La crise impacte fortement les résultats comptables du second semestre. Le revenu moyen s’effondre en fin d’année. Le prix du lait est loin de couvrir le point d’équilibre et les trésoreries se creusent après deux ans de crise. La situation est alarmante car le prix du lait annoncé pour 2017 reste trop bas.
Le prix du lait se dégrade tout au long de l’année 2016 avec un point bas en décembre à 292 €/1 000 L. Chaque mois, la rentabilité des producteurs laitiers s’amoindrit dans les comptabilités, ceci malgré la réduction des charges. Le coût alimentaire se replie de 6 €/1 000 L suite à la baisse du coût de concentrés (diminution des quantités distribuées). Cependant, il tend à remonter depuis quelques mois suite à une campagne fourragère moins favorable. Pénalisée aussi par la conjoncture viande dégradée et par le faible niveau des cours des veaux, la marge brute de l’atelier lait dégringole à près de 180 €/1 000 L (voir graphique).
La réduction des charges ne suffit pas pour équilibrer
Au repli des charges opérationnelles s’ajoute une baisse de plusieurs postes des charges de structure. D’abord les charges sociales affichent un repli (baisse des taux ; options N-1). Les dépenses de carburants, d’entretien et d’amendements sont aussi réduites. L’effet dilution s’estompe car les volumes livrés ont tendance à se stabiliser. Les producteurs réduisent aussi leurs prélèvements privés. Au final, la réduction des coûts est appréciable en 2016 mais elle ne permet pas de résister à une crise de prix du lait liée à un déséquilibre offre/demande.
Effondrement des résultats
Malgré cette gestion de crise, le prix du lait est loin de couvrir le point d’équilibre proche de 335-340 € / 1 000 L en 2016. Le revenu moyen chute à 5 000 € par actif familial. Un producteur sur trois affiche un revenu négatif. Les résultats sont aussi plombés par les mauvaises marges en céréales (490 €/ha de blé contre 760 € en 2015). La rentabilité diminue fortement avec un EBE qui plonge à 125 €/1 000 L fin 2016, niveau nettement insuffisant pour financer les annuités et les besoins privés d’où une marge nette d’autofinancement négative à -30 €/1 000 L. Le taux d’endettement repart à la hausse de 4 à 5 points pour atteindre 54 %. Les nouveaux investisseurs et les jeunes installés sont particulièrement touchés par la crise. 1 100 dossiers d’aide à la trésorerie (1 000 € par exploitation) ont été réalisés par Cerfrance Côtes d’Armor en ce début d’année.
Ce nombre se rajoute aux 360 bénéficiaires de FAC (1 000 € en décembre). La MSA a aussi lancé un dispositif de prise en charge des cotisations sociales. Au final, le niveau de soutien est encore bien insuffisant et un nouveau plan d’aide d’envergure serait certainement nécessaire. Rappelons aussi le risque élevé de sécheresse dans notre région qui pourrait amplifier les difficultés des producteurs en 2017.
À quand la reprise ?
Malgré un rééquilibrage offre demande, la remontée des cours est plus franche dans les autres pays d’Europe mais se fait attendre en France. Les cours du beurre se maintiennent à un bon niveau, par contre la poudre de lait écrémé s’approche du niveau de l’intervention. La demande mondiale ralentit. Le poids des 350 000 t de stocks européens et l’approche du pic de collecte expliquent ce manque de dynamisme. Après une reprise, le prix de base du lait « B » lié à la valorisation beurre poudre repart à la baisse.
Sur le marché intérieur français (58 % du lait produit), la remontée du prix du lait A n’a toujours pas été actée. Bien que des hausses aient été consenties par la GMS sur certains produits de marque, les négociations sur les marques distributeurs et les premiers prix qui constituent le gros des volumes restent à finaliser. La loi Sapin 2 qui devait permettre d’intégrer le coût de production dans les conditions générales de vente est restée « lettre morte »…
Des espoirs vers la Pac
L’horizon laitier reste bien sombre pour l’instant. La hausse du prix du lait (payé aux producteurs) est pourtant impérative pour assurer l’avenir de nombreux éleveurs. Derrière une crise, de nombreux problèmes surgissent : contractualisation, volume A,B,C… niveau de valorisation des produits, communication, partage de la valeur ajoutée… En dehors de ces éléments, la future Pac devra proposer de nouveaux systèmes pour éviter aux producteurs de rester la variable d’ajustement de la filière. Geneviève Audebet et
Georges Douguet / Cerfrance Côtes d’Armor