Depuis quelques semaines, le parc du Thabor au cœur de Rennes a retrouvé ses cascades et ses fontaines. C’est un des grands projets du plan de réaménagement du parc qui s’étend, depuis 2010, sur 10 ans.
Une averse arrose la végétation foisonnante du parc du Thabor. Bientôt les larmes épaisses deviennent gouttelettes scintillantes, mises en lumière par la renaissance des rayons du soleil. Les plic ploc cessent, mais laissent la place à d’autres bruits d’eau qui coule. Lointains au départ, ils se renforcent à l’arrivée devant les bassins du jardin des Catherinettes, deviennent puissants sur le pont au pied des chutes d’eau. Ces bruits chantants, le parc rennais les a connus par le passé, mais ils se sont tus pendant 23 ans. Depuis quelques semaines, les cascades et fontaines ont été remises en eau. Un spectacle visuel et sonore apprécié des visiteurs, redonnant tout son romantisme à cette partie du parc.
Les deux ha des Catherinettes ont été acquis au début du XXe siècle et aménagés plutôt à l’anglaise par l’ingénieur Blin avec des constructions en béton (cascades, grotte, ponts) imitant l’aspect du bois ou de la roche. « À leur inauguration en 1907, le circuit fonctionnait en eau perdue. Des milliers de m3 d’eau étaient déversés chaque année dans la Vilaine pour son fonctionnement. En 1980, un circuit fermé avait été mis en place, mais les fuites étaient trop importantes, il a été fermé en 1991 », relate Bertrand Martin, responsable exploitation à la Direction des jardins de Rennes.
[caption id= »attachment_8960″ align= »aligncenter » width= »201″] « Aujourd’hui, les visiteurs peuvent à nouveau contempler et écouter le spectacle de l’eau qui coule dans les cascades », montre Bertrand Martin, responsable exploitation à la Direction des jardins de Rennes.[/caption]
Un circuit fermé et étanche
Les technologies actuelles ont permis de revoir l’étanchéité qui, il y a plus de 100 ans, avait été faite à la chaux. « Nous avons également ajouté une cuve enterrée de 50 m3 qui permet de stocker l’eau la nuit, et des pompes à débit programmable en fonction de la fréquentation du parc. » Les travaux ont représenté un coût total de 307 000 €. Ils s’inscrivent dans le cadre d’un programme d’investissements sur 10 ans dans le parc, à hauteur de 500 000 € par an.
Car le Thabor, site très fréquenté par les Rennais et d’autres visiteurs de la ville, tombait à l’abandon depuis de nombreuses années. « Il fait partie du patrimoine collectif. La Ville a décidé de le rénover avec des chantiers d’envergure qui ont été entamé en 2009 : remise en eau des deux bassins à la française, rénovation de la volière, du kiosque, et de la colonne de Juillet, aménagement d’un théâtre de verdure, d’une brasserie, refonte de la signalétique et du mobilier du parc… » D’autres gros travaux vont suivre, comme la mise en place d’une aire de jeux pour les jeunes enfants, la réfection de la grotte ou de l’Orangerie.
Jardins à la française, à l’anglaise et botanique
À l’origine, le parc du Thabor était une colline dominant la ville de Rennes. Attribué par les moines bénédictins qui vivaient dans l’abbaye Saint-Melaine à proximité, son nom fait référence au mont Thabor dominant le lac de Tibériade en Israël. Après avoir appartenu au monastère et à l’évêché, les terrains ont été acquis par la ville de Rennes. Couvrant 10,6 ha, le Thabor présente la particularité de mêler un jardin à la française, un jardin à l’anglaise et un important jardin botanique. L’aménagement du parc fût confié autour de 1866 aux frères Bühler, jardiniers et architectes-paysagistes, également créateurs du parc de la Tête d’Or à Lyon.
Ces derniers installèrent le jardin à la française et le jardin paysager. Les serres, la volière, les grilles, l’orangerie et le kiosque à musique furent réalisés sur les plans de l’architecte communal Jean-Baptiste Martenot. L’audit végétal réalisé il y a quelques années sur le parc chiffre à 1 000 le nombre d’arbres, dont quelques-uns remarquables comme un chêne de plus de 200 ans ou un cèdre majestueux. Ce magnifique parc peut fièrement revendiquer sa 4e position des jardins les plus connus de France.
Un festival de parfums et de chants d’oiseaux
En continuant la visite vers l’Est du parc, les oreilles attentives continuent à être charmées par les discours généreux des différents oiseaux, que ce soient les canards dans leur enclos dédié, les colombes, les serins, les perruches, dans la volière, ou encore les pies, merles et passereaux en liberté. Moins bavards, les écureuils roux aussi font leur apparition. Bien sûr, le parc n’est pas que sonore. En ce mois de mai, de délicieux parfums de magnolias ou de rhododendrons surgissent. Dans la roseraie, c’est le festival des senteurs. À côté, le jardin botanique installé à cet emplacement en 1868, accueille 3 000 plantes sur des plates-bandes circulaires. Les insecticides chimiques ont été abandonnés au profit d’auxiliaires naturels. « Le jardin botanique échange des graines de variétés indigènes dans le monde entier. Il abrite aussi un pollinarium sentinelle qui permet d’alerter lors des émissions de pollen de telle ou telle espèce présente autour de Rennes. Cela aide notamment les allergologues à affiner leurs traitements. »
Agnès Cussonneau