récurrente est moins contagieuse mais la durée d’excrétion individuelle du virus est plus longue. Elle s’installe durablement et survient souvent en post-sevrage, pouvant se répéter systématiquement sur toutes les bandes. Elle entraîne une déstabilisation permanente de l’élevage et correspond parfois à une co-circulation simultanée de plusieurs virus grippaux différents. Deux épisodes grippaux (dûs à deux sous-types de virus) peuvent se succéder dans un même élevage. La sévérité de l’infection est variable, parfois très forte, en cas de co-infection par le virus du SDRP, le mycoplasme ou le PCV2.
Limiter les adoptions
« Pour lutter contre ces grippes récurrentes, il faut rompre les cycles d’infections s’instaurant entre les bandes, surtout dans le cadre des conduites où l’intervalle inter-bandes est court », explique Nicolas Rose, vétérinaire, intervenant aux Ripp (Rencontres internationales de production porcine), à Rennes, le 21 mars dernier. « Dans la mesure du possible, il faut envisager l’option d’exporter une à deux bandes de porcelets sevrés afin d’éviter d’introduire en PS une nouvelle bande au moment où les précédentes sont encore en pleine excrétion du virus ». Les réallotements sont à proscrire. Les adoptions en maternité doivent être limitées à leur strict minimum et réalisées entre rang de portées équivalentes (porcelets de truies en 2e portée ensemble, par exemple). La vaccination des truies permet de limiter les conséquences cliniques de l’infection grippale. Des travaux sont en cours pour évaluer diverses stratégies vaccinales : vaccination de masse, double rappel en gestation… La biosécurité interne est essentielle : marche en avant, tenues spécifiques dans les salles bien séparées des reproducteurs et des porcs en croissance. Bernard Laurent
L’avis de :
Claus Heisel, vétérinaire danois
Les sous-types de virus influenza rencontrés au Danemark sont le H1N1 (stable), H1N1 pdm (en hausse) et le H3N2 (en baisse). Je recommande la vaccination de toutes les cochettes avec Gripovac 3, en association avec la vaccination PCV2 et le Rouget-Parvo, en quarantaine. Le Gripovac est efficace, sauf contre le sous-type H1N1 pdm (pandémique). Quand celui-ci est détecté – l’analyse PCR (recherche de l’ADN) permet de le distinguer du H1N1 – un autre vaccin est utilisé (Flusure), avec un recul limité quand à son efficacité. Quand la grippe est diagnostiquée dans un troupeau de truies, je recommande une des stratégies suivantes pour éviter les retours en chaleur et les baisses de performances de prolificité :
- Vaccination des cochettes avant la 1re IA et vaccination de masse du troupeau une fois par an en août ;
- Vaccination des cochettes avant la 1re IA et vaccination bande à bande des cochettes, 3 semaines avant mise-bas ;
- Vaccination des cochettes avant la 1re IA et vaccination bande à bande des truies et des cochettes, 3 semaines avant mise-bas.
Julie Ménard, vétérinaire canadienne
Les cas d’influenza porcins sont en hausse constante ces 3 dernières années au Canada. On retrouve les sous-types présents ailleurs avec une émergence du H1N2 qui était absent auparavant. La grippe devient récurrente dans l’Ouest du pays. L’un des moyens les plus efficaces pour réduire l’intensité de la crise est d’augmenter les débits de ventilation et de réduire la température ambiante. « Sortir le virus ». En prévention, je conseille de laisser les truies mettre bas naturellement. Cela permet à la montée en lait de suivre son cours naturel et de laisser le porcelet prendre son premier bagage d’immunité par sa mère (colostrum). Les porcelets à sevrer seraient les réservoirs du virus. Il faut éviter les adoptions. Les cochettes sont exposées à des truies de réforme en quarantaine (de rang 1 si possible) et vaccinées contre la grippe (double vaccination). Pour les truies, la vaccination de masse est de plus en plus utilisée. Toutes les truies sont vaccinées en même temps 3 fois dans l’année. Cette technique permet d’éliminer la circulation virale et de produire des porcelets négatifs. Les règles de biosécurité internes doivent être, en parallèle, renforcées.