L’agence de l’eau Loire-Bretagne a remis le trophée « préservation des ressources en eau » au bassin versant de l’Aber-Wrac’h, le 1er octobre dernier, à Orléans (45). Une reconnaissance des travaux effectués par tous les acteurs du territoire, mais qui laisse quand même un goût amer.
Depuis cet été, le bassin versant de l’Aber-Wrac’h n’est plus concerné par le contentieux qui l’oppose à l’Europe. La qualité de l’eau, descendue en dessous du seuil fatidique de 50 mg de nitrate par litre d’eau dès 2011, permet à ce territoire dynamique au niveau agricole de voir plus sereinement son avenir. Concourant dans la catégorie préservation des ressources en eau, le territoire finistérien a été récompensé pour ses actions en faveur d’une diminution de la teneur en nitrate de sa rivière. « C’est l’aboutissement d’une concertation avec la profession, qui vient saluer le travail de plusieurs années, notamment d’une constance apportée par les agriculteurs », estime Marguerite Lamour, présidente du syndicat mixte du Bas-Léon. « Les résultats sont plus longs à venir en sol granitique, comme sur ce bassin versant. Il faut compter une dizaine d’années pour mesurer les effets de nos actions. Ce délai peut être moins important dans des sols schisteux, comme dans les Côtes d’Armor », précise François Plougastel, producteur de lait à Ploudaniel (29).
Juste récompense
Les teneurs en nitrate des eaux de l’Aber-Wrach ont diminué drastiquement ces dernières années. « Entre 1995 et 2015, nous sommes passés d’une teneur de 70 à 35 mg/L, grâce à des couverts végétaux, des bandes enherbées ou des stations de traitement sur nos exploitations. C’est une reconnaissance tardive. La réglementation a cassé le dynamisme de la région, qui installait beaucoup de jeunes : les élevages de porcs ont diminué de 33 %, ceux de bovin de 18 %. La moyenne d’arrêt d’exploitation de la région de l’Aber-Wrac’h est supérieure de 10 % à d’autres bassins, ce qui a engendré la destruction de 250 emplois », regrette François Plougastel, éleveur qui s’est attaché à défendre le dossier pour sortir du contentieux. Des conséquences visibles également sur les résultats techniques. « Avec 30 % de droit à fertiliser en moins, le déficit en protéine de nos aliments d’élevage nous a conduits à acheter plus de soja, importé naturellement… », pense Michel Tanné, producteur de lait et de porcs à Ploudaniel (29).
L’arrêté stipulant la fin du contentieux entre le bassin versant et l’Europe est écrit, « mais n’a toujours pas été transmis aux agriculteurs. Dans tous les cas, il n’y aura pas de changement drastique dans les systèmes de production des exploitations. La gestion des effluents se fera avec l’aide des structures et des conseillers terrain du syndicat du Bas Léon », explique l’éleveur, qui avoue que ce trophée est « pris comme une reconnaissance, mais nous aurions préféré nous en passer ».
Fanch Paranthoën