A côté de son cheptel laitier, Emmanuel Cornuaille, de l’EARL La Boissière à Éancé (35), élève un petit troupeau de Rouges des prés. Une race qui valorise bien le surplus de fourrages de l’exploitation. Une passion aussi.
Située au sud de l’Ille-et-Vilaine, sur des terres séchantes, l’EARL La Boissière s’appuie sur un atelier lait, mais aussi une activité bovins viande, avec un troupeau d’une quinzaine de mères Rouges des prés. « Cette race rustique nous permet de valoriser les fourrages de l’exploitation. Au printemps sur les paddocks d’herbe, elles passent derrière les vaches laitières. Elles vont également sur des parcelles un peu plus éloignées en bordure de forêt. En hiver, elles mangent les refus des laitières qui sont en ration complète quotidienne à la mélangeuse. Elles sont également nourries avec les coins de silos, de la paille, du foin et un peu d’ensilage d’herbe », détaille Emmanuel Cornuaille.
[caption id= »attachment_22046″ align= »aligncenter » width= »800″] A tour de rôle, Emmanuel Cornuaille, son fils Pierre, et Chloé Filliatreau, apprentie, ont dressé Jacanne pour le concours national du Space. « Une génisse très docile à la base », souligne l’éleveur.[/caption]
Alimentation économique
Les achats de concentrés sont très limités pour cette production. « J’en donne juste un peu aux vaches en finition. Les veaux grandissent sans complément. » Capables de faire « l’accordéon », les Rouges des prés sont économiques du point de vue alimentaire, arrivant à des poids de carcasse de près de 500 kg à la réforme. Elles le sont aussi en temps de travail. Pour simplifier encore l’organisation, l’éleveur va arrêter l’engraissement des mâles en taurillons pour faire des bœufs, qui pourront être conduits avec les lots femelles.
L’intérêt d’Emmanuel Cornuaille pour la Rouge des prés a commencé dès son enfance, au contact du troupeau de ses parents (à quelques kilomètres, dans le Maine-et-Loire). « À leur départ en retraite en 1999, j’ai repris une quinzaine d’animaux en race pure, pour lesquels j’ai bénéficié de primes vaches allaitantes. Pour le suivi des animaux, j’ai rapidement adhéré à l’OS Rouge des prés et au contrôle de performances. »
63 ha d’un seul tenant
Éleveur inséminateur
Côté reproduction, l’éleveur pratique 100 % d’IA. « J’insémine moi-même, ça me permet d’élargir le choix de mâles. Sur la vingtaine de taureaux disponibles, j’en utilise environ cinq par an, plus deux en testage, avec au minimum un taureau à génisses. Les accouplements sont gérés au cas par cas. » Le développement squelettique, le maintien du lait et des facilités de vêlage sont des critères fondamentaux pour l’éleveur qui, par ailleurs, ne recherche pas le gène culard.
« Globalement, les vêlages se passent bien avec parfois des interventions. En seize ans, je n’ai eu que deux césariennes. » Pour la première fois cette année, de la semence sexée a été utilisée (taureau Ilton en testage). « Nous allons sans doute recommencer, en femelle pour aller plus vite sur certaines lignées, et en mâle pour les vaches qu’on ne souhaite pas garder », précise Pierre, le fils d’Emmanuel Cornuaille, également passionné par l’élevage bovin.
Peut-être un mâle en station
Aujourd’hui, le travail de sélection porte ses fruits puisqu’un des veaux, baptisé Matout, va potentiellement entrer en station d’évaluation. Il va être génotypé, ainsi que sa mère, et ne doit pas porter le gène culard. C’est un fils de Grenadier (taureau complet non porteur culard) sur Acajou (fort en développement squelettique) sur Rafia (développement musculaire). Une belle illustration de cumul génétique progressif. En moyenne sur l’élevage, l’index de synthèse au sevrage atteint 101,8.
[caption id= »attachment_22048″ align= »aligncenter » width= »800″] Le jeune Matout, repéré pour le schéma de sélection, juste à côté de sa mère.[/caption]
Au National du Space avec une génisse
Des jeunes mâles sont parfois vendus en reproducteurs. L’élevage a par ailleurs été sélectionné pour participer au concours national cette année au Space, avec la génisse Jacanne qui devrait avoir son premier veau début novembre, pile deux ans après sa naissance. « Nous apprécions aussi la précocité et la docilité de cette race. En moyenne, l’âge au premier vêlage est de 30 mois. » Jacanne est une fille de Canne, une des plus belles femelles de l’élevage, et du taureau Viaduc. Elle affiche un Ivmat (index de valeur maternelle) de 102.
Depuis un mois, l’animal est dressé par l’éleveur, son fils Pierre, et Chloé Filliatreau, apprentie sur l’exploitation. « C’est la première fois que l’élevage participe à un concours. Mes parents l’ont parfois fait. C’est un bon moyen de promouvoir la race », précise Emmanuel Cornuaille, qui est par ailleurs agréé juge en Rouge des prés. Dans le cadre du Space, l’élevage recevra aussi la visite d’une délégation étrangère s’intéressant à la race.