« La Bretagne a plus d’avenir que d’autres régions »

ag-fdsea-22 - Illustration « La Bretagne a plus d’avenir que d’autres régions »
Le Normand Arnold Puech d’Alissac était l’invité de la 74e assemblée générale de la FDSEA des Côtes d’Armor.Point de vue.

Pour l’événement, cette année, Arnold Puech d’Alissac, éleveur de volailles en Seine-Maritime, membre du bureau de la FNSEA et président de la FRSEA Normandie depuis 14 ans, était invité à intervenir devant les adhérents.

Nécessité de fixer les prix à l’avance

[caption id= »attachment_25468″ align= »alignright » width= »151″]Arnold Puech d’Alissac, membre de la FNSEA. Arnold Puech d’Alissac, membre de la FNSEA.[/caption]

Soulignant les 13 revendications de la FNSEA dans le cadre des élections à la présidence de la République, il a commencé fort : « La loi de modernisation de 2008 sous Nicolas Sarkozy nous a affaiblis face à l’aval. Notre solution sur le prix est d’inverser le rapport de force en négociant les prix à l’avance, pour l’année à venir. Sans ça, on continuera à n’avoir que des miettes. » Il a rappelé que sur 100 € de dépenses alimentaires, 14 € vont dans la poche de la distribution,  8 € seulement reviennent vers le producteur, « même l’État (grâce aux taxes sur l’alcool notamment) en perçoit davantage, soit 8,5 € ».

Comment fixer le prix à l’avance, l’a interrogé un participant : « Avec un peu de contractualisation dedans ? » Pourquoi pas, a répondu le Normand : « Chez nous, 400 producteurs livrent à Danone. Un tiers de leur prix du lait est basé sur les coûts de production des éleveurs du quartile supérieur. À l’arrivée, ils ont touché 20 € de plus que ceux chez Sodiaal. Le problème est que l’on voit aujourd’hui des écarts de 100 € / 1 000 L entre les quartiles inférieur et supérieur sur la question des coûts de production… » En Bretagne, le constat est le même.

Et le responsable de poursuivre. Pour lui, la faiblesse de l’agriculture française est d’être trop éclatée. « La laiterie Arla Foods collecte 85 % du lait danois, comme Friesland Campina aux Pays-Bas ou Dairygold en Irlande… En France, 70 % du colza passe par Avril qui n’a pas hésité à fermer un site à Dunkerque : à l’arrivée les producteurs français touchent 35 € / t de plus, soit 10 % de plus que les allemands. » Il juge les Français « encore trop riches » puisque des usines d’aliment se construisent alors qu’il y a besoin de concentration et de restructuration des groupes industriels, à l’image des autres pays européens.

Du volume pour des outils performants

Arnold Puech d’Alissac a convenu que le marché intérieur est saturé et insiste sur les débouchés à l’export vers pays tiers et la nécessité de « faire des volumes » pour avoir des outils performants. « Nous étions le grand pays d’export et nous nous sommes fait doubler par les Allemands et les Hollandais », a précisé celui qui avoue avoir produit 30 000 volailles par an avant de revenir à un niveau de 20 000. Il a cité notamment en exemple les États-Unis, « ce grand pays très combatif qui sait exporter ».

Pour clore les débats, le Normand a ensuite invité à anticiper les mutations qui s’amorcent. « Aujourd’hui, il y a 5 % de la production en bio. Demain, il y a en aura 20 ou 25 %. Il va y avoir besoin de construire des outils spécifiques pour accompagner cette tendance. » Pour autant, il reste confiant pour les Bretons : « Vous avez plus de chance et d’avenir que la plupart des régions agricoles de France grâce au tissu d’entreprises de collecte et transformation dont vous disposez localement. Vos filières sont fortes et organisées et vous avez déjà obtenu de gros progrès sur la question environnementale alors qu’un défi majeur attend beaucoup d’autres zones. »

'Installer pour avoir des voisins demain'

Avec humour, Damien Blanchard, président des Jeunes Agriculteurs des Côtes d’Armor, « un syndicat d’installation », a rappelé à l’assemblée que la FDSEA était « la dernière étape syndicale avant la retraite ». Une manière de capter l’attention pour inviter chacun « à tout mettre en œuvre pour transmettre son exploitation ». Un effort essentiel pour que les jeunes « aient des collègues et des voisins demain à travers le territoire, pour maintenir les entreprises et le tissu rural… »

Dans un environnement compliqué, il a aussi expliqué que JA National préparait un important rapport sur la gestion des risques. Avant de terminer à destination des responsables politiques, dans son costume de chargé du dossier foncier à l’échelle régionale, sur la perte économique pour la France que représente la disparition du foncier agricole. « C’est un gâchis. Je vois partir 50 000 ha de SAU par an quand chez moi j’essaie de gérer mon élevage à la petite cuillère… »

Les hommes et les trésoreries sont éprouvés

Point de vue. Une fois encore, Didier Lucas a souligné l’état de souffrance des agriculteurs pris dans un environnement usant.
« C’est triste mais c’est presque devenu un lieu commun de parler de crises pour nous. Elles épuisent les trésoreries et éprouvent les hommes. Malgré les avancées obtenues au fil des mois, rien ne vient compenser le manque », a martelé le président Didier Lucas, à la tribune lors de la 74e assemblée générale de la FDSEA des Côtes d’Armor à Quintin, jeudi 9 février. « Toutes les grandes puissances savent maintenir et développer leurs agricultures, pourquoi la France baisse les bras ? », interrogeait-il devant le nouveau préfet et les responsables de l’Administration.

« Nous attendons encore des baisses de charge, des efforts sur l’harmonisation sociale, fiscale et environnementale par rapport à nos voisins européens. » Faisant référence aux « ambitions » de la Chine, de la Russie et des États-Unis, Didier Lucas a aussi insisté sur la future réforme de la Pac sur laquelle société civile, profession et élus planchent déjà : « Nous n’attendons pas une simple réponse comptable. Il est essentiel de préserver la politique agricole commune en termes de budget et de fonctionnement dans un contexte de négociations internationales compliquées. »

Avant de conclure sur l’importance de « la capacité à rester unis face aux industriels et distributeurs qui ne jouent pas le jeu et aux responsables politiques qui ne tranchent pas ». Il a notamment promis de nouvelles opérations très prochainement dans les grandes surfaces et ailleurs « quels que soient les prochains signaux en lait ». Avant de terminer en rappelant le cœur de l’engagement syndical : « L’action n’apporte pas toujours le bonheur mais il n’y a pas de bonheur sans action. »   


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