Face à l’ampleur de la crise que traverse depuis plusieurs mois la production porcine, le Crédit Mutuel de Bretagne lance des mesures de soutien aux éleveurs. Les explications de Jean-Pierre Le Tennier, Directeur général de l’établissement coopératif et mutualiste.
Le Crédit Mutuel de Bretagne a annoncé en début de semaine une série de mesures en faveur des éleveurs de porcs. De quoi s’agit-il ?
Depuis plusieurs semaines, nous suivons de très près l’évolution de la situation. Devant les trésoreries de plus en plus tendues rencontrées sur le terrain par nos spécialistes agricoles, nous avons estimé, en concertation avec les administrateurs de la Caisse de Bretagne de Crédit Mutuel Agricole (branche spécialisée du CMB), que le moment était venu de passer à une nouvelle étape dans l’accompagnement de nos sociétaires agriculteurs. C’est dans cette optique que nous avons conçu une « boîte à outils ». Il s’agit d’un ensemble de mesures pragmatiques – report d’échéances de crédits, ouverture de nouvelles lignes de trésorerie, avance sur placements… – qui, séparément ou en association, peuvent être mises en œuvre rapidement, afin d’aider à franchir ce cap difficile.
Pourquoi ne proposez-vous pas une mesure générale ?
Tout simplement parce que nous estimons que ce n’est pas la méthode la plus efficace. Si la crise frappe tous les éleveurs porcins, les besoins ne sont pas les mêmes pour tous. Prenons le cas d’un jeune agriculteur qui démarre et doit affronter la crise de plein fouet sans avoir eu le temps de se constituer la moindre trésorerie, sa situation n’est pas comparable avec celle d’un éleveur déjà bien installé et qui a fini de rembourser ses principaux investissements. Pour certains de simples reports d’échéances suffiront à passer le cap. Pour d’autres, il faudra ouvrir de nouvelles lignes de trésorerie ou mettre en place une avance sur placements. Et pour d’autres encore, il faudra combiner différentes formules. Ce n’est pas la première crise traversée par le monde agricole. Et l’expérience nous a montré que la meilleure façon de soutenir les producteurs était de leur offrir un accompagnement sur-mesure, basé sur l’étude des dossiers au cas par cas. C’est tout l’esprit de cette boîte à outils que nous mettons à disposition de nos partenaires agriculteurs.
Concrètement, que doit faire un agriculteur pour bénéficier de cette boîte à outils ?
Puisque notre approche est individualisée, la première chose à réaliser est de prendre contact avec son conseiller habituel du Crédit Mutuel de Bretagne. Et ce n’est qu’après une analyse détaillée de la situation que ce dernier sera à même de préconiser le recours à tel ou tel outil de la panoplie. Je le répète, je crois qu’il n’existe pas de panacée en la matière. En revanche, je suis convaincu de la pertinence du traitement au cas par cas que nous proposons. La méthode, je le répète, a fait ses preuves dans le passé.
La production porcine n’est la seule à connaître des difficultés actuellement…
C’est vrai. Le contexte est également délicat pour les éleveurs laitiers. De même que pour certains producteurs de volaille et de légumes. C’est d’ailleurs pourquoi nous n’avons pas mis de barrière à l’accès à notre dispositif qui est ouvert à l’ensemble de nos sociétaires agriculteurs.
Pourquoi prendre aujourd’hui de telles mesures de soutien ?
Pour plusieurs raisons. D’abord, parce que nous avons construit au fil des décennies une relation de confiance avec nos sociétaires agriculteurs. Nous revendiquons notre rôle de partenaire de la profession. Et un partenaire, c’est celui qui est à vos côtés dans les bons moments comme lors des périodes les plus délicates. Le Crédit Mutuel de Bretagne est issu du monde coopératif agricole et il ne l’oublie pas. Notre lien avec les producteurs est génétique, notre attachement à l’agriculture profond et durable. Ensuite, parce que, quelles que soient les difficultés actuelles, nous restons convaincus de l’avenir de l’agriculture bretonne et tout particulièrement de sa filière porcine. Il y a ici un savoir-faire et des outils qu’il n’est pas concevable d’abandonner en rase campagne. Enfin, parce qu’en tant que banque territoriale, nous estimons qu’il est de notre devoir d’accompagner et de soutenir les acteurs économiques de notre région. Et chacun sait que l’agriculture et, plus largement, le secteur de l’agro-alimentaire font partie des moteurs essentiels de la vie économique bretonne. Bien évidemment, nous ne prétendons pas à nous seuls résoudre la crise profonde qui touche la production porcine. Et il est clair que la seule issue durable passe par le rétablissement d’un prix du porc qui soit en rapport avec la réalité économique des exploitations et la fin des distorsions de concurrence qui existent au sein même de l’Europe. Mais, sans plus attendre, nous avons choisi d’assumer notre part d’effort. Toute notre part. Parce que cela correspond à notre conception du métier de banquier.