L’installation en viande bovine avec reprise totale du cheptel s’avère plus appropriée. Un montant de reprise limité, un apport personnel suffisant, et une maîtrise technique restent par ailleurs des points essentiels.
La baisse des effectifs de vaches allaitantes est réelle en Bretagne et 5 000 vaches sont à reprendre en moyenne chaque année. Mais est-il possible de monter un projet aujourd’hui en viande bovine ? « Une enquête réalisée en Ille-et-Vilaine auprès de jeunes installés depuis 5-6 ans montre qu’ils ont manqué de repères, et que les prescripteurs sont prudents. Les jeunes évoquent aussi des premières années difficiles, notamment au niveau des trésoreries. Toutefois, ils se disent satisfaits de s’être installés », a synthétisé Christian Veillaux, responsable productions animales à la Chambre d’agriculture 35, lors de l’assemblée générale d’Arco-Gibev.
Plusieurs simulations
Une étude menée par les conseillers viande bovine des Chambres, portant sur des simulations de reprise d’un cheptel de 62 vaches sur 73 ha (moyenne bretonne), montre les difficultés dues au manque de rentabilité de cette production et aux coûts élevés de reprise. « Trois scénarios ont été chiffrés : soit la reprise intégrale du cheptel, soit la reprise du cheptel de souche, soit une installation progressive avec des broutardes. Nous avons pris comme préalable des prélèvements privés de 13 450 euros/an. »
Contrairement à une idée reçue, c’est la reprise complète qui est la plus intéressante en termes de trésorerie et résultat courant après prélèvement privé (sur une conjoncture 2013). Avec le « cheptel souche » ou les « broutardes », la trésorerie est insuffisante les premières années, il faut recourir à des emprunts. Les résultats courants « reprise intégrale » et « souche » se rejoignent assez rapidement, par contre il faut attendre la 6e année pour le scénario « broutardes ».
Difficile de rentabiliser le JB en bâtiment neuf
40% des jeunes bovins (JB) bretons sont engraissés en Ille-et-Vilaine et 75% sont produits dans des élevages laitiers. Dans les groupes de formation sur les coûts de production, la rentabilité des ateliers est confirmée, avec un revenu supérieur à 1,5 Smic/UMO. « Par contre, la rentabilité actuelle est insuffisante pour créer un bâtiment neuf, comme c’est souvent le cas dans les productions animales », précise Christian Veillaux.
Un apport initial de 35 000 € souhaitable
L’apport initial joue aussi sur l’évolution de la trésorerie en scénario « complet ». « Un apport initial de 35 000 euros est souhaitable sauf à réduire le prélèvement privé… » La technique prime également. « Le quart supérieur en performances peut investir 100 000 euros de plus sur 12 ans. » La conjoncture et le devenir des PMTVA sont d’autres facteurs susceptibles de jouer énormément sur les trésoreries. « Entre les conjonctures 2011 et 2013, les charges par vache ont augmenté de 74 euros et le produit de 214 euros, soit une marge brute de +140 euros/vache. Mais la valeur du cheptel étudié augmente de 45 000 euros. »
L’installation en viande bovine reste possible même si elle est plus facile dans un cadre familial. « La transmission progressive est une autre voie, elle repose sur la volonté du cédant », note un producteur. Pour un autre éleveur, « le système bancaire français est trop figé, avec des amortissements sur 10-15 ans d’outils qui sont rentabilisés sur 40 ans. D’autres pays étalent davantage la dette ou ont recours à des investisseurs extérieurs. » Serait-ce une solution, alors que ces derniers demandent des retours importants, et que les agriculteurs veulent rester libres chez eux ? Agnès Cussonneau