« Sans régulation, point de salut »

De gauche à droite : Christophe Baron, président de Biolait, Aurélie Trouvé, enseignant-chercheur à l’Agro Paris Tech, Christian Hascoët, de l’association des producteurs indépendants (Apli) et Pierre Viste, producteur de lait dans la Manche. - Illustration « Sans régulation, point de salut »
De gauche à droite : Christophe Baron, président de Biolait, Aurélie Trouvé, enseignant-chercheur à l’Agro Paris Tech, Christian Hascoët, de l’association des producteurs indépendants (Apli) et Pierre Viste, producteur de lait dans la Manche.
La régulation reste le maître mot pour l’association pour sortir de cette crise laitière sans précédent.

Avec la tourmente connue par les producteurs laitiers, l’Apli a organisé une soirée débat à Briec, en conviant producteurs et consommateurs. « Nous sommes dans une crise structurelle. Les secteurs agricoles sont confrontés à un marché chaotique sans régulation. C’est une anomalie historique et géographique, car les pays ont toujours régulé. L’atterrissage en douceur promis par l’Union européenne lors de la sortie des quotas s’est traduit par un atterrissage en douleur », introduit Aurélie Trouvé, enseignant-chercheur à l’Agro Paris Tech. Elle ajoute que « normalement quand les prix chutent, la production diminue. Or en 2015, la production néo-zélandaise a baissé de 0,3 million de tonnes, celle des États-Unis a augmenté d’1 million de tonnes, mais c’est surtout L’Europe, avec une augmentation de 3 millions de tonnes, qui est responsable ».

Proposer des alternatives

Outre-Atlantique, la régulation se manifeste par « des quotas, toujours présents au Canada. En Nouvelle-Zélande, Fonterra redistribue ses bénéfices aux producteurs. Ici, la première chose à faire est de plafonner les volumes, au moins en cas de crise. Mais si la France est la seule à réguler, il vaut mieux plafonner tous les collecteurs, en distribuant des primes à ceux qui diminuent leur production, comme le proposait le projet Dantin il y a deux ans ». La chercheuse explore d’autres pistes, comme des réserves de crise, plus conséquentes qu’aujourd’hui, ou encore l’incitation par les pouvoirs publics de créer des OP par bassin, obligatoirement reconnues par les industriels.

Pour Pierre Viste, de l’Apli national et producteur dans la Manche, le critère de longévité des vaches laitières est un bon indicateur. « Une vache en bonne santé est un animal qui produit pendant de nombreuses lactations, or la moyenne française n’est que de 2,2. Est-ce que l’on veut des laitières en bâtiment 365 jours par an ? », se questionne-t-il. Installé à Virandeville (50), le producteur avoue même « ne pas vouloir transmettre son modèle de production, avec une traite robotisée ».

500 millions d’euros de perte de trésorerie pour la ferme laitière bretonne

La proposition de l’Européen Milk Board, avec son programme de responsabilisation face aux marchés, « ne prône pas un retour aux quotas, car si la consommation repart, on laisse les éleveurs produire. C’est un système réactif qui s’adapte au marché, et est géré par les producteurs et non les industriels. Le prix du marché mondial de lait ne porte que sur 7 % des volumes. Comment peut-on encore accepter d’être payé uniquement sur cette petite proportion ? ». Se réapproprier la négociation auprès des distributeurs, tel a été le challenge mené par Pierre Viste, avec le lait FaireFrance. « C’est un produit juste demi-écrémé. Nous proposons notre marchandise, sans négociation », indique-t-il.

En conclusion, Christian Hascoët, de l’Apli 29, évalue le manque en trésorerie en production laitière à «  500 millions d’€, à cause de la baisse d’environ 100 € au 1 000 litres payé aux producteurs. Avec une région produisant 5 milliardS de litres, les pertes sont énormes, rien que pour le secteur laitier. La régulation, mot encore difficile pour l’Europe, est une technique moderne. Il n’y a pas d’autres solutions », pense le producteur, qui déplore que « l’analyse de l’Apli avant la fin des quotas, fondée, s’est réalisée ».


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