Le made in Breizh attire la Chine

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Les efforts fournis par les producteurs bretons font gagner le pari d’une agriculture moderne alliant productivité et enjeux environnementaux. Les Chinois l’ont bien compris et choisissent notre région comme partenaire commercial.

Le géant Chinois lorgne de plus en plus vers l’Ouest pour son approvisionnement en produits alimentaires. Suite à différents scandales sur sa propre production, le consommateur asiatique n’a plus confiance en ses producteurs et préfère même les denrées en provenance d’autres pays mondiaux. « La consommation de lait à été multipliée par 13 entre 1980 et 2009 en Chine. Il n’y a pas plus de gens qui ont faim en Chine qu’en France, mais les affaires concernant le lait à la mélanine ou le porc au clenbutérol affolent la population », rappelle Alain Bonjean, de chez Limagrain France, qui a dirigé Limagrain Chine pendant 13 ans. En Bretagne, on n’a pas de pétrole, mais on a du lait, et ce lait va bientôt alimenter des millions de petits Chinois.

Pour comprendre l’engouement récent de la Chine envers notre région, il faut s’immerger dans la culture de l’empire du Milieu. « L’espace rural se vide depuis 35 ans, suite à des possibilités permises par l’État, qui autorise des déplacements entre provinces. Cette forte migration de populations va faire tripler la classe moyenne pour passer à 800 millions d’urbains en 2030, soit 3 fois plus qu’aux États-Unis. 20 % des terres sont touchées par la pollution, et 70 % des eaux sont impropres à la consommation. Sur les 135 millions d’hectares de terre arables disponibles à ce jour, la Chine va essayer d’en conserver 120 millions, la différence étant perdue au bénéfice de l’urbanisation. Difficile dans ce contexte de ne pas avoir envie de prendre part à ce marché prometteur », poursuit le responsable.

Mégalopoles de 50 millions d’habitants

L’augmentation de la population urbaine, avec la fin de la politique de l’enfant unique set une bonne nouvelle pour les producteurs de lait bretons. « Le boom de la consommation future est largement devant nous. Attention toutefois à ne pas se tromper de stratégie, car nous ne pourrons jamais nous battre sur le volume, mais  uniquement sur la qualité. Les producteurs chinois ont fait des progrès considérables techniquement, et font 34 fois plus de lait en 2013 qu’en 1949. L’exode rural laisse des surfaces disponibles à l’agrandissement des zones de productions, et le gouvernement souhaite renforcer sa stratégie agroalimentaire, en fermant des PME obsolètes et en développant des industries agro-alimentaires modernes. Pas de frilosité dans les projets du gouvernement : les décisions sont rapidement prises et exécutées, comme en témoignent les 135 aéroports construits sur le territoire l’année dernière », souligne Alain Bonjean. Il conseille de ne pas se fixer sur tout le territoire chinois pour un développement à l’export : par exemple « La province de Canton représente l’équivalent du marché espagnol ».

Réglementation des activités

Inutile d’essayer de percer sur les marchés de la pharmacopée, des jeux d’argent ou de la fabrication d’armes avec la Chine, c’est interdit par la réglementation, qui restreint ou encourage d’autres secteurs d’activité. « Il nous faut exporter un produit correspondant à une demande précise comme les abats de porc, ou apporter un service correspondant à la demande, comme pour les poudres de lait infantiles », estime l’ancien résident chinois.

Peu propice à la production en masse de lait, avec des contraintes territoriales ou culturelles, la Chine produit 36 millions de litres de lait de vache. Les productions végétales, principalement destinées à l’alimentation humaine, puis à la volaille ou aux porcs sont faiblement distribuées aux vaches, qui se nourrissent parfois de cannes de maïs ensilés, faibles en énergie. « 50 % des poudres de lait sont importées, et 77 % des acheteurs chinois en ont une pleine confiance. Les 280 millions de litres de lait collectés chez 800 producteurs bretons alimenteront notre outil industriel, entièrement dédié à l’export vers la Chine », ajoute Patrick Bischofberger, responsable approvisionnement lait chez Synutra. Ravitaillé par la Sodiaal, l’outil industriel « sera capable de fabriquer ses propres boîtes pour apporter une traçabilité irréprochable. Entièrement visitable, l’usine sera une formidable vitrine de notre savoir-faire local », ajoute François Musellec, directeur industriel de Synutra. Pas d’intégration de producteur à Synutra, qui souhaite travailler dans la durée avec la coopérative.

Fanch Paranthoën

L’avis de Christian Troadec, Maire de Carhaix

Pour faire venir des investisseurs, il faut continuer à être attractif. Une des conditions indispensables pour accueillir ce type de projet reste la capacité à avoir des réserves foncières : la Communauté de communes disposait d’un site de 20 hectares. La production des agriculteurs aurait pu transiter par camion, mais la situation centrale de Carhaix met à disposition 300 millions de litres de lait pour l’outil industriel. Sans ces atouts, le site aurait peut-être été construit en Nouvelle-Zélande…


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