Pour la Confédération Paysanne, l’idée selon laquelle la compétitivité passerait automatiquement par l’investissement est un leurre. Au contraire, cette politique mène au surendettement et condamne les paysans.
Les solutions préconisées par les pouvoirs publics ou par le syndicat majoritaire pour sortir de la crise ne satisfont pas les responsables de la Confédération Paysanne. « Le plan d’urgence établi par le ministère de l’Agriculture définit des mesurettes et ne remet aucunement en cause un modèle qui condamne les paysans depuis de nombreuses années ». Tout le monde en prend pour son grade.
De l’Union européenne aux Chambres d’agriculture, en passant par les agriculteurs eux-mêmes. « En supprimant les moyens de régulation des productions, l’Europe mise sur l’exportation. Mais, on le voit, dès que la Chine tousse, le modèle s’écroule. L’embargo russe avait également révélé les failles de ce système. Nous demandons, au contraire, l’arrêt immédiat des négociations des accords de libre échange, la mise en place d’une solidarité européenne avec une harmonisation sociale et fiscale entre pays européens ». Les solutions de Stéphane Le Foll ne répondent pas aux enjeux, selon eux. « À un problème de prix rémunérateurs en élevage, le ministre répond par des prix garantis de l’énergie, via la méthanisation.
Les trois milliards annoncés n’iront pas dans la poche des agriculteurs mais dans celles de leurs “partenaires” ». La FNSEA est accusée de manque de cohérence. « Elle prône le “manger français” et dans le même temps, réclame des aides pour exporter avec des conséquences néfastes pour des agriculteurs d’autres pays ». Le syndicat fustige la demande de moratoire sur les normes environnementales, qualifiée de demande de droit à polluer. « Nos concitoyens ne peuvent pas comprendre ». Les Chambres d’agriculture sont accusées de pousser les jeunes vers des difficultés financières. « Elle valide des projets à l’installation basés sur des hypothèses de prix fantaisistes. Elle prône un recours à la technologie (robots, drones…) dont la rentabilité est douteuse. Et quand les crises surviennent…. ». Le syndicat reproche enfin aux agriculteurs d’avoir abandonné deux leviers de prises de décision : la gestion des coopératives et la commercialisation des produits.
Argent public mal utilisé
Alors, que proposent les responsables du syndicat ? « Soyez raisonnables », conseillent-ils, en premier lieu, à leurs collègues. Dans leurs manières de gérer leurs fermes et aussi dans leurs façons de revendiquer. Le syndicat condamne les défilés avec des matériels « qui coûtent quasiment autant que des maisons individuelles de nos concitoyens ». Ils dénoncent la course au surinvestissement et prônent la maîtrise des coûts de production en étant « économes et le plus autonomes possible ». Ils réclament aux instances dirigeantes un meilleur usage de l’argent public. « Cet argent devrait soutenir les filières de production de qualité, créatrices de valeur ajoutée, ou la recherche sur l’autonomie en protéines, par exemple ». Le syndicat demande des prix sécurisés, au-dessus des coûts de production, grâce à une régulation européenne des marchés agricoles, la relocalisation des échanges, ou encore, l’adaptation de la production à la consommation locale. Bernard Laurent