L’Institut de l’élevage prévoit que d’ici 2020 les exploitations mixtes lait-viande, qui se sont développées pendant la période des quotas laitiers, devraient voir leur nombre reculer dans le Grand Ouest.
Il faut remonter trente ans en arrière, avant la mise en place des quotas laitiers en 1984, pour comprendre comment devrait évoluer le cheptel bovin français après 2015. Et regarder, comme nous y invite l’Institut de l’élevage dans une publication, intitulée Prévisions viande bovine en 2020, la période des quotas laitiers comme une parenthèse durant laquelle « le mouvement de spécialisation/concentration géographique de la production laitière, qui était en cours, il y a 30 ans » a été stoppé. Ce mouvement est en passe de reprendre avec la fin des quotas laitiers.
La mixité, fille des quotas laitiers
« La France a fait le choix d’une gestion très administrative des droits à produire, couplée à une restructuration rapide via les cessations laitières », synthétisent les auteurs de cette prospective. « Le lien au foncier a accroché le lait au territoire. Face à des croissances limitées de la production laitière, les éleveurs laitiers ont progressivement diversifié leur production, introduit des vaches allaitantes ou des bœufs ». Résultat, les exploitations laitières françaises d’aujourd’hui sont peu spécialisées, beaucoup moins que celles d’Europe du Nord par exemple. En 2013, 16 % des vaches allaitantes, soit 584 000 têtes, étaient détenues par des exploitations mixtes « lait viande ».
La spécialisation est de retour dans l’Ouest
Cette spécialisation des exploitations est de retour depuis 2013. L’effectif de vaches allaitantes en exploitations mixtes pourrait reculer de 50 000 têtes (-9 %) d’ici 2020. « Dans un contexte favorable au lait, expliquent les auteurs, les éleveurs mixtes disposent de marges de manœuvre pour développer la production laitière : réduire les effectifs de vaches allaitantes pour élever davantage de génisses tout en intensifiant la production fourragère ». Le phénomène s’annonce plus fort dans l’Ouest. « Il va y avoir une logique de re-spécialisation, à l’inverse de ce qui s’est passé à la mise en place des quotas laitiers, avec la création d’ateliers d’engraissement de jeunes bovins », expliquait Gérard You, lors des Journées de recherche sur les ruminants. Dans cinq ans, les Charolaises seront moins nombreuses dans les bocages de l’Ouest qu’elles ne le sont aujourd’hui.
Des limites à la re-spécialisation
Pour autant, le phénomène de spécialisation est à nuancer. Les ateliers viande garderont, par exemple, un intérêt dans les exploitations sociétaires, à plusieurs associés. La croissance laitière dans l’Ouest a d’autres limites, comme le manque de main-d’œuvre disponible, la meilleure résistance et robustesse économique des exploitations diversifiées, mais aussi la DPI (déduction fiscale pour investissement) facilement mobilisable grâce aux ateliers d’engraissement.