L’allongement de la saison de pâturage en hiver n’est pas préjudiciable à la production annuelle d’herbe et permet son étalement au printemps. À condition d’adapter le chargement.
Faire pâturer les bovins en hiver ne s’envisage pas comme une pleine saison d’herbe. L’hiver est en quelque sorte une 5e saison qu’il faut conduire différemment au risque d’hypothéquer le rendement de la future campagne.
Moitié de bonne herbe, moitié de mauvaise
En hiver, l’hétérogénéité des ressources fourragères (matériel vert de valeur alimentaire élevée et matériel sénescent) doit être prise en compte dans la conduite des troupeaux, rappelle l’Institut de l’élevage. Le fourrage de « mauvaise qualité », peut en effet atteindre plus de 50 % dans les parcelles où l’herbe s’est progressivement accumulée du printemps à l’automne en raison d’un pâturage pas suffisamment agressif. Reste que l’herbe sénescente sera d’autant plus consommée que les animaux ne peuvent pas faire le tri. Les mesures réalisées dans les fermes expérimentales confirment l’absence d’une production d’herbe importante au cours de l’hiver. Exemple de pousse mesurée à la station de Crécom, à Saint-Nicolas-du-Pélem (22) : environ 350 kg MS sur les mois de janvier et surtout de février.
Portance des sols et chargement
Un travail de suivi de parcelles utilisées pour l’hivernage de bovins allaitants en Pays-de-la-Loire et dans les Deux-Sèvres pendant 3 ans apporte quelques éléments de réponse quant aux effets du piétinement sur la production future. Il montre l’existence d’une relation entre le chargement hivernal exprimé en UGB-jour par hectare (voir encadré) et la dégradation des parcelles.
En conditions de sols portants, il faut dépasser 400 à 500 UGB-jour/ha pour observer une dégradation importante des parcelles, en dehors des secteurs d’abreuvement ou d’affouragement. En Irlande, des chercheurs ont observé une diminution de la production des prairies temporaires à partir d’un chargement 800 UGB-jour/ha maintenu pendant une durée de 3 mois (essai mené avec des brebis). Enfin, faut-il le rappeler : la conduite de bovins à besoins modérés en plein air pendant l’hiver n’a pas d’effet négatif sur les performances, sous réserve d’une disponibilité minimale en herbe.
Impact sur les pertes d’azote
Les mesures réalisées dans le cadre de dispositifs expérimentaux montrent que le pâturage hivernal n’augmente pas de manière significative les pertes d’azote par lessivage quand l’intensité du pâturage sur les parcelles utilisées reste inférieure à 600 UGB-jour/ha et d’autant moins que la période de restitution est proche de la reprise de végétation (décembre à févier). Les modalités d’affouragement sont susceptibles de modifier les résultats dans la mesure où elles vont favoriser ou non la répartition des déjections. Changer de place au râtelier permet de mieux répartir les déjections.
Économie de fourrage conservé
Dans le cas où des vaches allaitantes ne disposent que de l’herbe comme ressource alimentaire, l’allongement du pâturage en hiver permet de réaliser des économies substantielles de fourrages conservés, estimées à 500 kg MS/vache à la station bovine des Établières (Vendée) et de 670 kg MS à la station Inra de Laqueuille (Puy-de-Dôme).
Cependant, à Crécom, les vaches, qui disposaient de foin ou d’enrubannage à volonté, ont toujours eu des consommations en fourrages conservés équivalentes à celles conduites en bâtiment (8,7 kg MS/j), malgré des hauteurs d’herbe satisfaisantes à l’entrée des parcelles et une consommation d’herbe estimée à 2,5 kg MS/jour/vache. Didier Le Du