Depuis le 1er janvier 2017, la réglementation s’est durcie pour les forages de plus de 50 mètres de profondeur, soit la quasi-totalité de ceux réalisés en Bretagne. Les agriculteurs perdront du temps et de l’argent.
« Ce n’est pas rationnel ! On cherche à interdire la réalisation de forages ! ». La réaction des professionnels du secteur est unanime. La nouvelle procédure pour les forages de plus de 50 mètres de profondeur interroge. Jusqu’à présent, l’agriculteur qui souhaitait forer faisait réaliser un dossier d’incidence d’une trentaine de pages instruit en 2 mois par les services de l’administration.
Cette instruction donnait lieu à un accord ou à une demande d’informations complémentaires. Le nouveau critère des 50 mètres complique la procédure, notamment en Bretagne où 90 % des forages sont plus profonds. « La productivité des nappes n’est pas très importante dans la région. Les sols schisteux et granitiques imposent de pomper en profondeur pour capter un maximum de fissures », indique Laurent Le Bideau, docteur en hydrogéologie et réalisateur de dossiers d’incidence. Souvent à 80-90 mètres de profondeur.
Désormais, il faut réaliser un examen préalable au cas par cas, avant le dossier d’incidence. Cette étude est visée par la Dréal (direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) ; le dossier d’incidence est ensuite visé par la police de l’eau. Un document de 11 pages, 50 jours d’instruction supplémentaires et un nouveau service administratif concerné…
Dossier plus cher que le forage ?
L’examen préalable débouche sur deux possibilités : un avis favorable pour la poursuite vers la réalisation du dossier d’incidence ou une étude d’impact complémentaire obligatoire, avec enquête publique. « L’étude d’impact a un coût pour les agriculteurs – dans certains cas supérieur au coût du forage lui-même – et prend du temps : la faune et la flore doivent être étudiées à deux périodes de l’année… ».
Pour l’hydrogéologue, cette procédure est mal venue en Bretagne. « Les nappes conservent leur niveau, depuis vingt ans. Le pompage n’est pas très important. Ce n’est pas du tout le cas dans la Beauce, par exemple, où la variation de niveau est forte ». Un élevage breton moyen, consomme entre 2 000 m3 et 5 000 m3 d’eau par an, selon l’espèce. Dans le Léon, un maraîcher peut pomper jusqu’à 15 000 m3. « Pour un projet d’irrigation de maïs en Maine-et-Loire, il faut compter 60 000 m3 par an. Dans certaines régions, le volume est encore supérieur ».
La loi sur l’eau exige une procédure administrative pour tout projet supérieur à 1 000 m3 annuels (en dessous, il s’agit souvent de projets de particuliers). « Un éleveur, à la tête d’un petit élevage qui consomme seulement 1 100 m3 par an, est obligé de suivre l’ensemble de la procédure ».
Effets nuisibles à l’environnement
Selon le spécialiste, la nouvelle procédure est susceptible de bloquer la quarantaine de dossiers déjà réalisés en 2017. La réglementation évolue pour préserver l’environnement. « On peut le comprendre mais la limite des 50 mètres ne correspond à aucune explication rationnelle. L’administration ajoute des couches successives qui mènent à des aberrations ». Dans cet ordre d’idée, il cite le cas d’un agriculteur des Côtes d’Armor qui doit refaire son forage partiellement colmaté après plusieurs années de service.
« Il ne peut pas réaliser un autre forage car, entre-temps, la zone a été classée en zone humide. Comment peut-il faire sinon utiliser l’eau du réseau qui lui coûtera bien plus cher ? ». Cette complexification administrative, à l’heure où les politiques de tous bords ne jurent que par la simplification des procédures, fait peser une menace. Celle de voir les forages sauvages se multiplier, à des endroits pas forcément propices. Des puits qui ne figurent pas dans la « banque du sous-sol » qui enregistre toutes les données sur les ouvrages souterrains des territoires. Quand la sur-règlementation conduit à l’effet inverse de celui recherché…
Cette histoire des 50 mètres est une véritable découverte
Il nous avait fallu deux années de discussions avec l’administration pour avoir un texte équilibré (en 2016) concernant la géothermie de minime importance (problème d’assurance). On nous avait assuré, à l’issue de ces discussions, que la profession serait consultée pour toute nouvelle décision concernant le secteur d’activité. Quelle surprise en découvrant cette histoire des 50 mètres ! Nous tentons d’obtenir une explication du ministère de l’Environnement, mais malgré nos efforts répétés, nous n’y arrivons pas.
Nous ne savons pas qui a pu rédiger un texte aussi flou. Un texte qui permet aux services de la Dréal de l’interpréter comme bon lui semble. La période électorale est peu propice pour faire évoluer ce dossier. Il nous faut attendre sans savoir quoi dire à nos adhérents et à leurs clients. Ce problème sera bien entendu à l’ordre du jour de notre assemblée générale du mois de juin. Éric GarRoustet, Président du syndicat des foreurs (SFEG)
GARROUSTET
le Ministère a modifié par décret , le 25 avril , le texte d’origine concernant les études au cas par cas .
»les forages destinés à l’alimentation en eau » ont toujours la limite de 50 m , par contre »les autres forages » , qui n’avaient pas d’indication de profondeur , sont maintenant concernés à partir d’une profondeur de 100 m
une réunion d’information et de concertation aura lieu en mai ,à ce sujet, avec le ministère , nous éspérons quelle sera productive et quelle ira dans le sens de la simplification administrative
Eric GARROUSTET