Le manque de débouchés en volaille de chair augmente le temps de vide sanitaire entre deux lots. Il est important d’en mesurer l’impact sur la rentabilité de l’élevage et sur la trésorerie afin de piloter l’entreprise au plus juste.
Dans un contexte conjoncturel peu favorable, le manque de débouchés en viande de volaille allonge les temps de vide sanitaire. Ainsi, en 2013, ils atteignent une moyenne de 28 jours en dinde et de 21 jours en poulet contre respectivement 24 et 18 jours depuis la fin de la grippe aviaire en 2006. Or, si cette période de vide entre deux lots d’animaux est propice au lavage et à la désinfection du bâtiment, elle impacte aussi directement les résultats économiques de l’élevage. En effet, plus le vide sanitaire sera long, moins il y aura de lots élevés dans l’année. De ce fait, la productivité du bâtiment et les gains engendrés diminuent.
Indispensable calcul de l’EBE prévisionnel
La durée des vides sanitaires, tout comme le prix de l’aliment ou les critères de productivité liés à la directive bien-être en poulet, sont autant d’éléments contextuels sur lesquels l’éleveur ne peut agir. Pour en limiter les impacts économiques et financiers et déterminer des leviers d’actions auprès des banquiers, le calcul de l’EBE prévisionnel est indispensable. Il permet de mesurer le volume de trésorerie disponible pour faire face aux engagements. Cette prévision conditionne les choix de gestion, de financement et d’investissement de l’exploitation.
– 0,5 €/m2 par jour de vide
En poulet, 4 jours de vide sanitaire supplémentaires coûtent 2 €/m2 à l’éleveur soit 2 400 € pour un bâtiment de 1 200 m2. En dinde, l’impact est moindre grâce à une durée d’élevage plus longue. À défaut de pouvoir raccourcir les vides sanitaires, une des solutions pour optimiser au maximum le remplissage des bâtiments consiste à produire simultanément de la dinde et du poulet « en dérobé ». Pour cela, un lot de dindes est démarré en double densité dans un poulailler P1. Parallèlement, un lot de poulet est élevé dans un autre poulailler P2. Au départ des poulets, et après un vide sanitaire, l’éleveur desserre le lot de dindes du poulailler P1 vers le poulailler P2. Cependant, l’impact économique de la production d’un lot de poulets en « dérobé » est à étudier car elle entraîne des coûts de main-d’œuvre liés au desserrage des dindes et des frais vétérinaires liés à la double densité. Poulets, dindes ou production en « dérobé », une simulation économique basée sur la durée du vide sanitaire peut devenir un outil décisionnel utile pour maximiser ses marges brutes.
Lot de poulets ou de dindes ?
Prenons un cas concret et imaginons un éleveur de poulets et de dindes possédant deux poulaillers de 1 200 et 1 500 m2. Sa marge brute moyenne est de 28 €/m2 en poulet et de 27 €/m2 en dinde. Il abat ses poulets à 38 jours avec un vide sanitaire de 18 jours. Quant aux dindes, elles partent à 125 jours pour un vide sanitaire de 25 jours. À conjoncture constante, si le vide sanitaire augmente de 4 jours, la marge brute en poulet se dégrade de 6,7 % contre seulement 2,6 % en dinde. Si la durée de vide sanitaire est stable en dinde et s’allonge de plus de deux jours en poulet, l’éleveur aura tout intérêt à ne produire que de la dinde sous peine de voir sa marge brute en poulet chuter de 0,5 €/m2 chaque jour. Elle sera alors moins intéressante que la marge brute dégagée en dinde. Quant à la production de poulets « en dérobé », elle n’aura d’intérêt que si la durée du vide sanitaire en dinde augmente encore de quelques jours. Jean-Christophe Séité /Cogédis-Fidéor