Des mairies du département du Morbihan s’engagent à augmenter la part de produits alimentaires d’origine française dans les restaurants de leurs collectivités. Ils ont signé une charte élaborée avec la FDSEA.
La profession agricole se bat pour l’apposition de la mention d’origine des produits alimentaires sur les étiquettes en grandes surfaces. Les résultats, pour diverses raisons, sont laborieux. Alors, pourquoi ne pas commencer par sensibiliser les élus locaux au « manger français » ? C’est l’objectif de la FDSEA 56 qui appelle les maires des communes morbihannaises à s’engager pour un approvisionnement en produits français des restaurants de leurs collectivités. La restauration hors domicile* constitue le 3e débouché de l’agroalimentaire, après la grande distribution et l’export. Les restaurants des collectivités écoulent un volume de production loin d’être négligeable. Contrairement aux restaurants collectifs commerciaux (qui importent massivement), leur gestion dépend de la volonté politique des élus locaux.
Une vingtaine de communes
« La démarche est partie d’un échange avec le vice-président du Conseil départemental », indique François Valy, de la FDSEA 56. « Il nous a invités au congrès des maires du Morbihan, en octobre dernier, où nous avons pu exposer nos revendications. Les élus sont de plus en plus sensibles à la préservation des emplois sur le territoire ». Suite à ces échanges, une charte a été formalisée et expédiée à tous les maires du département. Plus d’une vingtaine de communes l’ont déjà signée. Elle les engage à augmenter la part des produits locaux, pour atteindre, à terme, 100 % d’achats de produits alimentaires d’origine française (quand cela est possible). La démarche est légale, au vu du code des marchés publics. À condition de définir un cahier des charges qui stipule que l’on veut un produit répondant à un signe officiel de qualité, du bio, un type d’alimentation animale…ou imposant des critères de fraîcheur rendant l’achat local incontournable.
60 % de produits français à Pluneret
La restauration collective des collectivités est autogérée ou concédée. Dans le premier cas, la cuisine est faite sur place. Les exigences de la charte sont plus faciles à respecter. À Vannes, 89 % des produits utilisés dans la cuisine centrale sont déjà d’origine bretonne. À Languidic, une autre commune signataire, une cuisine a été aménagée dans des locaux existants, il y a 5 ans. « Nous avons embauché une cuisinière. Aujourd’hui, le système est satisfaisant. Nous nous approvisionnons essentiellement en produits frais et locaux et les repas sont moins chers », indique Philippe Grasset, directeur général des services. À Locqueltas, comme dans beaucoup de petites communes, le respect de la charte est plus difficile car leur indépendance est moindre. 2 cuisinières élaborent les repas pour 200 élèves. « La cuisine est faite sur place mais la société Ansamble nous fournit la matière première.
Je les ai rencontrés avant de signer la charte », explique Michel Guernévez, maire de la commune. «Ils m’ont certifié qu’ils peuvent respecter les conditions. La viande est estampillée Bleu-Blanc-Coeur. Nos repas sont un peu plus chers mais c’est une réussite. La quasi-totalité des élèves mange à la cantine et il n’y a pas de gaspillage ». Les 350 scolaires de Pluneret bénéficient du même schéma, avec Api restauration comme fournisseur de produits bruts. « En 2015, nous avons utilisé 60 % de produits français. Nous nous engageons, avec Api, à augmenter cette proportion et à tendre vers le 100%. C’est une volonté politique de nos élus », assure Thierry Martin, responsable de la cuisine. Les autres communes signataires sont à l’avenant mais il reste beaucoup d’élus à convaincre. Celles qui n’ont pas de cuisine sur place sont encore plus dépendantes de la politique des sociétés qui livrent les repas.
Étendre le dispositif à la région
En signant la charte, les communes s’engagent à participer à un groupe de travail départemental, piloté par la FDSEA. Une première réunion est prévue dès février pour relever les premières difficultés rencontrées. À terme, chaque année, elles communiqueront un bilan de l’opération. François Valy, de la FDSEA, reprend : « Notre objectif est d’étendre le dispositif à la région. Nous irons également expliquer notre démarche en Normandie et en Pays-de-la- Loire dans les prochaines semaines ». Les agriculteurs apprécieront ; il faudra convaincre les élus. Le prix est parfois un peu plus cher…. Bernard Laurent
L’avis de Christelle Michel, Directrice Terre Azur Bretagne (groupe Pomona-restauration collective)
L’appel d’offres des marchés publics pour l’année 2016 (septembre à décembre 2015) est révélateur de l’évolution des demandes des restaurants des collectivités. Dans 90 % des cahiers des charges figure désormais un critère concernant l’origine des produits. Les collectivités veulent du local. Ce pourcentage était loin d’être aussi élevé les années précédentes. Nous fournissons déjà plus de 50 % de fruits et légumes d’origine bretonne. Nous ne pourrons jamais être à 100 % sur ces produits compte tenu de la demande en produits exotiques. – Passion Froid (groupe Pomona) achète 40 % de ses volumes de produits animaux (lait-viandes) dans le Grand Ouest. Pour ses responsables, la demande plus marquée des collectivités de s’approvisionner en produits d’origine France ne sera pas un problème. Ils pourront répondre aux exigences des élus.
*La restauration hors domicile comprend la restauration commerciale traditionnelle (indépendants, chaînes, brasseries…) la restauration rapide (sandwicheries…), hôtelière et la restauration en collectivité.