Après la pénurie liée à la mise aux normes bien-être en 2012, la surproduction s’installe en 2013 et 2014. Les prix des oeufs ont fortement baissé alors que les éleveurs sont confrontés à une hausse de leurs coûts de production.
Après le pic historique de mars 2012 à 12.85 €/100 œufs la cotation TNO à Rungis s’est inversée depuis 2013 avec le retour en production suite à la mise aux normes. Malgré les mesures mises en place pour réduire l’offre, les cours restent bas : ils remontent légèrement à partir de l’automne 2013 puis se stabilisent à un bas niveau au 1e semestre 2014. La France conforte sa place de premier producteur européen en 2013 avec un niveau de production qui dépasse largement son niveau d’avant mise aux normes (+12.8% par rapport à la moyenne 2006-2010). Dans ce contexte de surproduction, la cotation TNO se replie encore en avril et mai 2014.
[caption id= »attachment_6885″ align= »aligncenter » width= »300″] TMO – moyenne mensuelle[/caption]
Chute des résultats des éleveurs
Les éleveurs étant pour la majorité d’entre eux sous contrat avec un groupement, l’effet de lissage retarde l’impact de la chute des cours mais ne comble pas le manque à gagner lié à la flambée des coûts de production. L’aliment reste la principale charge en œufs de consommation avec 64 % du coût de production (clôtures 2013). Le coût alimentaire atteint un niveau record en 2013. L’impact de la crise des œufs combiné avec un prix d’aliment élevé entraîne une chute des marges brutes : de 5.90 €/poule dans les clôtures du 1e trimestre 2013, elle s’écroule à 3.69 €/poule au 3e trimestre et à 2.08 €/poule au 4e trimestre 2013.
Les revenus des éleveurs sont négatifs en fin d’année. Les marges remontent doucement pour les clôtures comptables du premier trimestre à 3 €/poule grâce à la une détente sur le prix de l’aliment mais les revenus restent négatifs. Le second poste provient du coût d’achat des poulettes puis on retrouve le coût de l’outil (bâtiment + équipement + frais financiers). L’incidence de la mise aux normes est très variable d’une exploitation à l’autre selon le type de mise aux normes réalisé (simple aménagement, changement de cages, reconstruction à neuf).
Mise en place de prévisions de productions à travers le « passeport de la poule »
Pour retrouver une situation plus sereine, il faudrait un meilleur équilibre offre/demande pour faire remonter le prix des œufs. L’interprofession se mobilise en essayant de mettre en place des prévisions de productions dans les différents modes d’élevage. Ce « passeport de la poule » est actuellement testé sur l’année 2014. D’autres solutions sont en étude pour mieux réguler la production (durée minimale de vide technique…). L’interprofession reste mobilisée également sur les accords bilatéraux UE-USA et sur l’ouverture d’un quota ukrainien à doit nul.
Difficultés dans les trésoreries
Les éleveurs ont accumulé de fortes pertes de trésoreries fin 2012 ainsi qu’au premier semestre 2013 au moment du pic du prix de l’aliment combiné avec la chute du prix des œufs. Depuis, le coût de revient n’est pas encore couvert et les pertes s’accumulent. De plus, les pertes sont accentuées suite à l’agrandissement durant les mises aux normes. La crise est donc très violente et la situation financière des éleveurs est fragilisée : le taux d’endettement sur capital d’exploitation remonte de 10 points à 85 %. C’est d’autant plus vrai pour les éleveurs n’ayant profité que partiellement de la bonne conjoncture de 2012 pour cause de travaux de mise aux normes. Ceux qui ont anticipé les travaux sont probablement mieux armés pour résister. La remontée des résultats sera lente en 2014 et conditionnée par une baisse de l’offre. La baisse du prix de l’aliment ne sera pas suffisante. Côté positif, l’œuf reste une valeur sûre en termes de consommation : c’est la moins chère des protéines et elle est moins touchée par la crise économique que l’ensemble des viandes. Les achats des ménages continuent de progresser en 2014 avec une stabilité pour les œufs standards (62 % des volumes vendus) et une forte croissance pour les œufs plein air. Geneviève Audebet/CerFrance Côtes d’Armor