Depuis la Première Guerre mondiale, l’histoire laitière n’a rien d’un long fleuve blanc tranquille. La période des quotas, tant décriée lors de son application puis de sa suppression, apparaît en fait comme la période laitière la plus calme du siècle dernier. À ceux qui croient que la surproduction est le fruit uniquement de la Pac, qu’ils se détrompent. La première période de surproduction laitière surgit à la fin des années 1920. Elle est encore accrue par la crise des années 30 qui pèse sur la consommation. Approvisionner les urbains à bon marché Dans l’entre-deux-guerres, le marché du lait est soumis à une forte volatilité. Le décret-loi d’avril 1935 instaure les premières formes d’intervention. Lors de la Seconde Guerre mondiale, et jusqu’aux années 50, la mise sous tutelle du marché par l’État fait l’objet de nombreuses revendications des producteurs. La première grève du lait se déroule en 1964. Elle est dirigée contre l’État qui impose aux producteurs un prix maximum, afin de garantir l’approvisionnement à bon marché des consommateurs urbains. Le mouvement est initié « d’en haut » par la Fédération nationale des producteurs de lait, avec le soutien de la FNSEA. Ce mouvement est soutenu par les organismes de collecte et de stockage, principalement des coopératives. En dépit de son prolongement pendant quelques semaines, le conflit est un relatif échec. Le gouvernement n’hésite pas à importer du lait en poudre des pays voisins. Ce conflit met aussi en évidence une volonté de la FNSEA de garder la main face à la pression croissante des jeunes, regroupés au sein du CNJA et qui contestent de plus en plus les positions jugées trop conservatrices de la Fédération nationale. La seconde grève du lait (1972) dans les campagnes bretonnes se déroule dans un contexte tout à fait différent. Le marché s’est transformé, les…
Entre économie et idéologie, un siècle de soubresauts laitiers