Les pratiques culinaires et le goût des jeunes générations modifient la demande de produits carnés. Les distributeurs connaissent et anticipent cette évolution. Des enseignes, comme système U, s’engagent aux côtés des producteurs pour créer de la valeur ajoutée.
L’évolution de la consommation de vin interpelle. Le produit basique, plutôt bas de gamme, présent sur la majorité des tables Françaises il y a quelques années, ne remplit plus les verres. Les français en consomment moins mais de meilleure qualité. Peut-il en être de même pour les produits carnés ? « Sans aucun doute », répond Pascale Hébel, responsable du pôle consommation au Crédoc, intervenante à une journée organisée par l’Ifip, sur les produits du porc. « La génération nomade consomme beaucoup de sandwichs faits à la maison, mais aussi des produits carnés haut de gamme et relativement chers. Ces jeunes sont nés avec le concept de développement durable ; ils le réclament dans les produits qu’ils achètent. Ils conserveront la même attitude à 45 ans. C’est une tendance de fond qui ne déviera pas ». C’est cette évolution que Terrena essaie d’anticiper en essayant d’améliorer la qualité de ses produits et en misant sur un développement respectueux de l’environnement. Son président, Hubert Garaud, présentait le concept de Nouvelle Agriculture promue par la coopérative en s’appuyant sur les efforts entrepris pour valoriser les produits du porc.
18 mois de travail avec Système U
« Les relations contractuelles entre les organisations de producteurs et les distributeurs sont bien meilleures en Allemagne qu’en France. Nous avons donc tenté de rattraper le temps perdu en innovant au niveau commercial ». 18 mois de travail avec l’enseigne Système U ont été nécessaires pour aboutir à un accord qui satisfait les deux parties. « Nous avions le même objectif de créer de la valeur en apportant un plus au produit. Il y avait un préalable : que l’innovation soit rentable pour l’agriculteur ». La collaboration a débouché, pour la viande de porc, sur l’émergence de toute une gamme de 24 produits permanents (plus 2 en été) enrichis en oméga 3. « Entre le bio et le conventionnel, il y a des parts de marché à prendre, notamment pour les produits carnés ». Un groupe de 42 adhérents s’est engagé dans la démarche. « Nous leur garantissons un prix supérieur de 10 centimes du kilo. Cette plus-value couvre les dépenses supplémentaires liées à l’aliment.
De plus, ces élevages enregistrent, depuis leur engagement, de meilleures performances zootechniques ». En parallèle, un travail de simplification au niveau de la filière a permis de chasser les charges superflues. « Nous avons volontairement réduit la gamme de produits, les couleurs et les formes des emballages pour gagner en compétitivité, tout en tenant compte de l’avis de notre partenaire commercial. C’est Système U qui est capable de nous dire ce que le consommateur voit sur une barquette en quelques secondes pour faire son choix ». À chacun son métier. Avec quelques impondérables, cependant. « La barquette noire est un signe qualitatif mais pose problème au niveau du tri sélectif. Cela peut paraître un détail mais nous travaillons là-dessus ». Les ventes sont en progression et la coopérative a de l’ambition. « Nous ne voulons pas nous contenter d’une niche ! ».
Anticiper la révolution numérique
Pour Hubert Garaud, la tendance actuelle est tout simplement une révolution agricole qui doit s’adapter à la révolution numérique en cours. « Aujourd’hui, en quelques clics, sur un smartphone, le consommateur dispose de nombreuses informations sur nos produits ». Pascale Hébel confirme : « L’année 2015 a vu l’apparition de nombreux objets connectés, liés à l’alimentation ». Montres et réfrigérateurs connectés, par exemple. Applications pour calculer le nombre de calories ingérées ou connaître les qualités nutritives des produits… Ces objets sont encore peu connus et encore moins utilisés. Ils s’imposeront, selon la spécialiste. Les consommateurs les utiliseront, entre autres, pour connaître les effets santé des aliments mais aussi l’origine des produits, le mode de production ou encore des éléments concernant le bien-être animal. De l’information en instantané, au moment de l’achat. Terrena entend rester dans la course en jouant sur la transparence avec ses produits Nouvelle Agriculture. Bernard Laurent
Richard Piaget, Président du groupe Arcado (saucisses de Morteau-Montbéliard)
Nous avons un objectif de croissance de 3 % par an. Nous sommes dans la démarche de créer de la valeur ajoutée à partir de produits de niche. Par exemple, il y a une diversification possible de la saucisse de Morteau pour qu’elle devienne un produit de snacking (grignotage). C’est une tendance forte dans les habitudes de consommation. À l’inverse, je crois aussi beaucoup au contre-courant de cette mode du prêt-à-manger. C’est l’idée du repas entre amis. La saucisse de Morteau est typiquement un produit convivial, facile à cuisiner, que l’on partage. Il a une histoire et un lien avec le terroir. Les dernières campagnes de communication, montrant une saucisse de Morteau promettant « 20 centimètres de pur bonheur » puis, l’année suivante, demandant « Tu m’aimes, mon chou ? » aux usagers du métro parisien et aux lecteurs de la presse nationale, visaient cette cible des jeunes urbains.