Être numéro 1 mondial de la télémédecine. C’est l’ambition de Christian Guillemot, co-dirigeant d’Ubisoft, pour son entreprise, à la pointe du numérique. Il participait à un débat lors de l’assemblée générale du Cerfrance Brocéliande.
Les fils de l’ancien négociant de Carentoir ont eu une idée de génie, en 1986, en abandonnant le négoce agricole pour se lancer dans la distribution puis la création de jeux vidéo. Une croissance phénoménale qui les a conduits parmi les plus grands éditeurs indépendants au monde. Le principal développeur en Europe, à qui l’on doit « Les lapins crétins » ou « Rayman », se lance aujourd’hui dans la télémédecine avec ses lunettes connectées. « Les lunettes ne conviennent pas aux jeux vidéo. Nous nous sommes orientés vers les applications métiers et notamment vers la médecine ». La première opération chirurgicale au monde avec de tels outils a eu lieu récemment à Rennes. « Elle a été réalisée par un chirurgien équipé de Google Glass suivie en direct par des Japonais. Avec cette application médicale, il y aura des avancées dans le domaine des urgences, du traitement des AVC, des plaies chroniques ou des problèmes cardiaques des enfants », prédit Christian Guillemot. « Notre ambition est de devenir le numéro 1 mondial dans ce domaine d’activité et de le rester ».
Bien placés pour la 2e vague du numérique
Le groupe Ubisoft compte désormais 5 sociétés dirigées par les 5 frères Guillemot, de manière relativement indépendante. « Nous avons une règle », confie-t-il : « Quand, le groupe est en difficulté, nous sommes tous solidaires. Quand tout va bien, nous sommes en compétition entre nous ». Le groupe compte 20 000 salariés dans le monde dont 5 % en Bretagne et 20 % en France. « Je suis optimiste. Beaucoup de métiers vont disparaître, mais d’autres, bien plus nombreux, vont apparaître grâce au numérique. La France, même si elle a raté la première vague, semble avoir compris la révolution qui s’opère ». Dommage que les talents s’en aillent à l’étranger, encouragés par leur entourage et par leurs professeurs. « C’est ancré dans l’esprit collectif en Bretagne. La réussite sociale des jeunes, pour les parents et les grands-parents, est liée à la distance entre leur domicile familial et leur lieu de travail. New York, c’est bien ; la Californie, c’est super, Shangaï, c’est le top ».
CERFrance Brocéliande en quelques chiffres
- 13 000 entreprises clientes
- 8 000 agricoles
- 4 000 artisans commerçants
- 300 mer
- 700 salariés
- 42 millions de chiffres d’affaires
- 64 % du marché agricole
- 80 % du marché de la mer
- 6 % du marché artisans commerçants
La fibre pour garder les jeunes en Bretagne
La réussite d’AMA, la filiale qui se consacre à la télémédecine, comme celle du groupe Ubisoft, suscite des convoitises. À Philippe Dessertine, directeur de l’Institut de hautes finances, qui considère la taille et l’appétit gigantesque des entreprises américaines du numérique comme un éventuel danger, il répond :« Une entreprise, ce n’est pas que de la finance. Nous ne sommes pas à vendre. Le métier est complexe et nous avons une longueur d’avance ». Dans l’immédiat, le patron d’AMA milite pour l’installation rapide de la fibre optique en Bretagne. Il en va de l’activité économique de la région. « Dans cinq ans, un tiers des emplois seront dans le numérique. Nous devons garder nos jeunes talents. Pour cela, la fibre est indispensable ». Bernard Laurent