L’absence de vision partagée sur l’utilité de l’Europe interpelle la FNSEA. Le premier syndicat agricole de France, lui, ne doute pas : « Il faut plus d’Europe et mieux d’Europe ».
C’était 24 heures avant que des candidats « anti-Europe » à la présidentielle ne viennent à Brest dérouler leurs arguments contre. Contre la Pac, contre les frontières ouvertes, contre… tout ce qui est et qui fait aujourd’hui l’Europe et ses États membres. Laissant imaginer que le monde enviable est celui du repli sur soi. Un monde de chimères que n’a pas manqué de dénoncer, démonstrations et chiffres à l’appui, la FNSEA.
La voie de l’avenir contre la voie sans issue
Lors de son congrès, le syndicat national a livré un véritable plaidoyer de plusieurs heures en faveur de cette « Europe qui est notre avenir » ; en lui opposant « le Frexit qui est une voie sans issue ». Henri Brichart, 2e vice-président de la FNSEA, estime qu’avec un éventuel Frexit, « deux tiers des exportations françaises perdraient en compétitivité » et que la France devrait composer avec « une explosion du coût de la dette en lien avec la sortie de l’euro ; avec une dévaluation des aides directes ; avec une fermeture des marchés des pays tiers ».
« Certes, l’Europe ne fait plus rêver », admet la présidente Christiane Lambert. « Mais nos politiques nationaux en portent la lourde responsabilité, à droite, comme à gauche », assène-t-elle. Et de rappeler que, « quand quelque chose ne va pas », Bruxelles devient trop souvent le bouc émissaire des hommes politiques français.
Le tout marché ne marche pas
Pour autant, la présidente de la FNSEA partage l’idée que « le tout marché ne marche pas ». Aussi, les DPB sont pour le syndicat « un socle nécessaire ». Quant aux aides couplées, « elles doivent être renforcées pour orienter l’agriculture » ; et les aides agricoles aux handicaps naturels soutenues pour aider les territoires ». Tout cela, sans distinction de modèle insiste le syndicat souvent accusé de défendre la seule production de masse destinée à alimenter l’industrie. « Il y a la nécessité de cultiver le modèle français : au pays des 1 000 fromages, il y a 1 000 modèles ».
Mais, s’il n’est pas question de défendre « le modèle de firmes au détriment du modèle de fermes » (familiales), la FNSEA ne veut pas non plus voir rôder les agriculteurs non professionnels autour du pot de miel des aides à l’agriculture. D’où ce projet, déjà dans les tuyaux, de faire aboutir au plus vite le dossier du statut de l’agriculteur. Encore faut-il que demain il y ait encore des aides à partager. Cette question n’est pas sans inquiéter le syndicat majoritaire : « Demain pourra-t-on encore compter sur des Chirac, Sarkozy, Hollande pour défendre le budget européen ? »
Une Bretagne à l’aise avec l’environnement
Si une large majorité des congressistes, présents à Brest la semaine dernière, partage la vision pro-européenne ardemment défendue par le conseil d’administration – seules 5 abstentions lors du vote du rapport d’orientation consacré à ce thème –, l’approche régionale met en exergue quelques nuances. Ainsi, si la Bretagne n’a pas déposé d’amendement sur l’environnement, c’est d’abord parce qu’elle considère ce dossier derrière elle.
Le film de présentation de la Bretagne projeté en première journée de congrès a d’ailleurs mis en avant ce combat gagné… faisant presque oublier les réglementations qui se sont accumulées pendant 30 ans sur la région (sic). Le sujet n’est pas aussi limpide pour la FNSEA qui sait une chose : elle ne peut plus reculer sur ce dossier. D’où cette formule tricotée avec soin et qui ne saurait fâcher personne : « Le statu quo n’est pas envisageable, mais nous voulons une culture du résultat ». Bruxelles aussi. Mais en attendant les résultats, elle met les moyens… La Bretagne qui mesure aujourd’hui les résultats en sait quelque chose sur ces moyens.