Selon Michel Rieu, économiste à l’Ifip, la crise qui affecte la filière porc est « révélatrice d’évolutions structurelles. »
Pour l’économiste de l’Ifip, Michel Rieu, la situation dans laquelle se retrouve le marché du porc français est, au-delà « d’un débat de personnes ou d’entreprises », révélatrice d’« évolutions structurelles ». Selon son analyse, la logique « horizontale » que représente le cadran du porc, qui fixe un même prix de base pour tous, perd du terrain sur la logique « verticale », représentée par exemple par la Cooperl, où la répartition de la valeur se fixe entre différents maillons d’une même entreprise. Deux raisons à ce mouvement selon lui.
Plus d’intégration par l’aval
D’abord, la part de « la filière coordonnée verticalement » augmente dans le paysage porcin ; les regroupements verticaux, qu’il s’agisse de coopératives intégrant de l’abattage comme la Cooperl ou Fipso dans le Sud-Ouest, ou d’outils d’abattage repris par la grande distribution comme Kermené et JPA, prennent de plus en plus de place. Deuxième raison : le marché de la carcasse de porc n’est plus central ; la proportion des porcs « qui ont la possibilité d’aller dans n’importe quel abattoir », autrement dit la taille du marché « libre » des carcasses de porc a diminué. Pour Michel Rieu, « le marché le plus important où il y a une confrontation régionale, c’est le marché des pièces ». Ainsi, ce serait désormais sur le marché des pièces, sans cotation transparente aujourd’hui, que se construirait le prix de la carcasse de porc, devenu, selon lui, « secondaire » dans la filière. Mais le cadran a des vertus, estime Michel Rieu : « L’avantage du Marché du porc breton (MPB), c’est sa transparence, source de pratiques marchandes loyales. C’est un lieu public où toutes les règles sont connues : les grilles de paiements, les délais de paiement… Il n’y a pas de surprise », explique-t-il.
Faire le poids face aux acheteurs
Ainsi, sa disparition constitue un vrai risque pour une partie des éleveurs et des groupements, les moins armés face aux acheteurs. Dans une note parue sur son site internet le 12 octobre, le groupement Porélia alertait ses éleveurs : « Le comportement de certains patrons d’abattoirs, ces derniers jours, donne un avant-goût de ce qu’ils veulent et ce qui nous attend : des règles maisons (prix, classement, génétique, aliment…) et des délais de paiement à rallonge (de 15 jours à 4 mois…). Tous les risques à l’éleveur et les profits à l’aval. »