Le tomographe, un scanner RX, se met au service de la filière porcine. Les secteurs de la génétique, de la santé, de l’industrie ou de l’alimentation en attendent de réels progrès.
« De la science-fiction à la réalité. Nous sommes aux portes d’une application du scanner RX dans la filière porcine, après les études d’impact économique », prédit Joël Bidanel, aux Matinales de l’Ifip, au Space. En repoussant les limites des méthodes traditionnelles, le tomographe offre de véritables perspectives d’évolution pour la filière. Tous les domaines sont concernés, de la sélection à la salaison. Le scanner permet de discriminer les tissus selon leur densité.
Complémentaire de l’IRM, il est utilisé en médecine humaine. « Le tomographe permet de reconstruire des images dans les trois plans de l’espace », indique Mathieu Monziols, de l’Ifip. « Sur les carcasses et sur les pièces de découpe : mesures du TMP (taux de pièces des muscles, qualité des pièces…) ». Surtout, le tomographe permet d’effectuer ces mesures in vivo, sur des porcs légèrement anesthésiés, par simple injection intramusculaire. « Cela permet de connaître la composition de l’animal vivant, d’analyser la courbe de croissance des différents tissus avec plusieurs mesures à différents stades et d’anticiper la composition corporelle à l’abattage ». Le tout, sans détruire les carcasses ou tuer les animaux, comme auparavant. Dans un proche avenir, on peut imaginer ces scanners RX, transportés par camion, dans les élevages de sélection et, bien sûr, en fonction dans les abattoirs, puisque non invasifs et donc moins coûteux. Des spécialistes des divers maillons de la filière en parlent. Bernard Laurent
L’avis de :
Loïc Flatrès-Grall, Gene+
Le tomographe est un outil de recherche de pointe. Il propose une méthode de référence pour calibrer les animaux vivants en ferme sur le poids des pièces ou sur la qualité de la viande comme le gras intramusculaire. D’obtenir, en fait, des phénotypes de qualité puis de sélectionner sur des caractères héritables et variables dans l’espèce. En filière cunicole, le tomographe travaille déjà en routine pour évaluer les carcasses des lapins. Depuis 2012, la filière ovine l’utilise en Écosse pour sélectionner les béliers reproducteurs. Le scanner RX est transporté en camion dans les élevages. L’organisme de sélection fait un choix des 20 % meilleurs béliers du troupeau, au préalable. Ceux-ci sont endormis et passés dans l’appareil. Les 5 % les meilleurs, révélés au tomographe, sont utilisés en reproduction. C’est un outil de sélection, parmi d’autres.
David Dutoyer, Jambon de Bayonne
Nous travaillons depuis 2010 sur l’évolution du sel et de l’eau pendant le process de fabrication des jambons secs, grâce au tomographe (mesures possibles à différents stades du process). La baisse du taux de sel est une réelle problématique actuellement. Il convient d’abaisser la teneur tout en assurant une bonne conservation des jambons. Auparavant, on procédait à des analyses chimiques ce qui supposait la destruction des produits. Aujourd’hui, l’objectif est de prédire les taux de sel et d’humidité en fin de process et de définir, dans un second temps, des modèles de fabrication en fonction de la qualité de la matière première. Nous pourrons les fournir à tous nos salaisonniers et homogénéiser les procédés de fabrication dans toutes nos usines.
Daniel Plauchenault, Mixscience
Le tomographe donne accès à des mesures qui n’étaient pas possibles auparavant. Il permet, par exemple, d’évaluer le dépôt des minéraux, donnés via l’alimentation, dans les os à différents stades de croissance de l’animal. Les mesures sur le squelette nécessitaient de tuer l’animal, mettant fin à sa carrière de reproducteur (pour connaître l’influence de l’alimentation sur la qualité des aplombs des truies, par exemple). Ces prélèvements pour l’analyse avaient un coût de découpe (opération et pertes). Désormais, il n’y aura pas de dégradation de la valeur marchande. Les études permises par le scanner RX sur les tissus d’intérêt (muscle, gras…) à différents stades permettront de définir des stratégies nutritionnelles.