Créer un nouveau bâtiment agricole en zone littorale est un vrai parcours du combattant. Retour sur l’expérience du Gaec Palluel, à Roz-sur-Couesnon.
Après avoir passé au moins la moitié de leur vie- soit 70 jours – sur les herbus, les premiers agneaux qui respectent le cahier des charges de l’appellation d’origine protégée (AOP) « Prés-salés du Mont-Saint-Michel » viennent d’être triés. Ils accueillaient les 13 producteurs, nombreux membres de la filière (abatteurs, distributeurs) et les élus locaux venus inaugurer la nouvelle bergerie de Pascal et Guylaine Frain, du Gaec Palluel, à Roz-sur-Couesnon, lors de l’assemblée générale de l’organisme de défense et de gestion (ODG) de l’appellation, à l’issue de la première année d’activité de l’AOP.
Diminuer le travail d’astreinte
« Ce bâtiment permet de loger 500 brebis cinq mois dans l’année », explique Pascal Frain. Il remplace une ancienne stabulation vache laitière, qui n’était pas fonctionnelle. Un couloir d’alimentation a remplacé la distribution dans des râteliers à l’extérieur du bâtiment. Le couloir central permet de pailler les lots sans avoir besoin de sortir les brebis dans un parc adjacent… « Si le nouvel environnement a permis de limiter les pertes d’agneaux, c’est surtout au niveau des conditions de travail qu’on ressent les bienfaits de ce bâtiment : j’ai divisé par deux la durée quotidienne de soins aux animaux », décrit l’éleveur. Aujourd’hui, en ¼ d’heure, la distribution du grain aux 500 brebis est faite. Et en moins d’une heure, en période hivernale, l’alimentation, la distribution du foin et le paillage sont assurés.
La loi du Littoral, un frein au développement agricole
« Les travaux engagés au Gaec du Palluel sont un bon exemple de l’amélioration des conditions de travail nécessaire pour maintenir la production d’ovin », insiste Franck Mérel, élu à la Chambre d’agriculture, en charge du dossier ovin/caprin. Et la simplification administrative demandée par la profession doit permettre d’y arriver. Mais la réalité est différente. Si l’activité économique requiert de la réactivité dans la prise de décision pour répondre aux marchés, il n’en est pas de même pour les délais d’instruction. « Nous avons travaillé 1,5 an sur ce dossier en zone classée pour instruire le permis de construire », se remémore Christophe Fambon, maire de Roz-sur-Couesnon. Carole David
L’avis de Yannick Frain, président de l’AOP
La pérennité de l’AOP « Prés-Salés du Mont-Saint-Michel » passera aussi par l’installation. Les herbus ont la capacité d’accueillir de nouveaux troupeaux ovins. Leur présence est nécessaire, voire primordiale pour entretenir les herbus, entre autres contre la prolifération du chiendent et le maintien de la biodiversité des espèces sur le littoral, pour éviter de fermer les territoires. La demande de nos produits de qualité est réelle : aujourd’hui, le site protégé et la loi du Littoral nous obligent à rester hors-norme, par le refus de créer de nouveaux bâtiments ou d’améliorer nos conditions de travail. De part et d’autre du Couesnon, en Bretagne ou en Basse-Normandie, nous luttons tous les jours contre l’accumulation des contraintes administratives qui mettent en péril le maintien et le développement de nos activités…