La contractualisation, bouclier protecteur des agriculteurs face à la volatilité des prix. Si c’était si simple, cela se saurait.
Parlez contractualisation aux agriculteurs bretons, ils entendront intégration. C’est peut-être aussi un peu pour cette raison que la Chambre d’agriculture de Bretagne qui, mardi à Plérin (22), a présenté son étude (1) sur le sujet, emploie l’expression « relations contractuelles ». Plus consensuelle, la formule englobe une multitude d’accords qui vont du distributeur qui se fournit chez un agriculteur local, au volailler qui impose son contrat d’intégration à tous les producteurs.
Engouement ou nécessité
Rien que dans le lait et dans le porc, les économistes de la Chambre d’agriculture ont recensé 21 initiatives différentes en France. Le mouvement touche aussi la Bretagne, terre de marché au cadran qui ne jurait que par la confrontation de l’offre et la demande.
Peut-on parler d’engouement ? Plutôt de nécessité, à un moment où la volatilité touche autant les cours des denrées agricoles que ceux des intrants.
Dans ce contexte chahuté, le contrat entre l’agriculteur et son client s’insère comme un outil employé pour s’extraire du grand marché des commodités qui ne fait aucune différence entre un poulet français et polonais. Et comme l’agriculteur n’a plus grand-chose à gagner sur la technicité, comme l’évoque André Sergent, président de la Chambre du Finistère, la contractualisation s’avance comme une solution pour échapper au grand marché des prix bas.
Difficile sans transparence
Pour quels résultats ? C’est bien la question qui taraude la profession. Autrement dit, « les relations contractuelles améliorent-elles la performance des filières agricoles ? ». Et sur ce thème capital, c’est un peu la réponse du Normand au Breton : cela dépend. Cela dépend de la transparence, notamment sur les prix. L’agriculture, elle, revendique sa loyauté à ce niveau mais reproche une opacité intéressée entretenue par les transformateurs et distributeurs.
Même l’observatoire des prix et des marges mis en place suite à la crise agricole de 2009 n’apporte pas toute la lumière sur le sujet. « Il y a un problème de représentativité des produits retenus pour le calcul qui ne correspondent pas au panier du consommateur. Il y a aussi un problème de décalage dans le temps ; le dernier observatoire fait référence aux prix pratiqués en 2013 », observe Quentin Matthieu, économiste à l’APCA.
Concentrer l’offre pour peser
Cet exemple cité par l’économiste est révélateur de ce que craignent les agriculteurs dans ce type de relation : que le gros écrase le petit. C’est également dans ce dessein de concentration de l’offre que le syndicalisme majoritaire essaie, depuis plusieurs années, de mettre en place des OP (organisations de producteurs) en production laitière. Sans réel succès pour l’instant.
« La question de fond est de savoir comment amener les producteurs à s’organiser », met à plat Franck Guéhennec, président la FDSEA du Morbihan, reconnaissant que lorsque une OP voit le jour, elle a parfois le goût amer du semi-échec : « Quand on voit qu’il y a 17 OP chez Lactalis, on se dit que l’on a sans doute raté quelque chose ».
La Bretagne doit se vendre
(1) : Les relations contractuelles dans les filières agricoles et agroalimentaires, disponible au service économie des Chambres d’agriculture de Bretagne.