Maîtriser la pluie sur artichauts

L’irrigation des légumes de plein champ est parfois délicate. C’est le cas des artichauts, qui demandent un pilotage précis de l’arrosage pour ne pas ternir la qualité des capitules.

Les fortes températures enregistrées la semaine passée ont parfois éprouvé les productions végétales. Les cultures légumières de plein champ n’échappent pas à ces épisodes, les stratégies d’irrigation se mettent en place. Vincent Merrien, un des associés du Gaec de Mézalia, cultive des terres sur la commune de Cléder (29), avec des parcelles proches du littoral. La terre, sableuse, ne retient que très peu d’eau. C’est pourquoi il a choisi d’irriguer ses cultures depuis les années 2000. « L’eau est privilégiée pour les artichauts. Le réseau enterré est de 2,5 km », témoigne-t-il lors d’une journée Innov’Action la semaine passée. Sur l’exploitation, l’irrigation de l’artichaut a démarré autour du 10 juin, les drageons reçoivent de l’eau de mai à août. « Pour les choux, nous irriguons juste après la reprise des jeunes plants, à raison de 10 mm d’eau par m2 ».

Pour subvenir aux besoins en eau des cultures, une réserve collinaire d’environ 8 000 m3 a été creusée. « Il ne faut pas irriguer dans le but de sauver les plantes », explique Olivier Merrien, un des associés du Gaec et qui pilote l’irrigation de la ferme. « Sans irrigation, la culture d’artichaut serait impossible ici », ajoute-t-il. Lors de la création de la réserve collinaire, la tourbe présente en surface a été retirée, pour laisser apparaître une glaise grise. « La réserve est imperméable. À l’origine, une seule parcelle était à proximité de cette réserve, puis des échanges parcellaires avec des voisins nous ont permis de disposer de 4 ha à proximité ». Cette source d’eau pour l’arrosage a bouleversé les productions de l’exploitation. « Les cultures d’artichaut camus avaient des petits rendements. Avec l’irrigation, nous pouvons produire du castel et du petit violet ».

« On arrose plus intelligemment »

Les références, toujours peu nombreuses sur l’arrosage de l’artichaut, ont obligé les producteurs à affiner eux-mêmes leur technicité. « Nous arrosons de manière plus intelligente, en anticipant beaucoup plus et en fractionnant plutôt qu’en irrigant moins souvent en plus grande quantité. Au final, nous consommons moins d’eau que dans les premières années. Cette gestion nous pousse à ne pas cultiver de brocolis en terres très séchantes, où nous irriguerions à perte », pense le légumier finistérien. L’observation au champ sert en grande partie à la prise de décision, car quand « les 15 premiers cm sèchent, nous arrosons. Mais ce qui est vrai chez nous ne l’est pas forcément ailleurs ». En cas d’absence de vent, Olivier Merrien pointe les canons vers le ciel, pour « une belle pluie, à petites gouttes, qui ne tacheront pas les capitules d’artichaut ».

Aller vers des échanges parcellaires

Sur le secteur Côtes d’Armor, les légumiers irrigant la culture d’artichaut sont encore peu nombreux. « Les producteurs équipés le sont bien souvent pour les pommes de terre, et profitent alors de leur équipement pour arroser les artichauts. Une autre problématique vient se poser avec le parcellaire, très éclaté, c’est pourquoi des réflexions autour de l’échange parcellaire sont en cours sur le canton de Lézardrieux (22). Situé sur un bassin versant côtier, un gros travail de groupe est en cours pour discuter avec les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) sur l’accès à l’eau d’irrigation. Une enquête est actuellement menée pour vérifier la qualité des eaux souterraines puisées par forage, notamment sur sa salinité », explique Mathilde Bodiou, conseillère en cultures légumières à la Chambre d’agriculture des Côtes d’Armor.

Aller plus loin que le besoin en eau

Si l’utilisation d’un arrosage est principalement destinée à couvrir les besoins en eau de la culture, en prenant en compte l’état hydrique du sol, un mauvais positionnement joue sur l’état sanitaire, avec des présences de mildiou ou de tête noire. C’est pourquoi des essais ont été menés pour positionner au mieux l’irrigation, explique Solenn Pérennec, conseillère en cultures légumières à la Chambre d’agriculture du Finistère. Tout reste encore à créer et à creuser dans ces essais, les seuils pour l’irrigation de l’artichaut n’existant pas. Sur drageons, la conseillère pense qu’une stratégie d’arrosage à la plantation pourrait être bénéfique.

[caption id= »attachment_27825″ align= »alignright » width= »150″]christophe-kerboas Christophe Kerboas, Directeur commercial
au groupe Kerboas CDEAI[/caption]

L’affinage de la technique se fait sur le terrain

L’irrigation sur artichauts est encore peu utilisée, par environ 1 producteur sur 5. Il y a beaucoup de réticence par rapport à cette technique de culture, car quand l’humidité reste sur les capitules, elles peuvent noircir et compromettre la commercialisation. Sur artichaut petit violet, le problème ne se pose pas. Une alternative au canon passerait par une irrigation par pendillards, pour arroser uniquement la raie de plantation. Si certains producteurs s’étaient intéressés à cette alternative il y a quelque temps, personne ne la réalise actuellement. Pour un arrosage classique au canon, l’affinage de la technique se fait petit à petit, sur le terrain.Christophe Kerboas, Directeur commercial au groupe Kerboas CDEAI

 


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