Sa participation à un groupe d’éleveurs sur les coûts de production a permis à Jean-Yves Allain de dépister ses points faibles. Pour rendre ses UGB plus productifs, il réfléchit à des vêlages à 2 ans, des réformes plus rapides et une augmentation des croissances des JB.
En viande bovine comme dans les autres productions agricoles, « ce sont les prix qui font le revenu. Les producteurs et la filière doivent les défendre, notamment au travers des actions syndicales », souligne Jean-Yves Allain, producteur en système naisseur-engraisseur à Ploubezre dans les Côtes d’Armor. « Dans un second temps, pour dégager davantage de rentabilité ou pour passer les moments de crise, les producteurs peuvent agir sur les coûts de production. »
Mais pour identifier les leviers à actionner sur sa propre exploitation, savoir quels changements auront le plus d’impact, la première des étapes est de calculer ces coûts, de les détailler, les décrypter. C’est dans ce but que Jean-Yves Allain a participé à des sessions sur les coûts de production, en groupe d’éleveurs, animées par la Chambre d’agriculture. « Cela permet de se comparer, de discuter entre spécialistes, de se faire des contacts… J’ai pu définir des pistes de progrès en fonction de mes points faibles, des résultats que les autres producteurs de la zone parviennent à obtenir… »
Des parcelles dispersées, plus de rotations
Sur sa SAU de 70 ha, Jean-Yves Allain cultive 13 ha de maïs ensilage, 39 ha d’herbe dont 34 ha sont pâturés, et 18 ha de céréales (vendus sauf 2 ha gardés pour l’alimentation des JB). Les parcelles sont dispersées, seuls 7 ha sont accessibles autour des bâtiments. Le producteur emmène donc les troupeaux pâturer avec une bétaillère, profitant de ces mouvements pour les peser sur la bascule de la coopérative à proximité. « Du fait de cette dispersion, mes rotations sont sans doute plus régulières que chez d’autres éleveurs, ce qui me permet une meilleure maîtrise des engrais et phytos », note le producteur.
40 % de renouvellement
En race limousine, l’exploitation compte 55 vêlages/an. Toutes les génisses sont inséminées, avec un tri éventuel après vêlage, et tous les mâles sont engraissés. Le taux de renouvellement avoisine 40 %, ce qui n’est pas un problème, les femelles jeunes étant mieux valorisées en filière Label rouge. Bien situé en coûts fourragers et de concentrés, dans la moyenne en frais vétérinaires, l’éleveur souhaite améliorer son coût de production/100 kg de poids vif en essayant d’augmenter la productivité des animaux présents.
« Le nombre de veaux produits par vache est de 0,94. J’aimerais faire passer ce critère au-dessus de 1, en réformant plus rapidement en cas de veau mort. Cela suppose d’avoir des vaches en meilleur état au vêlage, mais pas trop pour ne pas pénaliser les naissances. Je vais par ailleurs donner davantage de minéraux aux vaches, du fait de problèmes de sorties de matrices… »
Evaluer son coût alimentaire
En élevage allaitant, l’alimentation fait partie des charges qui pèsent le plus sur le coût de production. Pour aider les producteurs et leurs conseillers à améliorer ce poste, les Chambres d’agriculture de Bretagne viennent de sortir un dossier avec des repères techniques et de coûts alimentaires. Deux systèmes sont différenciés, naisseur et naisseur-engraisseur. Le dossier propose des repères sur les besoins en stocks fourragers (dont maïs ensilage) et les quantités de concentrés nécessaires. Les stocks et les coûts sont également adaptés selon la zone (humide-froide, intermédiaire, séchante), selon la race (Charolaise, Limousine, Blonde d’Aquitaine) et selon la période de vêlage (printemps, hiver, automne). Le dossier complet version papier est vendu 20 € (contact : 02 96 79 21 63). Les producteurs peuvent télécharger gratuitement les fiches de synthèse à l’adresse internet suivante : www.bretagne.synagri.com/synagri/cout-alimentaire-en-vaches-allaitantes
Meilleure organisation du travail
Abritant les vaches et les génisses, un bâtiment (financé grâce à la mise en place de panneaux photovoltaïques) a été mis en service en 2010. « Alors que les vêlages avaient lieu en automne et au printemps, aujourd’hui, ils sont groupés à l’automne, de mi-septembre à fin novembre. Cela me permet de réaliser les IA et d’écorner les veaux en bâtiment. Au printemps, je peux plus facilement me consacrer aux cultures. » Pour progresser en génétique, le producteur ne fait plus que de l’IA.
Il va s’appuyer sur un autre critère pour améliorer la productivité des femelles, avec un projet de vêlage à 2 ans (2,5 à 3 ans actuellement). « Alors qu’avant, je privilégiais des taureaux d’IA typés viande, je tends aujourd’hui vers davantage de lait, pour assurer les croissances. Le pâturage va également être davantage surveillé (paddocks plus rapides, hauteurs d’entrée et de sortie…). Et avec des IA en hiver, je pourrai mieux soigner l’alimentation avant insémination. Par ailleurs, grâce au groupage des vêlages, les lots sont plus homogènes, ce qui va permettre des rations mieux adaptées. »
En jeunes bovins (JB) aussi, le rationnement va être affiné et densifié en énergie. « Le poids de carcasse est bon, à 460 kg en moyenne, mais je l’atteins à 21-23 mois. Mon objectif est de vendre des JB de même poids à 18 mois. » Pour disposer de fourrages plus énergétiques, le stockage d’herbe va davantage se faire sous forme d’ensilage, et moins de foin. « J’ai semé du trèfle violet pur sur 5 ha et je vais y ajouter 1,6 ha de luzerne. » Des ressources riches en protéines qui complètent à merveille le maïs ensilage et permettent de réduire les achats de tourteaux de colza. Dans un an ou deux, le producteur réalisera un nouveau calcul de son coût de production, pour observer l’évolution. Les changements techniques ou d’habitude demandent du temps… Agnès Cussonneau