Ouvrir l’œil pour reprendre pied face aux boiteries

td_boiterie - Illustration Ouvrir l’œil pour reprendre pied face aux boiteries
Le vétérinaire Jean-Marc Héliez rappelle que la gestion des boiteries, fréquentes et pénalisantes, débute par l’observation régulière et attentive des pieds de ses animaux.

[caption id= »attachment_31245″ align= »alignright » width= »207″]Jean-Marc Héliez, Vétérinaire Jean-Marc Héliez, Vétérinaire[/caption]

« Actuellement, dans certaines exploitations, il y a des situations catastrophiques en termes de boiterie », démarre Jean-Marc Héliez du groupe Chêne vert conseil. À l’occasion de la journée technique Bov’Idée organisée en Ille-et-Vilaine par Synthèse élevage, le vétérinaire a rappelé quelques résultats d’études pour bien faire comprendre que la lutte contre ce problème majeur en élevage laitier est un combat quotidien réclamant de la rigueur.

Détection précoce

S’appuyant sur sa riche expérience en suivi de troupeau, Jean-Marc Héliez insiste sur l’intérêt du parage curatif pour faire face « aux différentes lésions de la boîte cornée ». Pour lui, le message à retenir est très simple : « La précocité de dépistage et d’intervention est essentielle ». Les résultats d’une étude (Thomas et al., 2015) le montre clairement (voir tableau) : Pour une prise en charge précoce des lésions des onglons en ayant recours à un parage seul, le taux de guérison est de 69 %. Pour une prise en charge tardive, il tombe à 15 %.

« Sans oublier qu’en intervenant tôt, le recours à une talonnette et la préconisation d’un traitement à base d’anti-inflammatoire non stéroïdien par le vétérinaire en complément permet d’atteindre 85 % de guérison… » Le spécialiste insiste : « Dans le cas d’un ulcère de la sole ou d’une ouverture de la ligne blanche par exemple, un soin apporté dans les 15 premiers jours est favorable à une récupération totale. Un mois plus tard, on ne voit même plus quel pied a boité. »

Malheureusement, dans les campagnes, la détection est « en moyenne tardive ». Des études parlent de retard de 21 jours pour des vaches sérieusement boiteuses et de 70 jours pour des boiteries « légères » (Alawneh et al., 2012), ou encore d’un retard de traitement moyen de 38 jours (Groenevelt et al., 2014). « En fait, les éleveurs doivent aborder les boiteries comme ils abordent la santé de la mamelle car les clés de l’efficacité sont dans l’action précoce sur les boiteries légères. Une mammite détectée est soignée dans l’heure. Il faut apprendre à lever et soigner le pied d’une vache qui ne boite pas encore mais qui montre ces petits signes qui ne trompent pas. »

Il est donc primordial de s’atteler à observer régulièrement ses animaux. « On peut utiliser la méthode du score de locomotion pour noter une vache en mouvement : même quand la foulée n’est pas encore raccourcie, un dos légèrement voussé à la marche (score 2) alerte déjà d’un problème d’aplomb. L’autre option est d’examiner les animaux, au repos, au cornadis. Une posture légèrement modifiée est déjà un signal. Dans ces deux cas, il est temps d’intervenir. »

Incidence de la précocité d’intervention sur la guérison des lésions
(d’après l’étude Thomas et al., 2015)
  Parage seul Parage + talonette Parage + anti-inflammatoire (AINS) Parage + talonette + AINS
Prise en charge précoce 69% 72% 76% 85%
Prise en charge tardive 15% 15% non communiqué 16%

Vers des outils d’aide au dépistage

Pour Jean-Marc Héliez, les progrès à l’avenir doivent passer par la formation des éleveurs à ces méthodes, voire à l’usage d’outils d’aide au dépistage comme les accéléromètres haute fréquence placés sur les membres postérieurs, les tapis « intelligents » dans les stalles de robot de traite ou la thermométrie infrarouge qui permet de mesurer la chaleur émise par le pied boiteux… Ainsi que par l’apprentissage du parage et un minimum d’équipement à disposition pour intervenir en appoint. « Les intervenants extérieurs, vétérinaires et pédicures, doivent peut-être aussi faire évoluer leurs prestations pour permettre des interventions plus régulières et mieux ciblées. Au Danemark ou en Nouvelle-Zélande, des techniciens passent toutes les semaines noter des groupes d’animaux dans certains grands troupeaux par exemple. »

La nature de la lésion a son importance

L’étude de Giuliana et al. (2017) rapporte que les lésions les plus étendues ne sont pas les plus graves. Mais montre par contre que, même dans le cadre d’une prise en charge précoce, les boiteries cliniquement sévères d’emblée et celles avec une ouverture de la ligne blanche – surtout s’il y a atteinte du vif, hémorragie (bleime) – durent plus longtemps.


Fermer l'écran superposé de recherche

Rechercher un article