En agriculture, l’offre ne s’ajuste pas à la demande

FRSEA-beulin-coue-carles - Illustration En agriculture, l’offre ne s’ajuste pas à la demande
Xavier Beulin, président de la FNSEA, Thierry Coué, président de la FRSEA, et jacques Carles, délégué général du « think tank pour laboratoire d’idées » Momagri.

La volatilité et sa gestion étaient au cœur de l’Assemblée générale de la FRSEA. L’invité Jacques Carles de Momagri a notamment expliqué que « pour lisser la volatilité, il faut avant tout un système d’intervention publique efficace ».

Drôle de hasard du calendrier… Au lendemain de la Nuit de la détresse et ses 2 000 manifestants en Bretagne, la FRSEA tenait son assemblée générale à Rennes.

« Toutes ces normes valent un prix »

« Une nuit qui a été très, très calme comparée à la détresse sur le terrain. L’heure est grave : les agriculteurs réclament que l’agriculture redevienne une véritable activité économique… », a débuté le président Thierry Coué à la tribune. « Ils réclament moins de normes et plus de prix. Car toutes ces normes qu’on nous impose valent un prix. Prix que les organisations économiques doivent arriver à arracher. » Une situation critique (fonte des trésoreries, endettement, faillite, suicides…), toutes filières confondues, que résume Xavier Beulin, président de la FNSEA : « On n’est plus en crise aujourd’hui, on est bien au-delà ».

En cause : la volatilité des marchés qui brise les exploitations et la distribution « qui se contente de mettre en concurrence ses fournisseurs avant de prendre le moins cher », souligne Philippe de Guénin, directeur de la Draaf. Les producteurs encaissent la volatilité, « mais en France, on refuse toute volatilité en aval », a poursuivi Xavier Beulin. « Le prix au consommateur doit être « flat ». Nous sommes le seul pays où le prix des produits laitiers reste stable dans les rayons, quand ailleurs il y a une forte corrélation entre marché du lait et tarifs dans les étals… » Une volatilité d’autant plus néfaste « qu’on a complètement libéré le système, sans plus aucun filet de sécurité », estime Thierry Coué, à propos du démantèlement des outils de régulation.

Demain, une volatilité encore plus extrême

Dans le contecte, la FRSEA s’interroge : « Face à la volatilité, quelles solutions pour ne pas subir ? » Invité pour apporter de l’eau à ce moulin, Jacques Carles est délégué général de Momagri : « Nous sommes un laboratoire d’idées sur l’organisation mondiale de l’agriculture à destination des décideurs. » L’équipe mène une réflexion sur la régulation des marchés et a déjà fourni à la Commission européenne des propositions pour la révision à mi-mandat de la Pac.
« Depuis les années 2000, le prix du lait subit une volatilité de plus en plus fréquente avec une amplitude de plus en plus grande. Elle s’est aussi renforcée pour le maïs et le soja », illustre Jacques Carles. À l’avenir, « elle sera encore plus extrême. Une volatilité des prix dont fait totalement fi la Pac actuelle. Il faut donc développer modèles et indicateurs pour l’intégrer. » Car, à l’idée que l’offre s’ajuste toujours à la demande, le spécialiste martèle au contraire « qu’en agriculture l’offre ne s’ajuste pas du tout à la demande. »

Seul pays où le prix des produits laitiers reste stable dans les rayons.

Jacques Carles rappelle que « pour lisser la volatilité, il faut avant tout un système d’intervention publique efficace. Sans ces, aucune contractualisation ne pourra rééquilibrer un marché où existe un problème de coût de revient. »

Momagri pense à un modèle contracyclique où les périodes porteuses alimenteraient un fonds de réserve redistribué quand le marché est très déprimé. « On définit un prix d’équilibre situé dans un tunnel où il n’y a pas d’intervention publique tant que la volatilité est contenue. Quand cette dernière devient extrême, intervention et stockages publiques se mettent en place… Par exemple, en lait, nous avons calculé un prix d’équilibre à 370 € / 1 000 L. En dessous de 350 €, les paiements contracycli-ques seraient activés. » Actuellement, Momagri mène des simulations sur des exploitations de la Marne : « Notre système assure un revenu équivalent sur la durée : sur 2007-2013, les laitiers auraient touché 369 € / 1 000 L au lieu des 386 € constatés avec un revenu plus stable et une économie sur le budget de la Pac… » Toma Dagorn


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