La sécheresse est l’ennemi juré des producteurs laitiers en système herbager. Il existe des solutions pour adapter son système à cette problématique mais le maître mot reste l’anticipation.
« La gestion de l’herbe n’est pas toujours une chose aisée : observation des hauteurs d’herbe pour les entrées et sorties des paddocks, choix de faucher ou non en fonction de la météo, décision d’envoyer les laitières pâturer plus ou moins loin… Toute cette organisation est encore plus compliquée en période de sécheresse lorsque l’herbe verte commence à se faire rare », introduit Maude Retailleau, animatrice technique au Civam 56 lors d’une journée d’échange organisée conjointement avec le syndicat du bassin du Scorff sur l’exploitation d’Olivier Edy, à Lignol le 18 juillet.
[caption id= »attachment_28320″ align= »aligncenter » width= »720″] Le groupe d’échange du Civam 56 observe les résultats d’un sursemis permettant de renouveler rapidement une prairie.[/caption]
Ce jour-là, il fait 30 °C et la pluie prévue par la météo n’est pas encore tombée. Les laitières vont certainement pâturer les dernières parcelles et si la pluie n’arrive pas d’ici quelques jours elles vont passer au foin et à l’enrubannage récolté il y a 2 mois. « C’est inquiétant », commente Olivier Edy qui est passé en bio depuis 2010. Déjà la sécheresse qui a duré de septembre 2016 jusqu’en avril de cette année a eu un impact sur sa production. « Sur cette période, il me manque 50 000 litres de lait en production, soit un manque de trésorerie d’environ 25 000 €. Voilà la limite de notre système herbager, sans herbe on ne produit pas de lait. »
Vendre des vaches pour limiter les besoins fourragers
L’éleveur laitier bio cherche donc à adapter son système fourrager face au risque de sécheresse. Un éleveur présent fait remarquer : « Passé 22 °C nos ray-grass ne poussent plus. Si les températures continuent d’augmenter au fil des années nous devrons faire évoluer nos pâtures pour aller vers du dactyle, de la fétuque et penser à des mélanges différents. »
Olivier Edy cherche à conserver ses prairies composées de RGA + TB le plus longtemps possible. Pour les renouveler, il utilise la technique du sursemis en apportant du ray-grass et du trèfle avec un semoir à disques spécifique. « Certaines prairies ont plus de 30 ans et ce sont celles qui repartent le mieux après un coup de pluie. » Un des atouts de l’exploitation est le parcellaire groupé avec 50 ha d’herbe accessibles aux vaches autour des bâtiments. Tout est divisé en paddocks de 1 ha et le troupeau passe en moyenne une journée par paddock. Malgré tout, il faut anticiper pour gérer au mieux les stocks de fourrage. En janvier 2017, Olivier Edy a vendu une dizaine d’animaux pour réduire la taille de son troupeau et ainsi limiter les besoins fourragers. « Je sélectionne les vaches qui font des leucocytes, qui ne prennent pas ou qui ne font pas assez de lait après le vêlage. » Ensuite, à partir de mars, les génisses sont envoyées sur les parcelles éloignées. « En temps normal, elles restent pâturer les zones humides proches de l’exploitation. »
[caption id= »attachment_28321″ align= »aligncenter » width= »720″] L’éleveur a disposé une quinzaine de tuyaux avec le numéro de chaque flacon d’huiles essentielles qu’il utilise. Il y dispose régulièrement quelques gouttes et les vaches vont spontanément renifler celles dont elles ont besoin pour solutionner un problème de mammite ou de parasitisme par exemple. Depuis un an qu’il utilise cette technique, il n’a presque plus de mammites et la moyenne de leucocytes est passée de 250 000 à 80 000.[/caption]
Faire pâturer les intercultures
L’éleveur utilise ses couverts d’interculture comme compléments fourragers. Les céréales sont toujours suivies d’une interculture : moutarde blanche/navette/vesce ou mélange céréalier. « Si je manque de fourrage en hiver, je valorise le couvert en le faisant pâturer par les génisses en janvier. Sinon le couvert est enfoui et joue un rôle d’engrais vert. » Olivier Edy a aussi acheté du fourrage à l’automne 2016 en voyant ses stocks s’épuiser à cause de la sécheresse. « J’ai acheté du foin et de la paille pour nourrir les grosses génisses et pailler, mais en bio ce n’est pas facile à trouver. » Si ces différents leviers pour s’adapter à la sécheresse ne suffisent pas, l’éleveur peut aussi tarir un peu plus longtemps ses laitières. « En dernier recours ça sera un passage en monotraite sur une période donnée », conclut olivier Edy.