Pour le conseiller Florent Cotten, le pâturage de précision, en plus d’optimiser les rendements des prairies, a aussi un « intérêt » sur la vie du sol.
Comme les autres cultures, les plantes herbagères ne poussent pas dans un simple support physique mais bel et bien dans un milieu vivant qui évolue selon les pratiques. « Dans nos prairies, sous nos pieds, nous connaissons le rôle des plantes à prélever l’eau et les éléments nutritifs nécessaires à leur croissance, démarre Florent Cotten de PâtureSens.
Cependant, on sous-estime la faculté de ces plantes à impliquer, à travers leur système racinaire, les organismes — bactéries, champignons et autres invertébrés — qui cohabitent avec elles dans la fameuse rhizosphère. » Cette zone de sol entourant la racine est en fait déterminée par la racine elle-même : cette dernière influe sur les propriétés physico-chimiques et la composition biologique de sa propre rhizosphère à travers divers mécanismes dont « l’exsudation racinaire », la sécrétion de divers composés.
En effet, par la photosynthèse, une plante produit divers produits carbonés dont une grande partie étant des sucres, mais aussi des acides aminés, enzymes, vitamines… « Jusqu’à près de 30 % des sucres produits vont servir à nourrir les microbes à travers son système racinaire. Les exsudats racinaires stimulent ainsi le développement et la prolifération des organismes vivants tout autour de la racine. » Ces micro organismes ont un rôle dans le biocontrôle, la fixation d’azote atmosphérique (rhizobium, azotobacter) mais aussi dans la solubilisation (grâce aux champignons mycorhiziens notamment) d’éléments nutritifs facilitant leur absorption par la plante. La recherche a ainsi montré que les plantes associées aux mycorhizes ont une densité nutritive plus élevée que les mêmes plantes non mycorhizées.
Une vie mycorhizienne plus intense en pâturage de précision
Qu’en est-il du mode de pâturage ? « Une étude américaine (Richard Teague, Texas Agri-life extension) vient de mettre en avant l’importance du mode de gestion des plantes prairiales à la fois sur la biomasse microbienne et sur la proportion de champignons développés dans les sols », rapporte le conseiller. « Le pâturage de précision, basé sur un temps de séjour court des animaux sur de faibles surfaces, permettant de favoriser une activité mycorhizienne plus importante (45 %) en comparaison aux modes de pâturage continu ou semi-continu (3 ou 4 jours sur un paddock). En faveur de la quantité et de la qualité nutritionnelle du fourrage. »
Cependant, la biomasse racinaire et ses sécrétions sont dépendantes de l’état de la plante en surface et de sa capacité à photosynthétiser. « Donc, par conséquent, corrélées à son mode de pâturage », précise le Breton. « Plus de trois jours sur un même paddock, accélération à contretemps à certaines périodes, réduction importante de la surface foliaire… Une gestion classique des prairies amène à fréquemment surpâturer les espèces. Cela a pour conséquence de réduire le système racinaire et de limiter fortement la stimulation de la vie microbienne et des bénéfices qui en découlent… » Le surpâturage expose également le sol au soleil favorisant l’évapotranspiration et sa montée en température. « Cette baisse d’humidité diminue fortement l’activité microbienne du sol et ses intérêts pour la plante, et par conséquent pour l’animal qui la consomme. »