À Bubry (56), les chèvres angoras de Marie-Jeanne Francart produisent un mohair, transformé en pulls, en pantoufles ou en plaids, vendus sur les marchés artisanaux.
« Un coin de paradis ! ». Marie-Jeanne Francart a eu un coup de foudre, il y a cinq ans, pour la ferme de Canquisarel et ses vallons boisés de l’Ouest du Morbihan, entre Scorff et Blavet. « Un endroit idéal pour élever mes petites chèvres ». L’ancienne citadine, assistante dentaire, a quitté la fraîcheur de Compiègne pour la douceur bretonne. « Avec ma douzaine de chèvres et mon mari », plaisante-t-elle. Aujourd’hui, son troupeau compte une quarantaine de mères et s’agrandit au fil des saisons. Tous les chevreaux, mâles et femelles, sont conservés pour produire de la laine. La ferme commence à prendre l’allure d’une petite entreprise, à force de toisons collectées.
[caption id= »attachment_3326″ align= »aligncenter » width= »300″] La ferme de Canquisarel à Bubry (56)[/caption]
Au salon de l’agriculture
« Je suis tombée sous le charme des chèvres angoras à un salon de l’agriculture », explique Marie-Jeanne. « J’en ai acheté quelques-unes et le projet d’élevage s’est précisé ». Quelques années plus tard, la voilà propriétaire d’une quarantaine d’hectares de bois et de prairies, d’un seul tenant, à Bubry. Une surface suffisante pour nourrir son troupeau. Tous les soirs, les chèvres rentrent au bercail, une ancienne grange attenante à la maison d’habitation, en attendant la construction d’une véritable chèvrerie, dimensionnée pour une soixantaine de mères.
Les animaux ont une espérance de vie d’une dizaine d’années. Ils meurent de mort naturelle sur la ferme, même si, dans les dernières années, la qualité de leur toison est moindre. « Les chèvres angoras ne sont pas très laitières. Les plus âgées n’ont pas beaucoup de lait ; alors je biberonne régulièrement ». D’autant plus que les naissances gémellaires ne sont pas rares. Les petits mâles sont castrés et produisent également de la laine. Quelques mâles sélectionnés sont achetés pour assurer une diversité génétique et conserver un bon potentiel de production.
Les jeunes produisent le kid mohair
Les tontes ont lieu deux fois dans l’année, en février, avant les mises bas, pour que les petits puissent téter facilement et au mois d’août, quand les poils dépassent 5 centimètres. Chaque toison pèse entre 2 et 2,5 kilos. « Après chaque tonte, je procède au tri des toisons brutes en ôtant toutes les impuretés et en les classant par âge et par finesse. Il y a trois catégories de laine, en fonction de leur qualité. Le kid mohair, la meilleure, est prélevé sur les chevreaux, en première et deuxième tonte ». Ces fibres sont destinées à des vêtements portés à même la peau. Les fibres les plus gonflantes sont tissées en couvertures et en plaids. Enfin, une troisième catégorie est réservée à des produits souples et résistants.
Une chèvre originaire d’Anatolie
La chèvre Angora est originaire d’Asie Mineure (plateaux de l’Anatolie, au cœur de la province d’Angora). C’est un animal de petite taille : 60-65 cm au garrot, pesant à l’âge adulte 40 à 50 kg. L’utilisation du mohair remonte au 4e siècle av. J.C. Il est réservé à la confection des vêtements des sultans et des membres de la cour. La chèvre angora est introduite une première fois en France au 15e siècle et sa fibre est utilisée pour le tissage des linges liturgiques et des habits sacerdotaux. Mais les famines de l’époque auront raison d’elle. Elle reviendra en France dans les années 80 grâce à la volonté de quelques éleveurs pour être aujourd’hui à la base d’une véritable activité. La rusticité de la chèvre angora et le mode d’alimentation lui permettent d’exploiter des végétaux dédaignés par d’autres ruminants.
Un label de qualité
Le produit brut est expédié à l’usine de la Sica de Castres. Un échantillon de chaque lot est analysé par l’Institut Textile de France. Les poils y sont lavés, cardés, peignés, filés et teintés avec des pigments naturels. « Je récupère mes produits finis : des pulls, des écharpes tricotées et tissées, des chaussettes, des gants, des plaids, des couvertures, des châles et des ponchos ». Les grandes tendances de la mode sont définies par une styliste, mais chaque éleveur a le loisir de créer ses propres modèles, voire de les faire réaliser à la demande d’un client. La transformation des produits respecte un cahier des charges très précis pour obtenir le label qualité « le mohair des fermes de France ».
[caption id= »attachment_3325″ align= »aligncenter » width= »300″] Pulls, écharpes, gants et plaids dans un chalet à l’entrée de sa ferme[/caption]
Marie-Jeanne expose ses produits dans un petit chalet, à l’entrée de la ferme et les écoule sur les marchés artisanaux de la région, sur les marchés de Noël et sur les marchés hebdomadaires d’Hennebont et de Ploemeur. « J’ai fait un petit stock avant de commencer à vendre ». Son site internet « la laine mohair de marie » est visité. « Dimanche prochain, je rencontre une cliente au marché de Ploemeur pour lui montrer un pull qu’elle a vu sur le site ». Avec l’espoir d’une belle vente. Bernard Laurent
Contact : www.lainemohairdemarie.fr