Sharon Shannon : la Galway-girl de passage en Bretagne

sharon-shannon-accordeon-irlande - Illustration Sharon Shannon : la Galway-girl de passage en Bretagne
Originaire de la côte ouest de l’Irlande, la musicienne est sans doute une des meilleures accordéonistes traditionnelles au monde. Elle a donné trois représentations en Bretagne.

Le noir se fait dans la salle. Une petite fumée douce envahit la scène, avant qu’Alan Connor n’entre et s’installe devant son clavier. Il enfile discrètement un bracelet de grelots à sa cheville et délicatement, se met à jouer une petite mélodie enjouée et rapide, les cheveux cachant son visage. C’est alors que l’accordéoniste Sharon Shannon, originaire de Galway en Irlande, s’assoit et saisit son instrument. Immédiatement et dès que ses doigts alignent les notes, le son de l’accordéon diatonique berce la salle et invite les spectateurs à un voyage qui les amène dans les contrées de nos cousins celtiques. Cette représentation dans la salle du Sémaphore de Trébeurden (22) fait partie d’une tournée des deux artistes, qui ont aussi posé leurs valises à Brest (29) et à Muzillac (56).

Le concert, de près de 2 heures, semble trop court : le rythme imposé par les musiciens, tantôt sous forme de ballade douce, est brusquement emballé par des réelles endiablées où la prouesse des artistes est visiblement impressionnante. Cramponnée à son cube en bois garni de touches, l’Irlandaise répond à son collègue dont les mains, telles de véritables araignées en fuite, distillent des airs dynamiques.

Plusieurs violons  d‘Ingres

Si Alan Connor est un excellent pianiste, il s’avère aussi être un guitariste chevronné, couplé à un très bon chanteur. Sharon, elle, ne fait qu’un avec son accordéon, mais joue aussi volontiers du tin-whistle, petite flûte qui papillonne les airs traditionnels. Enfin, le violon utilisé pour le morceau « The Woodchoppers », donne l’impression d’être dans un pub de l’île du trèfle, près d’une cheminée au feu crépitant. L’artiste reprend des thèmes traditionnels, mais compose aussi des airs. « Il m’arrive de siffloter une mélodie dans la rue. Je l’enregistre alors rapidement pour ne pas l’oublier », confie-t-elle.

« J’ai donné mon premier vrai concert à l’âge de 16 ans. Dès 9 ans, j’ai commencé à faire danser les gens », se souvient-elle. Issue d’une famille nombreuse dont le père était producteur de lait dans le comté de County Clare, la musicienne a grandi dans un milieu rural, avec une attention particulière portée sur les animaux, qu’elle adore.

Le travail force le talent

C’est vers l’âge de 8 ans que Sharon Shannon a démarré son apprentissage de la musique, en commençant par la flûte. « Mon oncle jouait de l’accordéon, ce qui m’a donné envie de me mettre à cet instrument. Je travaille toujours à l’oreille, sans partition. 60 % des enfants irlandais jouent d’un instrument. Dans ma jeunesse, je jouais
2 heures par jour de la flûte et de l’accordéon. Par la suite, je donnais des représentations dans les pubs 7 jours sur 7 pour gagner de l’argent, et même si la salle était très bruyante, cela ne m’arrêtait pas ! ». Cet apprentissage sur le terrain de la musique proche de ses spectateurs l’a conduite à rencontrer Alan Connor, pianiste qui se produisait à Dublin, où Sharon fut invitée à le rejoindre.

Ce talent pour enchaîner les airs traditionnels, la musicienne ne l’a pas reçu dès sa naissance. « Il faut beaucoup travailler », reconnaît-elle. Un acharnement à la tâche qui l’a conduite sur des terres lointaines, comme le Japon, le Canada, l’Australie ou la Bretagne. « Les tournées durent environ une semaine. Mais j’aimerais rester tout le temps à Galway ». À la question : Avez-vous un concert particulier qui vous a marqué ? L’accordéoniste répond sans hésiter : « Ce serait comme me demander quel membre de ma famille je préfère. Ce n’est pas la taille de la salle qui compte, ni le nombre de spectateurs ». Sharon Shannon a une musique généreuse, qu’elle aime partager, tout simplement.

Les cours d’accordéon font le plein

Elle est loin l’image de ringardise que pouvait injustement laisser paraître l’accordéon il y a quelque temps. Qualifié même de boest an diaoul (boîte du diable), l’instrument chromatique ou diatonique est aujourd’hui moderne, en étant parfois là où on ne l’attend pas. Pour perpétuer cette tradition musicale, Mathieu Postic, professeur de musique, observe que la fréquentation aux cours ne faiblit pas. « J’ai environ une soixantaine d’élèves entre Morlaix (29) et Plestin-les-Grèves (22). Lui, il s’est mis à jouer à 14 ans, et s’est vu offrir le précieux accordéon quand il a décroché son brevet des collèges. Après avoir participé à différentes formations musicales et effectué un stage de musique irlandaise où il a pu appréhender cette tradition uniquement orale, Mathieu Postic joue en compagnie de son frère jumeau Thomas, pour faire danser lors de festoù-noz.

[caption id= »attachment_25463″ align= »aligncenter » width= »680″]Mathieu Postic transmet sa passion pour l’accordéon au travers de cours. « Il n’y a pas d’âge pour s’y mettre », confie-t-il. Mathieu Postic transmet sa passion pour l’accordéon au travers de cours. « Il n’y a pas d’âge pour s’y mettre », confie-t-il.[/caption]

« Mes élèves ont de 8 à 85 ans. Certains ont toujours rêvé de prendre des cours, et repoussent l’apprentissage au moment de leur retraite. Cependant, pour jouer de l’accordéon, il faut écouter beaucoup de musique et être capable de mémoriser facilement un thème ». L’accordéon est un instrument magique, sympathique et qui peut aussi bien produire des mélodies enjouées ou mélancoliques. Le bon moment pour s’y mettre, c’est maintenant.


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