Le chevreau, parent pauvre de la filière

chevreau - Illustration Le chevreau, parent pauvre de la filière
La viande de chevreau n’est pas valorisée à sa juste valeur.

Depuis 2016, après trois ans de crise, la demande est de nouveau présente et de nombreuses laiteries appellent à l’installation en chèvre. Mais à côté de cette filière laitière, coexiste une double filière de viande caprine, celle des chèvres et des chevreaux. Ces derniers ne sont plus valorisés, regrettent les éleveurs, rassemblés en assemblée générale de leur groupement de producteurs Ovi-Ouest, au Verger (35), en mai dernier. Le prix du chevreau vif a peu bougé depuis 20 ans.

« Dans les années 80, la vente de chevreaux représentait un mois de lait pour les éleveurs, maintenant l’apport représente moins de 5 % dans le revenu lait », relaie la Fresyca, fédération syndicale des syndicats caprins des Deux-Sèvres. La filière chevreau était jusqu’alors peu structurée au niveau national, une interprofession viande caprine s’est récemment création en 2014, ainsi que la mise en place d’une cotation officielle, gérée par FranceAgriMer, pour plus de transparence dans une filière où 3 opérateurs majeurs se partagent 90 % d’une petite production nationale de 3 500 t/an.

L’offre ne correspond plus à la demande

Ce « micro-marché » est saisonnier selon Loeil et Piriot, à Thouars (79). L’abatteur collecte et commercialise 50 % de la collecte française de chevreaux, avec une forte demande à Noël, quand l’offre est peu présente, et à Pâques. Et pourtant, même sur ces deux créneaux, les pics de valorisation se sont écrêtés, s’approchant du prix moyen annuel, à 4 €/kg vif à Noël, pour 3,2 € à Pâques. L’offre ne correspond plus à la demande. « Avant le développement de la filière caprine dans les années 2000, quand les producteurs étaient naisseurs-engraisseurs, la production était inversée, avec plus d’offre à Noël. Et les chevreaux élevés au lait de chèvre, étaient mieux valorisés », explique Philippe Rigaudy, directeur adjoint des achats du groupe ALPM.

Les pratiques ont changé. Face à l’agrandissement des cheptels caprins, des engraisseurs se sont spécialisés, et « le chevreau est considéré comme un sous-produit du lait, avec des périodes de mise bas correspondant à la grille de paiement du lait qui ne sont pas en adéquation avec celle du chevreau ». La congélation permet de réguler ces volumes collectés sur 8 mois de l’année.

Des prix assimilables à ceux de la viande bovine

La viande de chevreau reste assimilée à un produit de luxe, car elle est vendue durant des périodes festives. Pourtant, avec le temps, le prix de vente à la consommation s’approche de celui de la viande de bœuf, autour de 15 €/kg, voire 10-11 €/kg lors des actions de promotion. 35 à 40 % du volume abattu est vendu en GMS. Le reste concerne l’export vers principalement l’Italie, le Portugal…

Sensibilisation au bien-être

Ces faibles prix d’achat n’incitent pas les éleveurs à passer du temps à initier les chevreaux à boire, avant leur entrée dans des ateliers spécialisés en engraissement. Et les taux de mortalité peuvent être importants. « À côté des 3500 t commercialisées, il y a un volume équivalent qui part à l’équarrissage », déplore Philippe Rigaudy. Il a donc été demandé par l’interprofession d’ajouter dans le Code mutuel caprin, nom donné en chèvre à la charte des bonnes pratiques d’élevage, une sensibilisation au bien-être des animaux et à celui des chevreaux. Une incitation actuellement en quête de financements pour être efficace… comme pour les autres filières de productions animales.

Pour le sexage, il faudra attendre

« La réponse viendra peut-être du côté du sexage », espèrent les chevriers. Mais ce ne sera pas pour tout de suite… Capgènes s’est en effet rapproché des plates-formes de sexage et a la volonté de tester la technologie à la semence caprine. Mais, pour le moment, « pas de références, pas de résultats, pas de tests concrets », rapporte Pierre Martin, de l’Organisme de sélection (OS). Alors on n’est pas encore à l’offre commerciale. Mais de nouvelles technologies de sexage sont à l’étude, peut-être seront-elles plus accessibles pour l’IA sexée caprine ?

[caption id= »attachment_28818″ align= »alignright » width= »177″]Franck Mérel, Président Ovi-Ouest Franck Mérel, Président Ovi-Ouest[/caption]

Une urgence, travailler avec les partenaires
La filière doit travailler avec plus de transparence pour un travail constructif. L’interprofession a le mérite d’avoir regroupé tout le monde (sauf les GMS qui ne répondent pas aux sollicitations) autour de la table. Il va falloir qu’on sache où reste la valeur ajoutée de la filière viande. Une chose est sûre, ce n’est pas dans les élevages… Et vu les difficultés de ces produits viande, il est aussi important que la filière lait s’en préoccupe. À nous de trouver ensemble une solution, pour une réelle synergie de la filière caprine dans son ensemble. Franck Mérel, Président Ovi-Ouest


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