Avec une nouvelle installation de traite sur deux, le robot séduit de plus en plus d’éleveurs. Les vaches apprivoisent rapidement « la bête ». Qu’en est-il des éleveurs ?
« Je passe autant de temps avec les vaches, mais je suis beaucoup plus libre ». Le témoignage de David Rouxel, éleveur à Saint-Vincent-sur-Oust (56), lors de la conférence « Stratégie rentabilité en traite robotisée », organisée par Triskalia au Space, reflète un sentiment souvent partagé par les éleveurs équipés de robot. Cette notion de temps choisi séduit les agriculteurs qui ne veulent plus vivre en marge de la société et qui privilégient la vie de famille.
Fluidité de circulation à l’étable
Florian Couchet, consultant robotique à Farm Dairy Service (FDS), ne partage pas tout à fait ce calcul du temps de main-d’œuvre. « Si l’éleveur exploite bien son système de traite robotisée, il peut gagner 2 mn/VL/j ou 2 heures pour un troupeau de 60 vaches », calibre-t-il. À condition de « bâtir son système autour de la circulation naturelle des animaux. Ce qui suppose de tenir compte en priorité des 6 libertés recherchées par une vache dans son espace naturel : nourriture, eau, air frais, tranquillité, confort, propreté ». Cet observateur du comportement animal estime qu’un troupeau bien dans sa peau influence favorablement la fluidité de circulation dans une stabulation robotisée.
En clair, il ne suffit pas que le bâtiment soit bien pensé, il faut que les animaux soient en forme. Il met à cet effet l’accent sur la santé des vaches. « Une laitière ne se déplacera pas avec entrain si elle n’est pas en bonne santé », dit-il, en citant l’exemple de la vache qui, à cause d’un mal de pied, ne se lève, ne mange pas, traîne pour se faire traire. Avec en corollaire, cette règle des 80/20 que connaissent tous les éleveurs : « 20 % des animaux requièrent 80 % du temps ». Si le robot « devient une solution pour piloter son troupeau », comme le résume Ronan Le Gall, coordinateur technique nutrition bovine à Triskalia, voire s’il permet même « d’aller jusqu’à l’approche individualisée pour chaque vache », cette nouvelle technologie oblige à tendre vers une optimisation technique plus poussée. Avec ce « rendez-vous obligé qu’est l’efficacité économique, mesurée par l’EBE », dit-il.
De gros écarts
Au-delà des moyennes, l’étude Cogedis met le doigt sur des résultats hétérogènes au sein de la « population robot ». Ces gros écarts conduisent Emmanuel Étesse à citer deux leviers pour sortir de bons résultats économiques :
- Optimiser les systèmes pour avoir des effets sur les charges proportionnelles.
- Adapter l’investissement aux capacités financières de l’exploitation.
Comparaison des coûts de production
Ces propos sont appuyés par Emmanuel Étesse, conseiller de gestion à Cogedis, qui compare le coût de production entre installation classique (333 €/1 000 L) et installation robotisée (360 €/1 000 L). Et de détailler cette différence de 27 €/ 1 000 L entre les deux systèmes : + 16 €/1 000 L pour les concentrés en robot ; – 3 €/1 000 L pour les fourrages ; + 3 €/ en coût de renouvellement. Côté charges de structure, les amortissements représentent 13 €/1 000 L supplémentaires en système robot (ajouter + 3 €/1 000 L pour les intérêts d’emprunts). À comptabiliser aussi, par ricochet, moins de charges sociales : – 4 €/1 000 L.
[caption id= »attachment_7789″ align= »aligncenter » width= »300″] Système robot[/caption]
Production laitière plus élevée
L’étude de groupe du centre de gestion montre sans surprise que la production est plus élevée de 600 L/VL avec le robot. Il s’avère également que l’affouragement à l’auge majoritairement pratiqué en système robotisé débouche mécaniquement sur un chargement plus élevé : 1,74 UGB/ha contre 1,54 dans les autres systèmes où les vaches passent plus de temps en pâturage. Cet itinéraire technique aboutit logiquement à une production plus élevée par hectare de SFP (13 410 L contre 11 120 L). Reste que le volume de lait produit par vache ne fait seul le chiffre d’affaires. L’étude comparative montre aussi que le lait produit en système robot « est en moyenne moins riche en matière utile et que les comptages cellulaires sont plus élevés », poursuit Emmanuel Étesse. D’où cet écart de prix de vente du lait de 8,80 €/1 000 L en moyenne entre les deux systèmes. Didier Le Du
L’avis de Ronan Le Gall, Coordinateur technique nutrition bovine Triskalia
Pour bien démarrer en robot, il faut 50 vaches maximum par stalle. Idéalement, il est souhaitable de constituer un lot de multipares et un lot de primipares dès
qu’il y a deux stalles. En système robotisé, la conduite des taries est encore plus importante. On évite ainsi les problèmes pathologiques post-partum et on s’assure d’une bonne capacité d’ingestion nécessaire à un bon démarrage en lactation. Cet automne, nous lançons un « club robot » destiné aux nouveaux investisseurs et aux éleveurs plus expérimentés. Il est ouvert à tous. Deux réunions techniques et une réunion plénière seront organisées chaque année. Ces rendez-vous seront complétés par une newsletter.