Le défi des antibiotiques reste fort en filière veau

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La filière veaux a été proactive sur le bien-être animal et les antibiotiques. Pour s’améliorer encore, davantage de cohérence est à trouver dans toute la filière jusqu’au producteur laitier.

Parmi les enjeux d’avenir identifiés lors du symposium international de la filière veau, le 26 avril, à La Baule, la santé et le bien-être animal ont occupé une bonne part des débats. Ici aussi, les questions sociétales s’invitent, et mieux vaut les devancer pour les rendre plus acceptables pour la filière, plutôt que de laisser le grand public et les distributeurs s’en emparer. « Ce qui s’est passé dans l’œuf [avec un changement brutal des méthodes d’élevage suite à une pression de la distribution, ndlr], cela me fait peur. Restons dans le raisonnable et dans l’économiquement rentable », a souligné Marc Butruille, président du syndicat de la vitellerie française (SDVF).

La réduction de l’utilisation des antibiotiques fait partie des démarches de progrès engagées par la filière veaux dans de nombreux pays. « Posant des problèmes en santé humaine, l’antibiorésistance est partout dans l’eau, les sols. Elle circule via les échanges, les voyages. C’est pourquoi une mobilisation internationale est importante. De vraies alternatives, c’est-à-dire non liées à la pharmacie, doivent être trouvées via la conduite, la qualité de l’eau distribuée, la vaccination, la biosécurité… », introduit Jean-Yves Madec, chef du pôle antibiorésistance de l’Anses.

Des veaux résistants à l’arrivée

Des enquêtes réalisées dans 106 élevages en France, dans le cadre du plan EcoAntibio, ont montré que les consommations sont assez similaires dans les élevages. « Les pistes de progrès sont plutôt à rechercher dans la filière », note Émilie Gay, chercheuse à l’Anses. « La résistance aux céphalosporines de 3e génération a par ailleurs été quantifiée : elle est plus forte en entrée en engraissement qu’en sortie. Par contre, des résistances à d’autres antibiotiques se perpétuent en élevage… »

Avoir des jeunes veaux de qualité au démarrage est un enjeu. La santé peut être favorisée grâce à un transfert réussi d’immunité via le colostrum et avec plus d’hygiène autour du jeune veau, en particulier pour la protection du nombril… « Éviter de laisser partir des veaux à jeun serait aussi une grande avancée », souligne Thierry Lorent, vétérinaire. Chaque année, 1,4 million de veaux de moins de 80 kg circulent en Europe. Même si en France, beaucoup de transports se font à l’intérieur d’une même grande zone, l’optimisation des durées demeure une voie de progrès.

Retour financier pour les producteurs laitiers ?

Créer davantage de liens entre les producteurs laitiers et de veaux est donc essentiel pour l’avenir. Mais les efforts en termes de qualité sanitaire des premiers doivent être rémunérés dans le prix du petit veau, qui oscille selon les saisons entre 20 et 150 €. « Un système de traçage du veau, de la naissance à l’abattage, pourrait être imaginé, avec un retour financier au producteur laitier en fonction de la performance de l’animal », indique Marc Butruille. On peut aussi penser que demain, les nouvelles technologies aideront à gérer le bien-être et la santé des animaux avec des ventilateurs autorégulés, des caméras thermiques ou des microphones identifiant les problèmes de maladies…

Raisonner globalement

Aujourd’hui, les médias et les ONG nous interpellent sur la durabilité des systèmes dans leur ensemble, incluant le climat, l’eau, la santé… En interface avec la nature et le vivant, notre métier est complexe et beaucoup surveillé. Du côté des consommateurs, les avis sont plus neutres. Ils nous demandent des réponses sur les quantités à consommer, l’alimentation de l’animal, son mode d’élevage et d’abattage… Pour progresser, nous devons raisonner globalement, même si l’on agit que localement. Tout est connecté… Par exemple, travailler sur le bien-être peut permettre de réduire les antibiotiques.

Thomas Turini, CIV - Viande, sciences et société

Des actions en Italie, aux Pays-Bas…

Dans d’autres pays, des actions pour réduire les antibiotiques sont également engagées. Au Québec, un programme de surveillance a été mis en place. « En Italie, les vétérinaires et les éleveurs sont formés sur cette thématique. Nous souhaitons notamment réduire les antibiotiques administrés par voie orale et les mélanges. Nous allons cibler davantage. Pour pouvoir utiliser la colistine par exemple, un antibiogramme est obligatoire », précise Alberto Casartelli, vétérinaire libéral en Italie. Dans ce pays, le marché se lance aussi sur ce créneau. « Des produits avec les 120 ou 140 derniers jours sans antibiotique sont mis en rayon. Les consommateurs les payent un peu plus cher. »

Aux Pays-Bas, 99 % des fermes participent au programme de réduction. L’utilisation des antibiotiques a baissé de 35 % depuis 2009. « Des visites sont programmées par les autorités si les agriculteurs ne font pas assez d’efforts », détaille Marleen Lenssinck-Braker, de l’autorité vétérinaire des Pays-Pas. « Un plan d’actions a été mis en place, incluant les fermes laitières où la santé est renforcée sur les jeunes veaux et les négociants et centres de collecte qui assurent la traçabilité grâce à une application sur Smartphone. »


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