Oublié l’élevage de porcs, trop sujet aux aléas sanitaires, Jean-Baptiste Ralaihosy élève désormais des poissons sur sa ferme maraîchère et rizicole de la province du Bongolava, au Centre-Ouest de Madagascar.
Commune d’Ambalaniro, fin octobre 2014. À l’ombre d’un jeune verger verdoyant, un groupe d’agriculteurs bretons tente de reconnaître les diverses essences présentes. « Orangers, citronniers, avocatiers ? ». Les avis divergent. Les fruits, en cette période printanière, sont encore immatures. Seules les mangues, déjà formées, révèlent rapidement l’identité de leur géniteur. La perplexité domine devant les pieds de litchi, les jacquiers ou les goyaviers. Quant à la différenciation des plants d’agrumes… Jean-Baptiste, propriétaire des lieux, sourit, indulgent, et délivre petit à petit ses secrets. Certaines essences conserveront leur identité malgache. Leurs fruits savoureux, trop rares ou difficiles à conserver, sont cantonnés aux étals locaux.
[caption id= »attachment_4925″ align= »aligncenter » width= »300″] Jean-Baptiste Ralaihosy.[/caption]
Gestion des eaux
Le verger bénéficie des eaux d’un barrage en amont, suffisant en saison des pluies, mais qui peine à irriguer la vallée en fin de période sèche. « Cette année est particulièrement aride. Le partage des eaux entre les différents riziculteurs est problématique. Certains n’hésitent pas à se lever la nuit pour détourner les canaux », confie le producteur. Le manque d’eau affecte non seulement les fruitiers mais aussi l’ensemble des 4 hectares de son exploitation. Les haricots ont souffert. Le riz a du retard. Rien n’est perdu pour l’agriculteur, couvé il y a quelques années par l’Afdi Bretagne et désormais l’un des leaders d’une organisation de producteurs qui regroupe 200 membres. Ses deux bassins piscicoles, asséchés pour le nettoyage, ont assuré une bonne production de carpes et de tilapias, vendus sur le marché et dans les restaurants locaux, vers la fin du mois de juin. Près d’une tonne de petits poissons, qui enrichissent en protéines une alimentation locale à base de riz. Les poissons sont nourris à l’aliment fermier, un mélange de maïs, de manioc et de soja, produits sur un hectare de l’exploitation. « J’achète des alevins et je les élève pendant 6 à 9 mois. Aujourd’hui, je maîtrise la technique ». Suffisamment pour évincer l’élevage de porcs, trop sujet aux épidémies de peste porcine africaine qui déciment régulièrement l’élevage malgache. La belle porcherie en semi-plein air n’abrite plus qu’un seul animal, destiné à l’autoconsommation.
Vol de zébus
Jean-Baptiste travaille avec trois salariés et s’entraide régulièrement avec son fils Jean-Claude, récemment installé sur une parcelle voisine. Avec leurs paires de zébus, ils ont préparé le sol, en vue des prochains semis. Des animaux qu’il faut choyer et surtout protéger contre le vol. Un véritable fléau dans cette région, pourtant éloignée de la côte, où les contrebandiers, avec la complicité d’autorités locales, les mènent en vue d’un transfert vers les Comores. Les agriculteurs dépouillés de leur force de travail ne sont pas rares. Certains investissent, seuls ou en groupe, dans des motoculteurs. Quand ils en ont les moyens…. Jean-Baptiste et sa famille viennent d’acheter un outil mécanique pour égrainer et vanner le riz. Fini le battage manuel. « Le gain de temps me permettra de me consacrer à d’autres tâches ».
Voyage découverte à Madagascar
L’Afdi Bretagne propose des voyages, en immersion, de deux semaines, aux agriculteurs, aux retraités et aux salariés du monde agricole dans la région de Tsiroanomandidy, au Centre Ouest du pays. « L’objectif, c’est la rencontre et les échanges », précise André Geffroy, ancien président de l’organisme. Les rencontres sont nombreuses, avec des groupes de paysans ou de paysannes, adhérents à l’Apdip, un groupement de 200 producteurs soutenu par l’Afdi Bretagne. Des rencontres sont également programmées avec des élus de communes qui bénéficient de partenariats avec des villes bretonnes. Si les pistes sont inconfortables, l’accueil à l’arrivée dans les villages est toujours chaleureux. Les repas et le logement sont assurés par les familles de paysans locaux.
Paysan formateur
Le paysan d’Ambalaniro n’est pas seulement l’un des piliers de son groupement de producteurs. Il est aussi l’un des dix formateurs accrédités par la structure. Il conseille ses collègues, d’autres villages, sur les techniques culturales, la pisciculture, la production de compost ou de purin végétal, pour fertiliser et protéger les cultures. Les engrais et les produits phytosanitaires sont chers et souvent mal utilisés. Produire n’est pas la seule problématique des paysans malgaches. La commercialisation est bien souvent un frein au développement de l’activité agricole. Les pistes calamiteuses, parfois impraticables à la saison des pluies, empêchent les livraisons des produits frais vers les villes. Certaines entreprises de collecte et de transformation de fruits et légumes n’hésitent pas à apporter des pierres aux maraîchers pour qu’ils aménagent eux-mêmes les pistes, palliant ainsi l’insuffisance des pouvoirs publics, incapables de construire et d’entretenir des routes goudronnées, pourtant essentielles à l’économie du pays… Bernard Laurent
Contact :
AFDI Bretagne – Tél. : 02 23 48 29 57 ou afdi.bretagne@maison-agri-rennes.fr