Les troupeaux ont grandi, l’herbe a parfois manqué d’eau, les rendements de maïs 2013 n’étaient pas partout au rendez-vous… En attendant d’ensiler le nouveau millésime, la récolte de maïs encore immature doit permettre de passer le cap du manque de stock.
Aux quatre coins de la Bretagne, le maïs murit tranquillement. À BCEL Ouest, Julien Rigaud annonce des parcelles « à 25 à 27 % de matière sèche dans le Sud-Finistère ». Son collègue Jean-Félix Torchen a constaté au nord du département « des indices 220 à 240 approchant 30 %. » Mais dans un début septembre breton ensoleillé, « on est encore loin de la maturité nécessaire pour une bonne conservation et une qualité de fourrage optimum pour produire du lait. »
Le troupeau a grandi, les silos n’ont pas suivi
Pourtant, les premières ensileuses entrent en action pour récolter de quoi « faire la soudure. » Sur le terrain, la pénurie de fourrage est sensible. « Nos enquêtes fin juin concluaient que 20 % des élevages risquaient de manquer de stocks en fin d’été, rapporte Julien Rigaud, chef produit fourrages. Cependant, tous les ans, il y a structurellement 10 à 15 % des éleveurs dans cette situation à cause d’un mauvais calage du système fourrager par rapport aux besoins du cheptel. » Les 5 à 10 % supplémentaires manquant de réserve s’expliquent « par des rendements 2013 plus faibles en maïs à l’est des Côtes d’Armor et même dans le Morbihan », par le manque d’herbe là où il y a eu peu d’eau pendant la belle saison, « et bien sûr par des effectifs d’animaux à la hausse. »
Demande des laiteries, prix favorable, perspectives de l’après-quota… « En juillet, l’extraction de notre base de données donnait 63,5 vaches présentes et 98,5 UGB par troupeau, contre 59,6 et 93,1 un an plus tôt. » Et surtout, d’avril à juillet cette année, les cheptels ont continué à grandir quand, d’habitude, cette période est stable en nombre d’animaux. « Dans cette conjoncture porteuse, il y a nécessité de remettre à plat les systèmes fourragers pour la suite », met en garde Julien Rigaud. En attendant de rebattre les cartes de son assolement pour disposer à l’avenir d’un stock suffisant en adéquation avec son cheptel, l’urgence est de faire la jointure ces prochaines semaines. En dépannage, le détourage des parcelles est de mise. Julien Rigaud invite « évidemment à privilégier les plus avancées en maturité. Quitte à ensiler des maïs à moins de 30 % de matière sèche, autant choisir les plus secs possibles, cela fera moins de surface à récolter pour combler le déficit. » Ensuite, si les recommandations sont les mêmes que pour tout ensilage, « bien tasser, bien couvrir pour protéger de l’air, de l’eau et du soleil », le conseiller invite surtout à opter pour un tas « pas trop haut permettant un avancement rapide du front d’attaque. » Sans ça, trop d’air entre, « les fermentations aérobies sont privilégiées avec à la clé moisissures, fourrage qui chauffe et perte d’appétence à l’auge… »
L’ensilé vert, stock de l’année dernière
« L’ensilé en vert est à considérer comme stock de l’année dernière. Si on ensile 2 ha pour faire la soudure, il faut ensuite ensiler 2 ha de plus pour les réserves de l’année à venir. »
Attention au manque de cellulose
Jean-Félix Torchen rappelle aussi « l’importance d’apporter de la fibre en complément de ces maïs immatures : du foin, de l’ensilage d’herbe ou 500 g à 1 kg de paille par tête. On néglige souvent ce déficit en cellulose. Surtout quand à côté de ce maïs vert, les vaches broutent également une herbe tendre, par exemple des dérobées. » L’ajout d’une substance tampon est alors une assurance : « 200 à 250 g de bicarbonate par vache. D’autant que les animaux ont tendance à ingérer de gros volumes de ces ensilages verts non stabilisés et mal équilibrés. Le transit digestif est perturbé, le risque d’acidose réel », avance le conseiller nutrition. Dernière précaution : « Optez pour un hachage plus grossier de ce fourrage faible en matière sèche, 18 à 20 mm, surtout si la ration passe par une mélangeuse. » Toma Dagorn