S’agrandir en contournant le « contrôle des structures » via la création de sociétés est de plus en plus courant. La FDSEA 56 monte au créneau et entend modifier le projet de loi d’avenir.
De plus en plus de transferts de terres échappent aux Commissions départementales d’orientation agricole (CDOA) en raison de la création abusive de sociétés. Un futur cédant s’associe, en Gaec, peu de temps avant son départ en retraite, avec un repreneur, déjà installé. Lors du départ effectif, un simple transfert de parts sociales permet au repreneur de récupérer l’ensemble des terres. En toute légalité. Ni la Safer de Bretagne, ni la CDOA n’ont connaissance de la transaction. (Avant la loi d’orientation de 2006, le départ d’un associé était soumis au contrôle des structures, car l’opération pouvait être considérée comme un agrandissement. Depuis, ce n’est plus le cas). « Nous demandons que la CDOA ait un œil sur ce type de reprise. Il en va de la répartition équitable du foncier agricole », estime Frank Guéhennec, président de la FDSEA 56. Les responsables du syndicat, réunis à Pluméliau lundi dernier, veulent une modification de la réglementation sur ces montages sociétaires. « La prochaine Loi d’avenir peut être une opportunité pour le ministre de l’agriculture de changer ces règles ». Le projet de loi prévoit une possibilité de préemption de la part de la Safer dans le cas où 100 % des parts sociales sont cédées au repreneur. « Nous ne sommes pas dupes. Il suffira au cédant de conserver quelques parts dans la société, pour contourner le problème et échapper au contrôle ».
Foncier convoité à Pluméliau
La réunion sur une ferme à Pluméliau ne devait rien au hasard. « Nous avons un bel exemple dans le secteur de ce type de montage sociétaire qui empêche l’installation et la consolidation d’autres exploitations », explique Alain Le Roux, responsable local du syndicat. « La trentaine d’hectares d’un futur retraité vont ainsi rejoindre une structure qui compte déjà entre 200 et 300 hectares ». Une partie de ces terres était convoitée par Johanne Gicquel, conjointe collaboratrice sur la ferme en maraîchage bio de son mari. « Je ne demande que six hectares pour m’installer, avoir un vrai statut de chef d’entreprise, et produire du pain bio. La ferme dégage du revenu ; ce n’est donc pas un problème financier », assure t-elle. Elles pouvaient permettre également de consolider quelques fermes voisines, selon Alain Le Roux, qui soulève un autre problème lié à ce type de transaction : la surenchère sur le prix du foncier. Proche des 10 000 € par hectare dans le secteur, actuellement. « Il faut ramener du bon sens sur les territoires », reprend Frank Guéhennec, prêt à en découdre avec les responsables politiques si la prochaine loi d’avenir ne leur donne pas satisfaction. Bernard Laurent