Les comportements humains et leurs conséquences sont finalement assez prévisibles. Le 1er octobre prochain, les quotas sucriers européens en place depuis 1968 seront levés. Comme les producteurs laitiers en 2015, les producteurs français de betterave ont anticipé cette libéralisation du marché en semant 16 % de surfaces en plus dès ce printemps ; incités par les industriels sucriers qui se sont engagés à acheter les betteraves à un prix minimum de 25 €/t.
Une façon en quelque sorte de pérenniser le système de prix garanti qui prévalait depuis près d’un demi-siècle. Car l’objectif des grands groupes, qui ont anticipé la levée des quotas par des manœuvres de regroupements, de rachats et d’implantations à l’étranger, est de passer de 2 à 3 millions de tonnes d’exportation de sucre, dont 1/3 vers les pays tiers. Reste que les marchés, réels et surtout spéculatifs, anticipent déjà un afflux de récolte : le prix du sucre, très volatil, a baissé de 15 % depuis janvier. Les betteraviers européens vont se trouver en confrontation frontale avec les producteurs de canne à sucre de l’hémisphère sud qui produisent 80 % du sucre mondial. Les producteurs laitiers pourraient leur raconter la suite…
Sauf que les betteraviers réfléchissent à un système assurantiel pour affronter le grand bain de la mondialisation. Ils ont aussi un programme avec l’Inra pour doubler les gains annuels de la betterave qui produit actuellement 13 t/ha de sucre. La recherche aidera ainsi à baisser les coûts de production des agriculteurs. De nombreuses similitudes existent avec la production laitière à la fin des quotas. À la différence que les producteurs de betteraves sont très organisés et disposent d’un puissant lobbying. C’est ce qui fera vraisemblablement la différence.