Une année climatique exceptionnelle, conjuguée à des attaques de ravageurs sans précédents, ont terni les rendements en maïs grain de la région. Pourtant, certains secteurs sont passés au travers des gouttes pour une récolte plus que satisfaisante.
Il sera très difficile de trouver un qualificatif représentatif de cette récolte de maïs grain, tant les disparités sont fortes au travers de la région. La déception est grande à l’Est-Bretagne, avec des parcelles destinées à être récoltées en grain, qui ont finalement été ensilées, faute de mieux. La saison se termine donc précocement, avec « un grand écart suivant les régions.
Les secteurs non arrosés présentent des rendements catastrophiques, avec à l’inverse les zones du Trégor et du Finistère qui, quand elles n’ont pas été touchées par les attaques de géomyzes, ont gardé un très bon potentiel », observe Michel Le Friant, responsable de la section céréales chez Triskalia. Il fallait donc se trouver au bon endroit au bon moment pour espérer réussir sa culture. Les moissonneuses n’ont pas eu le temps de souffler après la récolte estivale de céréales.
Une récolte démarrée fin septembre
« Nous avons collecté les premiers maïs grains dès la fin septembre. Habituellement, le gros du flot des remorques intervient vers la mi-novembre. Cette année, c’est en octobre que les chantiers ont battu leur plein ». Chaque collecteur compte maintenant ses billes, ce sera pour la Bretagne une baisse de 40 % par rapport au cru 2015. Mais le pire a été évité, car « nous nous attendions à une baisse plus significative avant maturité des plantes », avoue le responsable.
En cause, des signaux forts qui ont alerté la profession, comme des surfaces implantées en mai en baisse de 7 à 10 %. À cela s’est ajouté un mois de mai froid, avec dégâts de mouches. Enfin, des surfaces en grain transformées en ensilage n’ont pas arrangé les choses. « Les producteurs ont préféré récolter leur culture avant propagation de fusariose, qui fragilise l’accroche des épis. Le risque pouvait être important, car avec un système racinaire rétracté, la verse et les chutes d’épis représentaient des dangers potentiels ».
La production française revient à un niveau historiquement bas, chiffrée à « 11,7 millions de tonnes. Nous revenons à des tonnages de 1990 ». Les plants de maïs ont produit entre 80 quintaux secs de grain dans la région de Pontivy (56), là où la barre des 100 quintaux est habituellement franchie. À l’inverse, le Trégor tire son épingle du jeu avec des rendements de l’ordre de 100 à 120 quintaux.
Les taux d’humidité en guise lot de consolation
Les conditions sèches ont eu toutefois l’avantage de faciliter les récoltes, avec des chantiers propres et des grains ramassés avec des teneurs en humidité faible. « La moyenne s’établit à 30 %, ce qui est une très bonne performance. Les frais de séchage s’en trouvent abaissés, à environ de 25 €/t, contre 30 € l’année dernière ». Des chantiers rapidement exécutés, laissant place à des parcelles non matraquées par les engins, permettant des semis de céréales en de bonnes conditions.
L’Ukraine est sous la neige
L’arrivée de l’hiver laisse frileux les vendeurs, qui ne se positionnent pas sur les marchés. Résultats : les prix se tiennent. « Le prix de 178 € / t (cours de la semaine dernière) rendu Pontivy place le maïs à 13 € de plus que le blé. C’est une aubaine pour les producteurs, qui compensent quelque peu les faibles rendements ».
Du côté du marché mondial, les récoltes sont exceptionnellement bonnes aux États-Unis, tout comme dans la région de la Mer Noire ou en Ukraine, ou les potentiels sont aussi exprimés. Cependant, ce grenier de l’Europe est actuellement « sous une importante couche de neige. Il reste ainsi 5 à 6 millions de tonnes à collecter, et le réseau de transport est saturé », explique Michel Le Friant.
Face aux maïs OGM proposés entre autres par les États-Unis, la France a une carte à jouer pour répondre à la demande de marchandises non modifiées génétiquement. « C’est le cas avec les maïs grains français. Nous pouvons ainsi viser les marchés d’Asie. Les flux franco-français sont composés pour 2,3 millions de tonnes vers l’alimentation animale, et les volumes sont identiques pour la filière amidonnerie. L’export tombera cette année à 5 millions de tonnes, en provenance principale de la région Aquitaine, pour alimenter l’Espagne ou le nord de la Communauté européenne ».
Le maïs reste une plante exceptionnelle
Même si les champs prenaient l’allure de plants de tabacs aux alentours de Josselin (56), le potentiel de production permis par le maïs reste sécurisant pour les élevages. « La Bretagne est cette année coupée en 2, avec une plus grande partie de territoires concernés par une récolte très décevante. Pourtant, quand les conditions sont réunies, c’est une plante qui sécurise la production de fourrage, tout en pouvant être valorisée en grain. Adapté aux élevages, le maïs valorise très bien la fertilisation organique », rappelle Michel Le Friant. Reste alors à espérer que les conditions connues cette année ne se répètent pas à l’avenir.
Se préparer à la fin des traitements de semences
La fin programmée du traitement de semence Sonido, actée pour 2018, nous laisse peu de temps pour prévoir la lutte contre les géomyzes. Les attaques de ces mouches sont plus importantes dans les zones d’élevage, de par l’environnement prairial, avec des graminées hautes. Le mois de mars, humide, a été favorable à la pupaison (stade intermédiaire chez les insectes), et l’hiver précédent a enregistré moins de 10 jours de gel. Les prévisions de vols sont très difficiles à cerner. Il faut travailler sur les variétés de maïs, certaines ayant un effet d’attractivité sur les mouches. Enfin, l’utilisation ou non d’engrais starter n’a pas eu d’effet sur ces attaques de ravageurs. Michel Moquet, Arvalis - Institut du végétal