Adhérent à un groupe de travail sur l’utilisation des pesticides, Jean-Yves Briant, éleveur à Nivillac, a testé de nouvelles pratiques. Le résultat est sans appel : les traitements se raréfient, sans perte de marge.
« Avant d’adhérer, en 2011, au groupe Dephy Écophyto, je déléguais le protocole de traitement des cultures au technicien ». Jean-Yves Briant, éleveur laitier sur 173 hectares avec son épouse, protégeait ses cultures par des traitements systématiques. La production de légumes, sur une quinzaine d’hectares, accentuait le problème : « Je n’avais pas la main, contraint de suivre un cahier des charges strict. Compte tenu de l’obligation d’irriguer sur des terres séchantes et de la charge de travail, j’ai décidé de cesser cette production en 2014 ».
Suite aux échanges en groupe, il a revu le système global de l’exploitation, remis en pâture les parcelles proches des bâtiments (moins de céréales) et allongé sa rotation maïs-blé en introduisant de la luzerne et un mélange fétuque-trèfle violet. « L’objectif était d’augmenter l’autonomie alimentaire du troupeau (100 vaches), de réduire les traitements tout en maintenant les marges et le revenu ».
Un seul traitement fongicide..
En choisissant des variétés de céréales résistantes, l’éleveur a fortement réduit ses passages fongicides, de 70 % sur blé et de 40 % sur triticale. « Je retarde au maximum le 1er passage grâce à l’observation des parcelles ». Il ne sème plus avant fin octobre, mélange plusieurs variétés, et modère ses apports d’azote. « J’accepte de perdre quelques quintaux. L’essentiel, c’est le maintien de la marge ». Depuis 4 ans, les rendements se sont pourtant maintenus, avec un seul traitement fongicide. Les herbicides sont adaptés aux adventices présentes. Les régulateurs ont été supprimés.
30 à 50 % de produits phytosanitaires en moins en 4 ans
En travaillant sur différents leviers (allongement de la rotation, variétés résistantes, mélanges de variétés, observation …), le groupe a réduit, en moyenne, l’utilisation de produits de 35 % depuis 2011 (tous ont au moins réduit de 30 %). Hors herbicides, la réduction atteint 60 %. Tous ont réduit les fongicides de 40 à 70 % grâce au retardement du 1er passage et à l’arrêt des traitements systématiques. « Il est plus facile de réduire les fongicides car le risque ne porte que sur une année ; c’est plus délicat pour les herbicides ». En parallèle, l’autonomie alimentaire s’est accrue sur les exploitations grâce à la production protéique (herbe, légumineuses).
Globalement, sur l’ensemble de l’exploitation, l’éleveur adopte le semis direct (labours occasionnels) et réalise, en parallèle, quelques essais. Non concluants pour certains : « L’orge hybride n’était pas rentable. L’augmentation de rendement ne comblait pas le coût supplémentaire de la semence ». Le désherbage mécanique sur blé, avec une houe rotative de la Cuma, est satisfaisant. La réflexion sur le maïs est en cours, du moins pour supprimer un traitement. Les couverts couvrants permettent de concurrencer et d’étouffer les adventices.
Autre essai en cours, en passe d’être définitivement adopté : l’ensilage d’épis de maïs (arrêt de l’ensilage plante entière) qui permet, au-delà de l’aspect alimentation des laitières, de réduire la sole de maïs et donc le recours aux produits phytosanitaires. L’essai de culture de lupin (28 q/ha l’an dernier), économe en intrants, sera reconduit cette année…
'J'ai repris mon autonomie de décision'
[caption id= »attachment_25085″ align= »alignright » width= »148″] Hervé Le Pironnec, Éleveur laitier à Questembert[/caption]
« Parallèlement, nous avons fait appel, en 2009, à un organisme privé (qui ne vend pas de produits) pour le suivi des cultures. Nous faisions auparavant deux fongicides systématiques sur les céréales. Rapidement, nous avons diminué les traitements, sans perte de rendements, grâce à un protocole d’observation avec comptage hebdomadaire, débouchant, ou non, sur un traitement. L’adhésion, ensuite, au groupe d’échanges sur la réduction des produits phytosanitaires, en 2011, répondait surtout à la volonté de limiter encore les traitements, pour ma propre santé ». 25 hectares ont été engagés dans le Dephy, notamment la surface concernée par la rotation habituelle maïs-blé. Les principaux changements observés sur cette surface depuis 2011 concernent les dates de semis, plus tardives : 10 novembre pour l’orge (qui a remplacé le blé) et 10 mai pour le maïs.
« L’orge couvre mieux le sol et il n’y a plus qu’une seule culture à surveiller ». La rotation est coupée par l’herbe (RGI-RH sur 24 mois) ou le mélange luzerne-dactyle-ray-grass (abandon de la luzerne pure en raison des rumex). Le désherbage de l’orge se fait en un seul passage, tardif. Les traitements systématiques d’herbicides sur maïs ont cessé. En 2016, des tests ont été réalisés en post-levée (traitement glyphosate néanmoins après dérobée RGI et prairies). L’IFT a baissé de 50 % globalement et de 70 % hors herbicides. La sole de maïs va diminuer. Les éleveurs ont adopté le maïs ensilage épis et comptent sur les stocks d’herbe pour assurer une bonne production par vache. La ferme, divisée en deux sites de production, limite le pâturage…