Le Pacte laitier, un guide pour mettre le cap sur l’après-quotas

pacte-laitier-loi-avenir-pac - Illustration Le Pacte laitier, un guide pour mettre le cap sur l’après-quotas

La semaine dernière, le Costarmoricain Hervé Moël, secrétaire général de la FRSEAO lait, s’exprimait sur l’érosion du prix annoncée pour début 2015. Il revient aujourd’hui sur les récentes actualités, le Pacte laitier notamment, mais aussi la Loi d’avenir et le 2nd pilier de la Pac.

L’après-quotas est le décor qui s’impose peu à peu dans les têtes. Mais simultanément, une chute du prix du lait point à l’horizon…

C’est vrai. Cependant la fin des quotas et la période de turbulences du marché à venir n’ont rien à voir. C’est deux choses dissociées qui tombent en même temps. En 2009, il y avait eu une crise mais pas de fin des quotas…

La grande majorité des producteurs de lait n’ont rien connu d’autre que la gestion administrée à la française de la production. Même si depuis 5 ou 6 ans, la réattribution des volumes s’est faite en fonction des dynamiques régionales, la Bretagne n’a même pas encore rattrapé le lait qu’elle produisait en 1983.  À la filière de se donner les moyens d’un vrai développement en s’appuyant sur cette petite révolution de 2015.

Qu’espérer du 2nd pilier de la Pac ?

La nouvelle Pac pénalisera les éleveurs laitiers de l’Ouest. Alors, en favorisant l’investissement, nous espérons récupérer grâce au 2nd pilier ce que nous avons perdu en aides directes (-10 à 15 % sur le 1er pilier). L’objectif est d’accompagner de manière plus importante les investisseurs productifs, les projets liés à de la production. Les plafonds de l’ancien Plan bâtiment, ou PMBE, seront certainement revalorisés à la hausse pour ce nouveau plan de modernisation. Pour cela, la réunion à la Région du 6 janvier sera déterminante.

Justement, à la FNPL, cette fin des quotas a été préparée à travers le Pacte laitier signé par Stéphane Le Foll le 26 novembre…

Même si les industriels laitiers (Fnil, FNCL) n’ont pas voulu participer, l’idée était de rassembler tous les acteurs – pouvoirs publics, banques, assureurs, Institut de l’élevage… – autour d’une table. Ce Pacte regroupe un ensemble d’engagements réciproques, même sans valeur juridique, définissant les grandes lignes pour l’après-quotas, avec en ligne de mire la performance économique, sociale et territoriale des exploitations.

Par exemple, la mise en place d’une gestion des aléas, via le cadre d’une « assurance fourrages », pour consolider le revenu dans un contexte de volatilité, a été discutée. Le Pacte parle aussi, avec BPIFrance, de revoir le système de garantie des emprunts pour que les jeunes, en particulier, et les investisseurs, en général, soient plus facilement soutenus et non pas presque intégrés par leur banque.

Le Cniel et le ministère ont également poussé pour un Observatoire des volumes géré entre autres par France Agrimer. Objectif : mieux anticiper, pour se préparer à une crise comme à une très forte demande. Il y a aussi le logo « lait collecté et conditionné en France » qui a été validé.

Et bien sûr, il est question de simplification administrative. Des jeunes abandonnent leur demande de subventions devant la complexité de la paperasse, ça doit changer. De même que, quelqu’un qui a un projet, une motivation et une laiterie prête (car le débouché sera la priorité) à le collecter doit pouvoir facilement l’orchestrer. Ce n’est pas le libéralisme à tout vent, mais l’idée que celui qui veut aller de l’avant puisse être bien accompagné.

Défense d’un juste prix du lait et Loi d’Avenir

La récente Loi d’avenir aborde bien sûr la question des contrats et de leur respect. C’est positif. Concrètement, elle donne le droit à des groupes de producteurs d’attaquer l’industriel qui ne respecte pas les engagements. Nos actions sous forme de manifestations devraient se déplacer à terme davantage sur le terrain juridique. Mais avant de pouvoir saisir la justice, cette Loi d’avenir doit préalablement être traduite par la signature d’un décret d’application. C’est ce que nous attendons. Plus globalement, nous, responsables syndicaux, voulons plus de transparence sur la mécanique de construction du prix du lait des coops et le respect du contrat-cadre chez les privés.

Une fois le costume syndical déposé, à titre plus personnel, comment vous projetez-vous dans cet après-quotas ?

Le Plan lait 2020 de la Chambre régionale d’agriculture a suscité des réactions dans les campagnes : il promet des exploitations en moyenne plus grandes, spécialisées avec de la main-d’œuvre salariée… Mais c’est finalement la continuité d’une tendance engagée depuis des décennies. J’ai le sentiment qu’actuellement, les laiteries restent un peu sur leur faim face à des projets de développements trop rares ou modestes par rapport à leurs attentes ou ambitions.

Pour ma part, demain, je me vois comme je suis là : co-gérant d’une entreprise familiale produisant 650 000 L de lait sur 103 ha à 3 associés. La stabulation est pleine. Il faudrait réinvestir dans l’étable, la fumière, la fosse pour accueillir plus de vaches. Les 20 ha de céréales seraient emblavés en maïs cassant la logique de notre rotation et posant des questions environnementales pour les surfaces en maïs sur maïs sur maïs…

Mais si des jeunes veulent nous rejoindre, je les encouragerai et alors, nous imaginerons peut-être un plan de développement. Le principal frein au renouvellement en lait est la traite, l’astreinte en général… Les jeunes ont besoin d’une garantie sociale pour se laisser séduire. Une des solutions restera bien sûr l’installation à plusieurs pour pouvoir se dégager du temps pour la vie privée. Propos recueillis par Toma Dagorn


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