La fin des quotas laitiers marque l’année 2015. La filière laitière compte d’autres évolutions majeures : la mondialisation, la baisse des politiques d’intervention et la volatilité des prix. Des opportunités se dégagent dans cet univers en mutation.
Il n’y a pas de modèle unique. Les stratégies sont nombreuses. L’exploitant doit choisir la meilleure alliance de compétences pour réussir dans le système qui est le sien. Jeudi 17 septembre, lors du Space, CerFrance menait une conférence sur le thème : « Nouvelles donnes en production laitière, quelles stratégies pour mon entreprise ? » CerFrance a donné la parole à 3 agriculteurs : Marc Lechat, en Manche, Stéphane Charrier, en Ille-et-Vilaine et Hervé Radenac, en Morbihan.
S’organiser et échanger
Marc Lechat, en Gaec avec son frère et deux salariés, dispose d’une SAU de 81 hectares pour deux exploitations principales : un atelier laitier faisant 530 000 litres de lait avec 55 vaches et un atelier porc de 250 truies naisseur-engraisseur. Pour l’éleveur, « outre les ruptures de la régulation et de la dé-régularisation, je me suis installé, les quotas venaient de naître, je sens une pression continuelle sur l’efficacité à opérer et à travailler ».
Pour autant, une condition fixée il y a 25 ans entre son frère et lui n’a pas changé : l’organisation des week-ends, des congés et des horaires sur la journée. Il insiste sur la nécessité de travailler sur l’organisation du travail : maintien d’une jauge, échanges avec ses pairs de bonnes idées, les bons procédés, la motivation… Il participe à des groupes de travail depuis 2006 répondant à ce besoin d’échanges. Que ce soit dans des groupes de travail ou des Cuma, la transparence est de mise, mais également la confidentialité.
Tenir une stratégie financière
Hervé Radenac, en EARL, dispose d’une SAU de 63 hectares pour une production de 385 000 litres de lait en contrat avec Lactalis. Avant d’exercer le métier de ses rêves, il a « traîné ses basques » quelques années en tant que technico-commercial dans l’aliment pour le bétail. « Cela m’a permis de voir un échantillon très vaste de la population d’éleveurs laitiers ». Il pointe un élément trop souvent oublié et pourtant essentiel : il est très important pour un exploitant d’inclure à sa stratégie que son travail doit lui apporter un salaire tout de suite. Cette gestion de la trésorerie est nécessaire et ne doit pas être mise de côté. « La stratégie financière doit permettre de faire face aux contraintes de prêts, mais également aux exploitants de vivre », souligne-t-il. Ces 2 éleveurs qui témoignent se rejoignent sur leur volonté de ne pas mélanger vie professionnelle et vie privée ou de ne pas sacrifier cette dernière. Une volonté qui s’est répercutée sur la construction de leur stratégie d’entreprise. Ainsi, ils ont choisi de faire appel aux Cuma afin de déléguer une partie du travail.
Gagner en autonomie alimentaire
Stéphane Charrier, en EARL avec un salarié, dispose d’une SAU de 80 hectares pour une production de lait de 750 000 litres de lait. Lui aussi met en avant la nécessité de s’octroyer du temps personnel et n’hésite pas à se faire remplacer pour un week-end ou des vacances en faisant appel à d’anciens stagiaires. Son objectif est d’avoir un prix d’équilibre autour des 320 – 330 €. Pour l’atteindre, il a analysé tous ses moyens de production et choisi de saturer son bâtiment laitier. « Je fais partie d’un groupe de réflexion sur l’autonomie protéique ». Au regard de son sol, il développe la luzerne « pour gratter en autonomie alimentaire » et ainsi moins subir la volatilité.
CerFrance a finalisé en pointant le rôle important de la gestion du relationnel humain dans la stratégie d’entreprise. La qualité des relations a un impact direct ou indirect sur les résultats techniques et économiques. Être capable de se remettre en question, se fixer ensemble des objectifs, avoir le même niveau d’information au même moment, être préparé à discuter… Des éléments clés à prendre en compte. Pauline Le Palud/CerFrance Ille -et-Vilaine.