Technique, stratégie, place de l’homme étaient au menu de l’assemblée générale des Ceta. Depuis 1956, ces cercles de réflexion favorisent l’économie des exploitations et le bien-être des agriculteurs.
[caption id= »attachment_19284″ align= »alignright » width= »209″] Pierre-Emmanuel Tardif[/caption]
C’est sur l’exploitation de Pierre-Emmanuel Tardif que les Ceta 35 ont fêté leurs 60 ans d’existence. Hébergeant un atelier d’engraissement de porcs (840 places en Label Rouge), sur une SAU de 50 ha, l’exploitation est le support d’une des plates-formes d’essais du projet « Sors tes couverts » porté par le groupe Ceta Val de Seiche. Ce dernier compte 13 agriculteurs principalement situés sur le bassin versant de la Seiche. La démarche est soutenue pendant trois ans par le Conseil régional de Bretagne, dans le cadre des appels à projets pour une agriculture écologiquement performante. « L’objectif est d’améliorer la valorisation des couverts végétaux », explique le producteur.
« Sors tes couverts »
Sur son exploitation, l’essai vise à couvrir le sol entre deux céréales pour limiter le salissement et produire un maximum de biomasse avec un C/N équilibré, assurant un bon fonctionnement au sol. Cinq couverts différents ont été évalués. « Nous avons aussi testé différents matériels disponibles localement : semoir en direct JD 750 A, semis au déchaumeur, Roll Crop, broyeur », précise Malo Letonturier, animateur FDCuma, partenaire des Ceta sur le projet « Sors tes couverts ». Après deux années d’essais, plusieurs conclusions ressortent déjà. « Le lin et l’avoine vont être arrêtés car ils ont posé un problème de destruction sans glyphosate. Les trèfles aussi vont être abandonnés, car on pense qu’ils ne sont pas bien semés avec cette méthode… », note en particulier le producteur.
Réduction de 25 % des produits phytosanitaires
D’autres exemples de projets ont été présentés lors de l’assemblée générale. « Le projet Ceta Mini Dose est porté par 15 agriculteurs à l’Ouest de l’Ille-et-Vilaine sur le bassin versant du Meu, ayant différentes techniques de travail du sol. En 5 ans, ils ont réduit de 25 % l’emploi de produits phytosanitaires, avec de gros efforts hors herbicides (- 53 %), tout en maintenant des marges brutes comparables à la moyenne Ceta. Des résultats obtenus grâce à différents changements de pratiques : réduction de doses, changements de variétés, désherbage mécanique, décalage des dates de semis, rotations…
Des éleveurs travaillant sur la démédication en porc grâce à la biosécurité, ou utilisant les huiles essentielles en bovins, ont également exposé leurs premières conclusions. Dans un pôle davantage dédié à l’homme, un focus a été fait sur la sécurité au travail, sujet développé dans les groupes Ceta. « Nous réalisons des audits dans les exploitations avec des industriels. Ils remarquent que la première chose à améliorer est souvent la sécurité », souligne Nadine Herbelin, directrice du Ceta 35. Des outils existent comme l’arbre des causes qui peut servir avant ou après un accident ou le document unique d’évaluation des risques.
Trois scénarios stratégiques
La prospective était aussi au menu de l’après-midi, au travers de 3 scenarios imaginés pour 2076 par les groupes Ceta. Le scénario 1 vise la valeur ajoutée et l’ancrage local dans une France qui n’est plus compétitive sur le marché mondial. L’autonomie, le souci de l’environnement, et les produits à plus forte valeur ajoutée sont mis en avant. Le scénario 2 fait le pari de la diversification vers les énergies renouvelables, alors que la demande énergétique augmente. Dans le scénario 3, le monde connaît une forte croissance de la demande alimentaire.
Les agriculteurs français s’orientent vers des produits à bas coût facilement exportables. La spécialisation et l’intensification font disparaître la polyculture-élevage. Seules les grandes exploitations résistent, avec un accroissement de la production par animal et par ha, et une agriculture de précision. « Et vous demain, quelle sera votre stratégie ? », ont demandé les animateurs aux producteurs présents. Les avis sont partagés, et souvent, deux orientations sont envisagées.
La parole aux anciens
A l’occasion des 60 ans des Ceta, des anciens sont venus apporter leur témoignage, à l’image d’Odette Pommereul qui se remémore « les grandes avancées techniques des années 60. Elles nous ont permis de simplifier le travail et de prendre des vacances. A cette époque, nous avions une caravane implantée sur la côte, pour laquelle on s’inscrivait à la Cuma. Nous avons aussi acheté un congélateur en Cuma qui existe toujours aujourd’hui. »
Joseph Gérard rappelle quant à lui que les groupes Ceta sont « un moyen de s’enrichir mutuellement. » Jean-Yves Lehuger se souvient que « la mise en place des quotas était une catastrophe. Il nous a fallu valoriser notre production avec des coûts plus faibles. Aujourd’hui, c’est la fin des quotas. En groupe, on doit pouvoir surmonter cette épreuve, mais avec des recettes différentes. »