Le 10 février à Quessoy, des élus de tous bords se sont constitués en « collectif de soutien » aux éleveurs. L’idée a germé également dans les autres départements bretons. Les clivages enfin dépassés, un grand rassemblement régional aura lieu à Loudéac ce samedi.
Suite à la demande syndicale d’alerter tous les élus locaux sur la gravité de la crise agricole que traverse l’ensemble des productions animales, le Conseil départemental a organisé mercredi 10 février dernier une rencontre au lycée de la Ville Davy à Quessoy rassemblant tous les maires ou leurs représentants, toutes appartenances politiques confondues.
Une portée intersyndicale
Georges Douguet, de Cerfrance Côtes d’Armor, à travers une présentation des marchés agricoles, a décrit très concrètement la situation économique critique des filières. Démontrant notamment la vente des productions à perte, « à des prix en dessous des coûts de production depuis des mois et des mois ». Tour à tour, les différents syndicats professionnels (JA, FDSEA, Coordination rurale et Confédération paysanne) se sont exprimés. Un fait rare que cette tribune partagée qui a montré un certain nombre d’attentes ou d’idées communes, comme sur les questions d’étiquetage d’origine des produits, de meilleure répartition des marges ou d’harmonisations sociale et fiscale et de lutte contre les distorsions de concurrence entre pays à l’échelle européenne. Trois maires agriculteurs ont également témoigné des difficultés rencontrées, de leurs préoccupations et de leur volonté de « remettre l’humain au premier rang de leurs priorités ». De cette mobilisation forte a émergé un mouvement d’élus prêts (enfin) à s’engager collectivement pour soutenir l’agriculture : à la sortie, environ 350 élus de tous bords ont signé une motion.
Les politiques locaux s’engagent enfin
Un Collectif d’élus locaux en soutien à l’agriculture et aux territoires (Celsat) est ainsi né sous l’impulsion de Sandra Le Nouvel (Parti Socialiste) et de Thibaut Guignard (Les Républicains). Dans la foulée, dans les autres départements bretons, un Celsat s’est également organisé. Ces groupes de responsables aux diverses sensibilités poursuivent tous le même objectif d’alerter le Gouvernement et l’Union européenne sur la situation alarmante des agriculteurs bretons. « Si nous, élus locaux, nous n’avons pas forcément la main sur les prix agricoles, l’orientation des marchés, le partage des marges et les normes, nous sommes en revanche tout à fait légitimes pour porter l’inquiétude grandissante de nos campagnes. Dans un esprit pluraliste et constructif –c’est la première fois sans doute que des élus de gauche et de droite ou que les quatre syndicats agricoles dépassent ensemble les clivages- nous voulons être, à travers les Celsat, une caisse de résonance en direction du Gouvernement », explique Thibaut Guignard, maire de Plœuc-L’Hermitage et 1er vice-président du Conseil départemental des Côtes d’Armor.
Loudéac, rendez-vous stratégique et symbolique
Devant l’urgence de la situation, pour montrer leur détermination, cimenter leur rapprochement et envoyer un message clair à destination de Paris et Bruxelles, les nouveaux Collectifs ont décidé de se retrouver ce samedi 20 février, dès 15 h, sur le site de l’hippodrome de Loudéac. « Ce rassemblement régional est à l’initiative des quatre Celsat départementaux. Loudéac est un choix à la fois stratégique et symbolique : c’est un point de rendez-vous central de la Bretagne et c’est une ville majeure du secteur agroalimentaire dont l’activité dépend très largement de l’élevage », explique Thibaut Guignard, l’une des têtes de proue du mouvement des élus locaux dans les Côtes d’Armor. « À cette occasion, se succéderont des prises de parole des syndicats agricoles et de représentants des Celsat départementaux. » Mais pour que ce ne soit pas un coup d’épée dans l’eau, la suite est déjà envisagée : « On veut constituer un groupe restreint de responsables, un comité de pilotage pour suivre les dossiers, alerter, lancer et coordonner les actions futures. »
L’avenir des territoires en jeu
« En Bretagne, si les filières agricoles s’effondrent, c’est bien simple, ce sera des milliers d’emplois locaux en moins, un dynamisme de nos zones rurales à l’arrêt et un autre aménagement du territoire qu’il faudra inventer et mettre en place. » Et de poursuivre sur ce qu’il se passe depuis des semaines à travers la région : « Comprenons qu’aujourd’hui, ce ne sont pas uniquement des revendications corporatistes du monde agricole, mais plus largement l’avenir de nos territoires qui est en jeu. Nous ne voulons pas que la SAU bretonne soit valorisée par de grandes exploitations céréalières. Non, nous voulons conserver nos filières construites sur des élevages qui fournissent énormément d’emplois induits… » Toma Dagorn