Invité à l’assemblée générale de la FDSEA, vendredi dernier à Grand-Champ, Xavier Beulin s’est exprimé sur les sujets de préoccupation du moment, devant les adhérents du syndicat.
Comment accroître la compétitivité des exploitations ?
Xavier Beulin : La valeur ajoutée nous échappe. Sur 100 € de valeur du produit, 7,5 € seulement reviennent au producteur. Il est impératif de renverser le processus de négociations commerciales en intégrant nos coûts de production dans le prix de vente au consommateur. Jusqu’à présent, la défense du pouvoir d’achat a été la priorité des pouvoirs publics, faisant pression sur les prix. L’État doit changer le cadre de négociations. Il faut également dégager des fonds pour investir dans la robotique, le numérique, les biotechnologies qui font partie de l’arsenal indispensable pour retrouver le chemin de la compétitivité.
Quelles sont vos demandes au niveau de la PAC ?
X. B. : La plupart des États membres ne veulent plus des anciens outils de régulation. Nous avons pourtant besoin d’outils de protection. Nous avons 3 demandes : la simplification de la Pac, le déclenchement de l’assurance (du fond de mutualisation) dès 20 % de pertes, (pas à 30 %), et le droit de nous organiser (en modifiant les règles de l’Autorité de la concurrence), face aux 4 centrales d’achat qui mettent plus de 90 % des produits en rayon. Nous devons massifier l’offre. Nos voisins et concurrents l’ont très bien compris au point de n’avoir parfois qu’une seule entreprise dans un même secteur de production.
La sortie du Royaume-Uni est-elle un bien pour l’Europe agricole ?
X. B. : À court terme, c’est problématique. Avec la disparition du chèque britannique au budget agricole, c’est 4 milliards d’euros qui s’envolent, auxquels il faut ajouter l’excédent commercial de 3 milliards d’euros de la France avec le Royaume-Uni. Il faut revoir les accords avec le Commonwealth. Avant qu’elle n’accepte un contingent d’agneaux néo-zélandais, l’UE était autosuffisante. Aujourd’hui, la production communautaire ne couvre plus que la moitié des besoins européens. Nous devons défendre le budget agricole européen, sans complexes : les USA, le Canada, la Chine ou le Brésil soutiennent fortement leurs agricultures.
Comment réagir face aux attaques des associations de protection du bien-être animal ?
X. B. : Nous sommes respectueux de ceux qui ne veulent pas manger de viande. Mais nous sommes fatigués des émissions à charge et des attaques directes comme, il y a quelques jours, l’incendie dans la ferme dite des « 1 000 veaux » dans la Creuse. Ce n’est pas un élevage industriel, mais un bâtiment en bois, équipé de panneaux solaires et d’un méthaniseur, où les animaux sont sur de la paille. Ils appartiennent à plusieurs éleveurs et y sont regroupés pour l’engraissement à des fins commerciales. Face à des esprits totalitaires, ce n’est pas facile… Nous devons continuer à communiquer, ouvrir nos portes, expliquer…
Qu’en est-il de la simplification administrative ?
X. B. : La France a tendance à sur-transposer les règles communautaires. Le Gouvernement l’a reconnu. Nous sommes en discussion sur le volet « pénibilité ». Nous ne contestons pas le principe mais demandons des éléments mesurables et objectifs. Dans l’état, les propositions sont inacceptables. Nous avons quand même obtenu une baisse des charges sociales. Je salue le travail d’Odette Herviaux, sénatrice du Morbihan. En année moyenne, cette baisse représente 700 à 800 millions d’euros pour la profession.
Où en est l’étiquetage d’origine des produits ?
X. B. : Les maillons concernés ont jusqu’à fin mars pour se mettre à jour. Quand les prix montent, les étiquettes changent plus rapidement… Nous serons vigilants.
La restauration hors domicile joue-t-elle le jeu du « manger français » ?
X. B. : La RHD, c’est 66 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Elle fait majoritairement appel à l’importation (plus de 80 % en volailles). Ce sont nos voisins qui captent cette valeur ajoutée. Nos filières ont leur part de responsabilité en s’adaptant mal à la demande de la RHD (gammes trop larges en volailles, par exemple, et donc coûts plus élevés). Certains fournisseurs, comme Mac Do, s’étaient engagés à acheter français. Ils tiennent leurs engagements sur la viande et les pommes de terre.