La décision d’une enseigne de distribution de ne plus avoir d’œufs pondus par des poules en cage dans ses rayons a logiquement ébranlé les aviculteurs bretons qui se sont mis aux normes européennes. Reste que, au-delà du coup marketing du distributeur, ce choix commercial s’inscrit dans le fil d’une tendance lourde qui imprègne la consommation alimentaire. Qu’on le veuille ou non, dans un contexte d’offre abondante, le consommateur fait et fera de plus en plus la loi sur le marché. C’est lui qui achète, c’est donc lui qui décide. Ce n’est plus la réglementation administrative ou l’éleveur qui dicteront ce que doit être le bien-être animal, mais le « souhait » imposé par le consommateur.
Ce qui vient de se passer dans l’œuf risque de se reproduire.
Ce qui vient de se passer dans l’œuf de consommation risque de se reproduire au niveau d’autres productions animales. D’autant que la différence de prix n’est pas toujours dissuasive. Mardi, dans une grande surface bretonne, l’œuf standard était à 18 ct pièce quand celui en plein air affichait 25 ct et le bio 23 ct. Soit une incidence de moins d’un euro sur le caddy hebdomadaire d’une famille de 4 personnes.
Pragmatiques, les pays d’Europe du Nord ont choisi de surfer sur l’opinion que les animaux sont mieux dehors. Ainsi, aux Pays-Bas, les producteurs sont incités financièrement à produire du « lait de pâturage ». Dans cet autre pays du fromage, les produits laitiers estampillés d’une tête de vache avec la fleur au coin de la bouche affichent clairement l’éthique du système de production : « 120 jours de pâturage par an jusqu’à l’automne et 6 heures de promenade par jour dans les prairies hollandaises ». Cet argument philanthro-commercial satisfait à la fois le consommateur qui préfère les vaches dehors et l’industriel qui voit ainsi son marché intérieur protégé des produits venant de dehors.